AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Patrick Honnoré (Traducteur)
EAN : 9782809715750
208 pages
Editions Picquier (03/02/2022)
3.86/5   18 notes
Résumé :
Il existe une Iliade japonaise, une épopée guerrière chantée par des moines aveugles qui sillonnaient le pays en s'accompagnant au luth biwa. Elle s'appelle le Heike monogatari et conte la lutte des clans Minamoto et Taira au XIIe siècle, dont le point culminant fut la bataille navale de Dan-no-ura, où périt le clan Taira.

Le roman de Furukawa commence où s'achève l'épopée guerrière. Cent cinquante ans plus tard, Tomona, fils de pêcheur-plongeur, naî... >Voir plus
Que lire après Le roi chienVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Hideo Furukawa est un des fers de lance des quelques nouveaux talents de la littérature japonaise, et se démarque par son audace. Son pari avec le roi chien est assez gonflé : donner en quelque sorte une suite au Dit des Heike (traduit par ailleurs en français par René Sieffert aux éditions Verdier), une geste guerrière façon Illiade japonaise qui narre l'affrontement pour le pouvoir durant la guerre de Genpei entre les clans Taira (ou Heike) et les Minamoto qui vont les supplanter. Nous sommes à la fin du XIIème siècle, époque Kamakura.

Lors de la bataille navale finale de Dan no ura (1185), des symboles du pouvoir ont sombré. Si certains ont été retrouvés, l'épée sacrée de la dynastie impériale, Kusanagi no Tsurugi (l'épée qui fauche les hommes comme des herbes !) gît toujours au fond des eaux. 150 ans après les évènements, l'époque Muromachi est arrivée, sous le règne des shogun de la lignée familiale Ashikaga. Il faut retrouver cette épée qui redevient un enjeu politique quand les rivalités de clans resurgissent, le pays étant divisé, avec même deux empereurs et leurs cours, du Nord et du Sud. Un jeune pêcheur-plongeur, Tomona, va involontairement la remonter sur son embarcation. Son puissant éclat va le rendre aveugle et tuer instantanément son père qui l'accompagnait.

Tomona part sur les chemins et devient joueur de biwa, membre d'une de ces guildes musiciennes, sous le nom de Tomo'ichi, et finalement de Tomoari. Il rencontre Inuô, né informe et à qui on avait mis un masque inexpressif pour cacher son horrible visage. le père d'Inuô a fondé Hie-za, la plus importante compagnie théâtrale de Sarugaku, l'ancêtre du Nô. La naissance d'Inuô est placée sous une malédiction dont son père est complice, mais les fantômes de joueurs de biwa massacrés qui portaient le souvenir du clan Taira vaincu veulent faire d'Inuô leur messager. Il va devenir acteur de Sarugaku et chanter l'histoire des Heike, satisfaisant ces esprits qui restaurent peu à peu ses capacités physiques et l'embellissent. Un heureux binôme se forme entre le musicien aveugle et l'acteur-danseur masqué, qui devient célèbre à travers la place pour créer des épisodes inédits de l'histoire des Heike.

Inuô au fait de son talent et de sa gloire artistique a acquis une beauté parfaite et peut jouer sans masque certaines pièces nouvelles qui constituent pour Tomoari « le rouleau d'Inuô ». Mais un jour, le tout-puissant shogun Ashikaga Yoshimitsu, Maître de Muromachi, qui pourtant a pour modèle le chef des Taira mort deux siècles plus tôt, Taira no Kiyomori, va siffler la fin de la partie. Les temps ont changé, il faut tourner définitivement la page des Heike, et renouveler l'art de la scène…Pour Inuô et Tomoari, c'est s'adapter ou mourir…

