Tout au long de la lecture de cet album, je n'ai pu me départir d'un sentiment de déjà-vu, et c'est après coup que j'ai compris pourquoi : j'ai trouvé que l'album, dans son dessin autant que dans certains thèmes abordés, semblait bien proche de
la Sirène des pompiers, dont les auteurs se sont révélés identiques. Et je dois dire que ça se sentait tout particulièrement, surtout dans les sujets que la BD aborde.
Cela dit, les deux oeuvres sont bien différentes (et je conserve une préférence pour
La Sirène des pompiers), puisque "
Peau d'homme" prend le détour du conte, bien qu'ancré dans la réalité historique de l'Italie de la Renaissance. L'histoire part de l'idée de femmes se transmettant une peau qui peut les faire paraître homme pour parler de plusieurs sujets sociétaux, aussi bien de politique, de genre et de sexe que de religion ou de famille. C'est bien mené, et j'ai beaucoup apprécié la façon dont Hubert dessine certains sujets sans forcément tomber dans la caricature grossière. En un sens, la BD m'a rappelé le travail de
Stéphane Fert sur
Morgane et
Peau de Mille Bêtes, notamment sur la question des thématiques et les emprunts au conte.
"
Peau d'homme" brasse donc plusieurs sujets, et je dirais que le défaut que je lui trouve est d'en aborder un certain nombre sans forcément avoir le temps de développer ensuite. Et j'ai regretté certains choix, notamment dans le long développement d'avant-mariage (environ la moitié du livre) pour accélérer ensuite et ne pas forcément utiliser certaines choses dont j'aurais aimé voir une conclusion, notamment les amies de l'héroïne et leur devenir. Surtout celle qui glisse dans la religion. Et certains autres choix narratifs m'ont frustré, non pas qu'ils soient mauvais, mais parce qu'ils passaient un peu trop vite à mon goût sur ce qui avait été développé en amont.
Mais nonobstant ces considérations personnelles, j'ai beaucoup aimé ma lecture et la fluidité du récit, accentuée par le dessin qui n'hésite pas à rompre le gaufrier traditionnel pour donner des planches de paysages dans laquelle les personnages évoluent sans interruption. le côté conte est retranscrit avec les aplats de couleur, très unies, et la rondeur du trait. L'auteur s'est fait plaisir dans les dessins, parfois presque dans la caricature (je repense aux prêches du frère moralisateur, qui nous indiquent clairement ce que l'auteur pense d'une telle pensée !). Les environnements sont réduits à l'essentiel, le propos restant avant tout centré sur l'humain.
En bref, les auteurs jouent la carte du conte pour parler de sujets qui les intéressent, et c'est assez bien mené. Sans aller avec des gros sabots, on sent leurs idées et leurs propos passer, avec quelques petites considérations qui seront toujours d'actualité. Mais pour autant, il me reste en tête que ça ressemble à quelques autres lectures que j'ai faites récemment et qui m'avaient plus marqué, je pense. Et surtout, je n'arrive pas à me défaire de l'idée qu'on retrouve beaucoup de
la Sirène des pompiers, que j'ai vraiment plus apprécié que cette lecture. Donc pas déconseillé, ça c'est sûr, mais pour ma part c'est une lecture agréable mais avec quelques réserves. Je n'en ressors pas déçu et je pense que bon nombre de personnes sauront l'apprécier mieux que moi, j'en suis sûr.