AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782882502995
234 pages
Noir sur blanc (07/03/2013)
3.64/5   7 notes
Résumé :
Né dans une famille d'origine polonaise, Édouard est accusé à quatre ans d'être le fils d'« ennemis du peuple » ; il est évacué du blocus de Leningrad et envoyé dans un orphelinat du NKVD près d'Omsk, en Sibérie. En 1945, le petit garçon décide de s'évader pour rejoindre sa mère à Leningrad. Il lui faudra six ans. C'est cet extraordinaire périple en train, seul, dans une URSS marquée par la guerre et le stalinisme, qui nous est raconté dans Le Baptême des barreaux.<... >Voir plus
Que lire après Le baptême des barreaux : Notes prises à l'arrachéVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Le titre un peu étrange de cet ouvrage se réfère à une ancienne expression russe, par laquelle les prisonniers désignaient un nouveau venu en milieu carcéral. le sous-titre vient de l'habitude de l'auteur de vite prendre des notes "sur un genou" dès qu'une occasion se présentait.

Les barreaux qu'Édouard Kotcherguine a connu comme môme sont ceux d'orphelinats, d'abord à Leningrad (Saint-Pétersbourg) ensuite à Kouïbychev, l'actuel Samara au bord de la Volga à 862 km au sud-est de Moscou et proche du Kazakhstan.

L'auteur a eu le grand bonheur de naître en 1939 dans la Russie très humaniste de Staline et l'horrible Lavrenti Beria, de parents russo-polonais. Son père Stepan croupissait dans les sous-sols de la lugubre Loubianka, siège de la police politique soviétique. Sa mère polonaise, Bronislawa Odynets, à qui l'auteur a dédié son témoignage, fut emmenée pour interrogation par le NKVD (le précurseur du KGB) et le mioche Édouard se retrouvait à l'orphelinat.

L'auteur commence par nous raconter son transfert spectaculaire de Saint-Pétersbourg assiégé en 1941 par les nazis, l'atterrissage forcé du petit avion en bois à bord duquel il se trouvait et qui attaqué par un Messerschmitt devait atterrir en flammes sur l'immense lac glacé de Ladoga.

Ensuite, le pénible périple continuait vers Samara, où le petit père du peuple avait transféré, en octobre 1941, son gouvernement, fuyant la progression de l'armée allemande sur le territoire russe.

"En ces années féroces, quand par la faute de deux moustachus des millions d'hommes luttaient à mort dans la Russie occidentale, nous les enfants, coulions des jours paisibles au fin fond de la Sibérie".
Paisibles peut-être, mais cet orphelinat d'État moderne, une ancienne prison, loin du monde et régi par des règles très strictes du NKVD n'avait absolument rien de très invitant ou charmant.

Il faut lire la description par l'auteur de cette institution de Tchernoloutchié, la bâtisse, la répartition des salles, bureaux et chambres, le règlement interne et surtout l'encadrement humain, à commencer par la directrice surnommée le Crapaud, à cause de ses yeux globuleux, qui faisait de la peinture à l'huile "et manifestait un talent certain pour la stalinographie". Personne n'aimait cette bonne femme, se souvient l'auteur.

Après la défaite nazie, en octobre 1945, Édouard, qui n'a pas encore 6 ans, décide de s'enfuir de l'orphelinat et de regagner son Pétersbourg natal.

C'est le signal de départ d'une épopée qui prendra au jeune Édouard 6 longues années. Une épopée faite de longues attentes dans les gares et centres de triage ferroviaires, de voyages cachés dans toutes sortes de trains, de recherche continue de nourriture et de peur constante d'être découvert et puni.

Son grand atout pour survivre consiste en son talent de faire des beaux portraits de Lénine et Staline, pour une minuscule mie de pain ou, luxe suprême, un morceau de carotte.

C'est également une période de grande solitude, sauf la brève phase pendant laquelle il bénéficie de la compagnie de Mitiaï, un petit malheureux qui a perdu ses parents et ses yeux, mais qui séduit les passants avec sa belle voix et ses chants révolutionnaires. Comme Édouard Mitiaï voyage clandestinement à Novgorod où vivent ses grands-parents, mais le petit chanteur meurt d'une infection pulmonaire.