Furukawa est connu pour bousculer la structure classique du roman, avec parfois un côté confus et foutraque. Ici sa narration surprend par les répétitions, les commentaires qu'il se permet dans un langage très actuel, des dialogues imprégnés de ces deux caractéristiques qui font parfois pauvres ou décalés. C'est un effet évidemment voulu, le conteur assume d'être dans son époque, le 21ème siècle. Les chapitres sont très courts, certains sont consacrés à rappeler le contexte historique (c'est riche, très documenté et gratiné en noms propres de personnes et de lieux) et le ton est celui de « Il était une fois », un ton de conte exigeant, d'épopée artistico-historique. C'est assez étrange, parfois difficile à suivre, on se demande souvent à quelle époque on est, si Inuô et Tomoari finalement ne font pas qu'un, leur forte amitié est peu palpable car on ne les voit jamais interagir ensemble. L'auteur maintient comme une distance nous empêchant de nous attacher aux personnages, des personnages amputés d'une partie d'eux-mêmes et qui se régénèrent à travers l'exercice de leur art. C'est peut-être d'ailleurs l'un des enseignements du roman : la puissance de l'art pour élever les êtres, se dépasser malgré un handicap, etc. On peut y voir aussi l'intervention en tout temps des hommes de pouvoir sur l'art, l'art est une arme politique, comme l'a montré chez nous le Roi Soleil !

Le traducteur Patrick Honnoré a la bonne idée d'introduire le roman par une salutaire explication de texte et de contexte. Hideo Furakawa a réalisé en 2016 une nouvelle traduction du Dit des Heike, 900 pages, qui l'ont tellement immergé qu'il a imaginé un roman qui se voudrait une sorte de suite à cet ouvrage qui, à l'image de l'Iliade ou des chansons de geste occidentales, est née de la tradition orale et connaît des variantes. Il nous confirme qu'Inuô a réellement existé, comme auteur et acteur de pièces de Nô, mais aucune ne nous est parvenue.

L'ensemble se tient, on passe plutôt un bon moment de lecture, assez court, avec les travers déjà mentionnés qui font aussi les atouts de cet auteur original et originaire de Fukushima, qui est clairement devenu une voix marquante de la littérature japonaise contemporaine.
Commenter  J’apprécie          212
Connaissez-vous le dit des Heiké ? Cette épopée est un grand classique japonais, on retrouve son influence dans de nombreuses oeuvres littéraires japonaises.

Hideo Furukawa s'est vu confier la mission il y a quelques années de proposer une nouvelle traduction en japonais moderne de ce classique. Il s'y est attelé pendant plusieurs années et ce projet l'a particulièrement habité, même après sa publication. le dit des Heiké est issu de la tradition orale des troubadours aveugles, bien que cette oeuvre ait été compilée officiellement, il y eut de nombreux épisodes annexes écrits par des auteurs qui furent édités. Furukawa s'est donc lui aussi prêté à cet exercice, et c'est ainsi que le roi chien a vu le jour.

Le roi chien est une lecture qui peut sembler exigeante tant elle est riche en références historiques et en personnages. Toutefois, si on se laisse porter par la plume directe et franche de Furukawa, on voit se déployer devant nos yeux un épisode d'une très belle épopée. L'auteur s'inspire de cette tradition orale, en apostrophant vivement le lecteur, en lui faisant des petits rappels, en le tutoyant. L'oralité transparaît dans son récit et c'est un vrai régal de le lire. La trame de l'histoire est racontée à la manière d'un conte, où le fantastique n'est jamais bien loin, où les morts côtoient les vivants.

Ce roman nous fait découvrir le monde des joueurs de luth biwa aveugles et des danseurs de sarugaku. L'art transcende et sublime le laid. L'auteur nous offre aussi une très belle histoire d'amitié.

Le petit bonus : la très bonne préface de Patrick Honnoré, le traducteur, qui replace dans son contexte historique le dit des Heiké et nous donne des clefs de compréhension de l'oeuvre de Furukawa.
Commenter  J’apprécie          100
J'ai adoré cette histoire et la fluidité de l'écriture réalisé a la manière d'un conte oral. J'étais intrigué et complétement perdu par le résumé.
Il s'agit de l'histoire d'un enfant difforme, maudit depuis sa naissance. Tout en grandissant il va développer un certain tallent de danseur de pièce de théâtre et devenir le compteur de sa propre histoire.


