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EAN : 9782738129741
300 pages
Odile Jacob (19/09/2013)
2.7/5   5 notes
Résumé :
On imagine souvent les organismes vivants bien en ordre d'évolution comme dans les couloirs d'un muséum. Tout commencerait par une petite bulle prébiotique pour aboutir, progressivement, après une longue transformation organique, à l'homme de Cro-Magnon. Une évolution linéaire dont l'amour se concentrerait sur le seul souci reproducteur, intrépide aventure d'un vivant résolu à cette obsession gravissime : réussir à laisser le plus de ses gènes à une descendance impe... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
La quatrième de couverture me laissait présager un inventaire exhaustif des méthodes de séduction chez les animaux, les critères évolutionnistes qui les soutiennent, et la manière dont d'éhontés menteurs trichent pour s'attribuer des qualités qu'ils n'ont pas. Ça n'a pas été exactement le cas.

Dès les premières pages, l'auteur manifeste son opposition au néodarwinisme. À l'en croire, les scientifiques qui la soutiennent actuellement n'ont rien à envier aux créationnistes du siècle dernier : arc-boutés sur leur théorie, incapables de se remettre en question, refus de considérer les contre-exemples. Je suis déjà un peu surpris par ce départ en croisade, d'une part parce que les créationnistes de l'époque avaient soulevé des objections intéressantes et n'étaient pas tous, loin s'en faut, des obscurantistes têtus, d'autre part en voyant Stephen Jay Gould présenté en grand pourfendeur du néodarwinisme. Or si je ne dis pas trop de bêtises, il me semble qu'il a passé une bonne partie de son temps à vulgariser la théorie de l'évolution auprès du grand public, dont la sélection naturelle qui semble tant énerver Thierry Lodé.

Chaque début de chapitre commence par quelques cas de comportements d'animaux que le néodarwinisme ne peut pas expliquer. Ce qui me pose de nouveaux problèmes, car j'y retrouve des points de vue que je n'ai jamais associé au darwinisme. Par exemple, l'auteur parle de la reproduction entre deux lynx d'espèce différente pour montrer que le concept d'espèce n'est pas aussi rigide qu'il n'y paraît. Mais il me semble que le concept est mis à mal depuis bien longtemps déjà, et qu'une théorie qui défend des multiples changements graduels a peu de chances de parler de frontières bien définies de toute façon. Après, il n'est pas impossible que je sois tout à fait à côté de la plaque en biologie, mais rien ne colle avec mes lectures précédentes sur le sujet.

Quoi qu'il en soit, si l'auteur réfute la sélection naturelle, on a bien de la peine à comprendre ce qu'il veut mettre à la place. La sexualité, l'altruisme (mais pas l' « altruisme égoïste » de Dawkins&Cie) sont de temps en temps évoqués, mais de manière trop floue. À mon sens, Lodé passe trop de temps à démolir les théories des autres et pas assez à développer la sienne, et il est vraiment compliqué de se faire une vision d'ensemble de son système à partir de quelques exemples épars.

Un essai assez décevant, qui m'a apporté plus de confusions que d'explications.
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En prenant de l'âge, je ressens de plus en plus d'aversion pour la polémique. Or ce livre, hélas, est composé en très grande partie de polémiques contre Darwin et surtout les « neodarwinistes » dont je suis en train de m'abreuver depuis quelques mois. Sans doute parce que, pour étaler les spécificités de ses théories, l'auteur préfère caricaturer la vision adverse, (encore) paradigmatique ou en tout cas majoritairement acceptée en biologie évolutionniste, dénigrer ses opposants – et omettre de les citer, comme pour Matt Ridley, même lorsqu'il parle de la théorie de la Reine rouge (The Red Queen – qui précède de vingt ans cet essai), ou grossir jusqu'au gigantisme des différences modestes, réductibles, des nuances compatibles qui gagneraient à être prises pour des complémentarités, des difficultés théoriques déjà affrontées et résolues...
Non que les incompatibilités avec l'orthodoxie n'existent pas. Et j'ai apprécié de pouvoir les jauger avec mes précédentes et sans doute futures lectures neodarwinistes orthodoxes. Mais d'une part il m'a fallu arriver à l'excipit de l'ouvrage (que je reproduis presque intégralement en cit.) pour lire une formulation précise et concise des théories énoncées faute d'être démontrées par le livre ; d'autre part, la posture polémique de l'auteur m'a poussé à l'attitude défiante du lecteur qui cherche à démolir ce qu'il comprend, à l'aune de ce qu'il a déjà lu. C'est dommage lorsque l'on cherche respectivement à convaincre et à apprendre.
