"Le visage d'une personne saisi dans la rue devient une page de roman. le photographe est un -cantastorie- muet. (p. 51)
En parcourant le catalogue de la médiathèque j'ai découvert avec
curiosité ce texte d'Erri de Luca, accompagné de clichés noir et blanc de
François-Marie Banier...Ouvrage surprenant,insolite où
Erri de Luca rend un hommage au regard original du photographe, Banier, à Vélasquez, à la désobéissance vitale, indispensable... à la naissance précoce de son besoin absolu d'ECRIRE ...
"A la maison, je fis écouter ma dissertation. On fut surpris de mon élan plus que de mon écrit. J'avais appris ce jour-là avec certitude que l'écriture était un champ ouvert, une voie d'issue. Elle pouvait me faire courir là où il n'y a
pas un mètre pour les pieds (...) Je suis quelqu'un qui, de ce jour-là, s'est mis à écrire pour forcer les fermetures qui l'entouraient." (p. 16)
Digressions
passionnantes sur la photographie, l'écriture, la peinture [dont une littérale vénération pour Vélasquez]. Seul bémol (juste très personnel), j'ai été assez imperméable à ses observations, analyses concernant la Bible...
Touchée par les remarques irrévérencieuses de Erri de Luca, cette mise en avant de son ami photographe,
François-Marie Banier...sans oublier des clins d'oeil malicieux, ironiques et lucides sur l'art, la vie, le monde...
"Dans un marché en plein air, l'été en Finlande, j'ai vu sur un panier de pommes de terre un écriteau portant le nom de la variété :
Van Gogh. Ces pommes de terre portaient son nom. Parce qu'il peignit le plus émouvant hommage à cette nourriture héroïque et solitaire dans le tableau : "Les mangeurs de pommes de terre".
Quel honneur, son propre nom sur l'éventaire d'un maraîcher. Les noms illustres finissent d'habitude dans des listes de rues, sur la porte d'une école, sur un timbre-poste :ils finissent dans un somptueux rebut. Mais quelqu'un dont le nom retentit sur les places de marché, là où l'espèce humaine se dispute, sourit, se salue, celui-là a reçu le plus grand des prix à la mémoire.
Je rêve moi aussi d'être un jour associé à un légume, j'aimerais que quelqu'un demande un céleri "
De Luca". Aussi je souhaite à Banier la chance qu'on se souvienne de lui dans les marchés, plus que dans les musées. "(p. 81)
"Aparté ":....Méconnaissant le travail photographique de
François-Marie Banier... j'ai été surprise de la variété de ses clichés , de ses portraits qu'ils soient de célébrités ou des plus humbles... dans les rues... Dans ce volume avec
Erri de Luca,Les clichés n'offrent que des portraits des gens des rues, des humbles, des personnes différentes physiquement...des anonymes !
Erri de Luca est en admiration face à l'oeuvre multiforme de
François-Marie Banier, dans laquelle il voit "les archives d'un
Balzac "....
Intriguée aussi par ses photos mélangeant image et écrits...
Mais ce texte d'Erri de Luca m'a donné l'envie de faire connaissance avec l'oeuvre photographique de l'écrivain... et j'ai eu la très heureuse surprise de découvrir une publication de
François-Marie Banier, exclusivement consacré à
Beckett !!!