Ses interminables voyages sont entrecoupés par des hivernages forcés à cause du grand froid dans des orphelinats de passage comme à Tcheliabinsk et Perm (Molotov à l'époque).

Je vous laisse découvrir si Édouard retrouvera, au bout de ses pérégrinations, sa Matka (mère) Bronia chérie.

Le récit de l'errance d'un gosse dans ce colossal pays ravagé par la guerre est passionnant. Dommage que Kotcherguine a truffé son histoire d'expressions argotiques insolites et difficilement compréhensibles pour nous autres occidentaux. Je plains la traductrice qui a dû imaginer des équivalents adéquats en Français. Heureusement que ce soit l'excellente Julie Bouvard qui a été chargée de cette délicate mission.

Je termine par la complainte du petit orphelin aveugle (à la page 118) :

Dans votre beau jardin
Chante le rossignol,
Moi, j'ne suis qu'un gamin
Que personne ne cajole.
Personne ne me cajole
Personne ne m'attend,
Excepté la route et les chiens errants...
Commenter  J’apprécie          4714
Le sujet de ce livre ne peut pas laisser indifférent. À quatre ans, Édouard est enlevé à sa mère pour être envoyé dans un orphelinat en Sibérie. Les conditions de vie y sont affreuses, et en 1945,à l'âge de huit ans, il décide de s'évader pour retrouver sa mère. Commence alors un long périple de six ans au cours duquel il va traverser l'URSS d'est en ouest pour arriver enfin à Saint-Pétersbourg.
On connaît malheureusement bien ce que le peuple soviétique a dû endurer sous Staline, mais on imagine moins facilement que des enfants aient pu aussi être victimes de persécutions en tout genre. Le témoignage d'Édouard Kotcherguine présente donc un intérêt historique certain.

Plusieurs choses m'ont cependant gênée dans cette lecture. Tout d'abord, il y a une alternance de réflexions très naïves, normales chez un enfant, et de remarques d'adulte. Si bien qu'on ne sait plus qui raconte : l'enfant, ou l'adulte qu'il est devenu ? Cette instabilité dans le récit m'a empêchée de ressentir l'empathie que j'aurais dû normalement éprouver pour ce petit garçon qui a vécu des choses qu'aucun enfant ne devrait avoir à vivre. Enfin, j'ai trouvé le style un peu rebutant : je peux comprendre qu'il y ait un jargon particulier utilisé par les enfants des orphelinats de cette époque, mais son emploi perpétuel dans le livre rend l'ensemble très lourd, et rapidement lassant. du moins, c'est mon avis.
J'ai en revanche beaucoup apprécié les cartes insérées entre les différents chapitres. Elles sont écrites en cyrillique, ce qui donne beaucoup de charme, l'important ici étant moins de situer l'action que de nous plonger dans l'atmosphère de l'URSS de l'époque.

Merci à Babelio et aux Éditions Noir sur Blanc, découvrir un nouveau livre est toujours un plaisir.
Commenter  J’apprécie          100
Traduction : Julie Bouvard

ISBN : 9782882502995

Nous remercions Babélio et les Editions Noir Sur Blanc de nous avoir gracieusement offert un exemplaire de cet ouvrage.

Singulièrement vivant et coloré, ce témoignage se lit comme un livre d'images baroques et émouvantes, celui créé page par page au long de six années par un jeune garçon d'origine polonaise qui, à quatre ans, fut déclaré "ennemi de classe" et "ennemi du peuple soviétique" par la paranoïa stalinienne s'exprimant par l'organe du NKVD. Bien entendu, on l'arracha aussi à sa mère mais l'histoire se finit bien et il la retrouve à la fin du texte, au bout d'un long périple qui le voit s'évader de l'orphelinat pour "ennemis du peuple" où il a été placé en Sibérie pour rejoindre Léningrad.