Par ailleurs, bien que le verbe soit très séduisant, surtout au début, dans la tradition de la prose philosophique française, alors que « mes » Dawkins, Ridley et confrères ont la plume plus empirique, plus mathématique, un brin ironique mais souvent plus indigeste des scientifiques britanniques, je reproche à cet essai une structuration des chapitres obscure, très peu soucieuse de toute progression démonstrative, et une surabondance d'anecdotes sur la reproduction voire sur toutes sortes de moeurs de telle ou telle autre espèce animale, souvent presque sans rapport – ou ô combien ténu – avec le quod erat demonstrandum. Encore une sorte d'arrogance envers le lecteur, trop ignare sans doute pour qu'on se donne le mal de le persuader, qui n'a donc qu'à se contenter d'être amusé d'histoires animalières bien contées.
Il serait tentant de rédiger cette note sur le même ton railleur, et particulièrement de rétorquer contre l'auteur les mêmes reproches qu'il adresse à ses opposants : après tout, même un écolier sait faire la différence entre Darwin et le darwinisme social (et l'eugénisme) – ils n'ont pas plus à voir l'un vis-à-vis de l'autre que la méiose avec Kropotkine (et le terrorisme anarchiste) ; il n'y a pas davantage de téléologie dans la propagation maximale des gènes que dans la « sensibilité primordiale » et dans l'omniprésence de la « relation » dans la biosphère ; le soi-disant « égoïsme des gènes », expliqué dans un essai entier très touffu de Dawkins, est exactement, ni plus ni moins que la cause de la « reproduction différentielle » ; de même, je trouve beaucoup d'analogies, même dans les exemples, entre « phénotype étendu » et « interactions » ; la « compétition » - expression moderne de la « sélection naturelle » - n'est pas éloignée, si j'ai bien compris, du « conflit génomique que la réduction méiotique gouverne » ; à ceci près que Lodé ne dit rien, mais alors rien du tout, du conflit entre les genres, ni de la manière dont celui-ci se transforme en réconciliation amoureuse, ni en somme il ne répond à la question posée par le titre du volume ; enfin, après mes lectures sur la dialectique très complexe entre gènes et comportement, la vision de Lodé sur ce sujet me paraît extrêmement fruste.
Au contraire, une question m'a effectivement convaincu : l'impossibilité de placer sur le même plan la « sélection naturelle » alias « reproduction différentielle », que je considère, avec Dawkins et n'en déplaise à Lodé, comme l'affaire des gènes, et la « sélection sexuelle », ou « choix des partenaires », qui ne peut que concerner l'individu – sur un plan que j'estime subsidiaire du précédent. Et en particulier, quant au choix, pour moi, suivant Leibniz : croit choisir celui qui ignore les raisons de ses choix...
A part cela, j'ai bien aimé la genèse des eucaryotes, et la prégnance incomparable de la sexualité.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
« Jamais il ne fut aussi temps de construire un nouveau paradigme évolutif qui :
- Discute le modèle d'une coévolution écologique, intégrant les organismes dans un ensemble d'interrelations dynamiques et changeantes avec leur environnement et reconnaissant la force structurante des interactions, de l'hétérogénéité de l'environnement et des stratégies mixtes.
- Intègre une nouvelle vision de l'information génétique, bannissant le déterminisme des "bons gènes" en s'ouvrant, au contraire, sur l'épigénétique, sur ma théorie du gène livre de cuisine […]
- Désavoue la dichotomie des sélections naturelle ou sexuelle au profit d'une réflexion sur la reproduction différentielle, seul critère d'efficacité à long terme, reconnaissant combien les individus et leurs décisions stratégiques pèsent sur l'histoire diversifiante de leur évolution.
- Démente, par conséquent, la figure traditionnelle de l'arbre phylétique vertical et des ancêtres uniques, mais, à l'opposé, admette les transferts horizontaux et une construction phylétique en mosaïque, selon le principe d'une évolution réticulée.
- Évacue l'hypothèse centrale de la concurrence intraspécifique et propose plutôt de réfléchir au rôle des interactions et de la facilitation dans le processus évolutif, générant du conflit et de la spécialisation phénotypique, introduisant la différence dans l'histoire, probablement selon des dispositifs bioéquivalents au mécanisme de déplacement de caractères.