Ce livre a été écrit par Hidéo Furukawa après qu'il ai traduit un grand texte japonais: la légende des Heike. Je regrette donc que cette grande épopée ne soit pas traduite en français par les éditions Philippe Picquier
Commenter  J’apprécie          33

Citations et extraits (3) Ajouter une citation
La capitale impériale était la proie de troubles. On se battait entre guerriers, au nom de l'une ou l'autre des cours impériales auxquelles chaque camp était affilié, mais il y avait également des luttes intestines à l'intérieur de chaque camp. En ce temps-là, les forces de la cour du Sud avaient le dessus. C'est-à-dire celles dont le quartier général avait été constitué à Yoshino mais avait beaucoup bougé depuis.
La capitale elle-même était alors aux mains des forces de la cour du Sud.
Le bas peuple, pendant ce temps, poursuivait sa vie ordinaire.
S'efforçait de vivre.
Et l'art restait l'art. A l'art on demandait de divertir, et le marché du théâtre de déclamations dansées et des récitatifs était porteur.
Les menaces se rapprochaient. Arrivé à la capitale, Tomona fut reçu dans la guilde de son maître, où il apprit deux choses. La première, que, quelques années auparavant, nombre de joueurs de biwa aveugles avaient été assassinés dans des circonstances mystérieuses. Horreur ! Horreur ! La seconde, qu'avant ces calamités, trois importantes guildes de troubadours maîtres du biwa existaient à la capitale.
Il n'en restaient que deux à présent.
Tomona avait mué et avait eu le temps de s'habituer à sa nouvelle voix. Il réfléchissait à son avenir, comment aborder le monde, comment affronter le monde, avec cette nouvelle voix ─ et d'autres nouveaux sons ─, bien sûr qu'il y pensait. Il y pensait et y repensait. Tout à fait en vain, d'ailleurs.
C'était tellement évident.
Tomona était maintenant affilié à l'une des guildes les plus puissantes de maîtres du biwa. Il se mit donc à apprendre à jouer du biwa et à conter.
Commenter  J’apprécie          100
Bien sûr, c'était surtout le masque qui était remarquable. Quel genre de masque ? Un masque sans expression. Ni rieur. Ni triste. Ni agressif. Pas un masque de vieux. Pas un masque de vieille. Ni de jeune femme. Ni de jeune homme. Ni de démon. L'expression vide, l'expression du néant. Et pourtant, son père et son grand-père possédaient une collection de masques qui exprimaient autre chose que le néant, car la famille appartenait à une lignée de bateleurs.
Les habitants du quartier disaient :
" Peut-être est-ce la coutume, pour les enfants des familles de bateleurs.
Les habitants du quartier disaient :
"Peut-être est-ce la coutume, pour les enfants des familles de bateleurs, de porter un masque dès leur plus jeune âge ? Enfin...qu'on les oblige à porter un masque, peut-être."
"Peut-être pour s'habituer", disaient-ils aussi.
"Comme un entraînement. Comme qui dirait la voie de l'art, sans doute. C'est ça. La voie de l'art."
Toutefois, l'été venu il le portait toujours, et en ville les rumeurs couraient sur cet enfant de deux, trois ans qui restait la tête couverte. Car évidemment les gens lui trouvaient un air bizarre, à cet Inuô Roi Chien. Ils lui trouvaient un air bizarre, mais quand ils le hélaient, un masque vide se tournait vers eux.
Commenter  J’apprécie          10
[...] une ambition qui vient du plus profond des tripes donne accès à un pouvoir en principe interdit aux humains. Le pouvoir des sorts et des sortilèges. Un pouvoir hétérodoxe, disons. Pas de chez nous, en tout cas.
Commenter  J’apprécie          40

Video de Hideo Furukawa (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Hideo Furukawa
Payot - Marque Page - Hideo Furukawa - Alors Belka, tu n'aboies plus ?
autres livres classés : épopéeVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (69) Voir plus



Quiz Voir plus

Les mangas adaptés en anime

"Attrapez-les tous", il s'agit du slogan de :

Bleach
Pokemon
One piece

10 questions
891 lecteurs ont répondu
Thèmes : manga , littérature japonaiseCréer un quiz sur ce livre

{* *}