Il aura donc fallu à cet enfant six ans, six longues années qui auraient abattu plus d'un adulte, pour défaire les noeuds dans lesquels l'avait emprisonné un système technocratique dont la redoutable efficacité n'est plus à prouver, à nous, gens du XXIème siècle. Mais là où un autre aurait usé, voire abusé du drame et de la tristesse, Kotcherguine préfère utiliser un sens de l'humour qui ne se trahit pas un seul instant et qui confère à son témoignage une saveur bien particulière. Il emploie également - en tous cas, c'est ce que restitue la traduction - et dans la majeure partie du livre une langue argotique et familière qui risque de surprendre et peut-être de gêner ou de déstabiliser. J'avoue pour ma part que cela m'a heurtée car, peut-être à tort, j'ai trouvé que l'auteur systématisait un peu trop le procédé.

Pour le reste, de belles images, répétons-le, celles de Soviétiques de tous bords pris dans l'immense tourmente de la Grande guerre patriotique - notre Seconde guerre mondiale - et bien obligés de faire au mieux pour survivre. Parmi eux, le petit Edouard se déplace et virevolte avec pugnacité, prenant la vie telle qu'elle se présente à lui et ne désespérant jamais - ou si rarement que ce n'est pas la peine d'en parler. Entre ses passages dans les trains qui le ramènent vers l'Ouest, de nombreuses escales dans des orphelinats afin d'y passer l'hiver ou les moments de faiblesse. Et toujours, toujours, la volonté acharnée de s'en sortir et de revoir sa mère.

Ca se lit vite et bien. Ce n'est peut-être pas un grand témoignage mais c'est intéressant à défaut de passionner vraiment. A vous de voir si cela vous tente. ;o)
Commenter  J’apprécie          50
Edouard Kotcherguine n'a pas encore cinq ans lorsqu'il est séparé de sa mère, Matka Bronia. En effet, celle-ci est arrêtée car considérée comme ennemie du peuple. Il est envoyé loin de Leningrad dans un orphelinat du NKVD d'Omsk, en Sibérie. En 1945, âgé de huit ans, il décide de s'évader pour retrouver sa mère à Leningrad.
En nous racontant son long périple à travers l'Union Soviétique, Edouard Kotcherguine nous dévoile les côtés sombres du stalinisme avec son écriture vivante et pleine d'humour. Il dresse des portraits vivants et haut en couleurs des personnes qu'il rencontre sur son chemin avec son parler des « baptisés » (voir l'avant-propos de l'auteur sur l'explication du titre, très utile). Il n'est pas facile de le suivre au début dans son jargon mais petit à petit, l'écriture prend tout son charme. Une époque terrible, les figures de Staline et consorts sont omniprésentes ! le sujet m'interpelle, je le note pour de prochaines lectures.
Cette autobiographie sur son enfance à la recherche de sa mère est vraiment réussie. Quels souvenirs il arrive à restituer malgré son jeune âge ! J'aurais aimé en savoir plus : son éducation pendant son temps de voyage, des photos sur ses oeuvres de jeunesse (il y a des photographies d'époque en noir et blanc à la fin), une carte plus compréhensible (avec les noms des villes en français, pas facile de comprendre l'écriture russe)…
Kotcherguine est aujourd'hui scénographe à Saint-Saint-Pétersbourg. En 2010, le baptême des barreaux a reçu le prix littéraire russe National Bestseller.


Merci à Babelio et aux Editions Noir sur Blanc pour cette découverte.
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (3) Ajouter une citation
J'suis pas un fils à maman
Ni un fils à papa,
J'ai poussé dans un champ
Et le vent m'emporta.

Complainte de l'orphelin.

(page 21).
Commenter  J’apprécie          290
A la vérité, les représentantes du beau sexe qui exerçaient dans ce genre d’établissement ne se distinguaient ni par leur bonté ni par leur amour des enfants, et plus leurs galons en jetaient, plus elles étaient vaches.
Commenter  J’apprécie          60
Lorsque deux gamins faisaient connaissance, ils se lançaient :
- T’es un espion ?
- Non, un ennemi du peuple.
- Et si t’étais l’un et l’autre, hein ? Comme moi, par exemple ?
Commenter  J’apprécie          50

autres livres classés : stalinismeVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus

Lecteurs (12) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1734 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}