- Conteste le théorie du sexe comme processus avantageux de propagation des gènes, mais accepte, au contraire, d'étudier la sexualité comme une interaction primitive propre aux eucaryotes suivant la théorie des bulles libertines, et réalisant que tout changement résulte d'un mécanisme immédiat et proximal sans orientation ni but ultime.
- Et, enfin, conçoive que le comportement ne consiste pas dans une force complémentaire au service des gènes, mais cherche plutôt à retrouver une écoéthologie, le développement des comportements dans leur environnement, évacuant définitivement la tentation eugéniste. » (pp. 279-280)
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« Car l'apparition de la sexualité a entraîné trois conséquences majeures sur le monde.
Tout d'abord, le sexe a définitivement brouillé une "sélection" prétendument impersonnelle en favorisant le CHOIX des partenaires en tant que force évolutive. […] D'un seul coup, la RELATION devenait plus importante que l'individu. Née d'une sensibilité primordiale qui rend les uns attirants pour les autres, voilà que l'histoire évolutive dépend maintenant de la liberté du désir.
Le deuxième résultat de l'émergence de la sexualité consiste dans l'opposition inévitable des deux genres. À partir de la spécialisation des gamètes, l'un petit, mobile, le spermatozoïde, l'autre gros et plein d'énergie, l'ovule, une divergence incroyable confronte les deux partenaires, et ce conflit invraisemblable se déroule dans le corps des protagonistes. […] Alors commence à s'entreprendre la grande stratégie des réconciliations amoureuses, menant progressivement à l'organisation de relations mutuelles précaires et magnifiques.
Enfin, le sexe biologique produit la variation, la différence essentielle. Au lieu de s'égarer dans une amélioration continue de performances d'une espèce qu'une crise viendrait réduire à néant, la reproduction sexuelle s'engage dans une diversification infinie, recombinant les gènes des uns avec les gènes des autres pour former une individualité nouvelle absolument originale. De toutes ces imprévisibles conséquences, il découle une subtile interdépendance des uns et des autres. » (pp. 40-41)
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« Dérivant de fonctions métaboliques, les premiers archaïsmes du désir commençaient. Certaines bulles [de lipides, prébiotiques], privées de matériel génétique ont disparu. Mais d'autres ont profité de ces échanges, et les plus libertines, celles qui toléraient le mieux la promiscuité, ont mêlé leurs gènes. Cette appropriation réciproque a permis de profiter de l'aptitude des gènes à rénover les enzymes, à changer de métabolisme. Du coup, l'ADN s'additionnait, se dédoublait même, organisant sa redondance. Entre les cellules, un équilibre des échanges s'est réalisé, une gestion du contact, et, à partir de mécanismes primitifs de rejet d'un trop-plein d'ADN, la réduction méiotique a tempéré le nouvel organisme, inventant le début du sexe. […]
Les échanges d'ADN se multiplient, entraînant un conflit génomique que la réduction méiotique gouverne. Grâce au noyau, ces protocellules admettent les multiples chromosomes et la recombinaison totale. Les premiers eucaryotes apparaissent. […] établissement d'une relation préalable […] et cela chez des êtres non sexués, ni mâles ni femelles. Car le sexe est apparu avant les individus sexués ! » (p. 266)
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A partir des échanges génétiques pratiqués par quelques bulles libertines primitives (libertine bubble theory) enfouies dans une promiscuité archaïque, un mécanisme complexe de maintien des gènes s’est mis en place. La promiscuité a obligé aux tranferts de gènes mais il en a découlé un avantage inattendu : les gènes transférés ont changé les enzymes des bulles qui les obtenaient. S’il on préfère, les bulles qui ont été les plus libertines sont celles qui ont accru leur réussite révélant combien le sexe est né d’une interaction primitive immédiate. Il fallait juste que chacun soit sensible aux autres, que chacun reconnaisse les molécules de l’autre. Conséquence secondaire de réactions métaboliques primitives, le sexe provient de cette sensibilité élémentaire
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Ni gènes généreux ni gènes égoïstes, le sexe a enraciné une relation entre les organismes vivants. Ainsi s'organise une relation dynamisée par le conflit sexuel, une relation qui détourne les caractères et engage les mutualismes; C'est ici que se révèle la force structurante des interactions. Les champignons et les plantes ont hésité encore, mais la plupart des êtres vivants, et 95% des animaux, se risquent désormais avec davantage de résolution dans l'aventure sexuelle.
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