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Citations sur Le Rêve du pêcheur (36)

Il n’y a pas si longtemps, il aurait parlé en leur nom avec autorité, maintenant, il redoutait le moment où elles se mettraient à convoiter une vie qu’il ne pouvait pas leur offrir. 
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À l’endroit où le fleuve se précipite dans l’Atlantique, l’eau est ardoise et tumultueuse. Elle s’éclaircit à mesure qu’elle s’éloigne des côtes, en nuances de gris de plus en plus claires, pour finir par refléter la couleur du ciel lorsque celui-ci devient le seul horizon.

Incipit
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Nos périples à nous ne prévoient aucun retour, nous ne sommes pas des voyageurs mais des exilés. L’exil est un bannissement et une mutilation, il y a là quelque chose de profondément inhumain. Quel que soit le danger que l’on fuit et le soulagement de s’en éloigner, chacun mérite de garder quelque part en lui l’espoir d’un retour.
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J'avais tout en mémoire : elle dans mon ventre. J'étais enceinte de quatre mois et elle grattait comme une petite puce impatiente. Elle avant sa naissance, sautant dans tous les sens, martyrisant ma vessie, et puis la main de son père posée sur mon ventre. Il fallait au moins ça pour la calmer. Elle venait se frotter à sa chaleur, je pouvais presque entendre ses nombreux ronronnements de petite chatte à naître.
(p.328)
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Cette nuit-là, il ne faisait pas assez froid pour espérer mourir frigorifié dans la rue, mais il pleuvait. Pas une de nos pluies à Douala. Il faut avoir connu d'autres pluies pour aimer la violence sans nuance des orages sous nos tropiques. Ceux où les enfants s'ébrouent dans la boue collante et ouvrent grand la bouche pour gober les trombes d'eau tièdes, celles qui crépitent sur les toits de tôle. Et la terre desséchée qui se met à embaumer.
Ici, il s'agissait d'un crachin glacial qui vous pénétrait jusqu'à la moelle, obscurcissait jusqu'au souvenir du soleil et amplifiait à l'infini l'écho de vos fragilités. Comme s'il pleuvait à l'intérieur de vous.
(p.245)
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Sa relation avec Julienne était tressée de ses mots à elle. Elle nommait les émotions, les liens, les souvenirs, lui restait souvent silencieux. Il était payé pour le savoir, les discours en disent toujours moins qu'on ne le pense et bien plus qu'on ne le voudrait. Ce qui s'exprime va au-delà de l'intention et parfois la trahit.
[…] Dans cette parenthèse inespérée, à cette étape de sa vie, les mots étaient les fils d'or avec lesquels ils retissaient patiemment l'histoire commune dont jusqu'ici chacun possédait une part impossible à comprendre, énigmatique parce que fragmentaire.
(p.325)
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 Il devint mon tuteur, exactement comme ces piquets qui aident certaines plantes à pousser droit : l’homme imparfait et malgré tout fiable que je voulais être un jour, quand je serais grand. 
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La région est traversée par des centaines de petites rivières qui tracent des méandres à travers des kilomètres de forêts, creusent dans la terre des sillons d'eau claire, polissent les rochers. Dans le lit des ruisseaux flottent des jacinthes d'eau, leurs fleurs lilas bleuté et leurs racines ébouriffées. Des torrents, des cascades... Sur le sillage de l'eau vive se mouvant vers l'océan la forêt est drue, le sol fertile, la vie luxuriante, presque envahissante. Puis il y a le fleuve, le Ntem majestueux et sa sylve de mangrove. Lorsqu'on s'en approche, la forêt se fait marécageuse, sous-bois serré de palétuviers aux racines aquatiques profondément enfoncées dans l'eau. Et enfin l'embouchure, rencontre et fracas. D'un côté, le fleuve assombri en son fond par un tapis de racines et de feuilles, de l'autre déjà l'Atlantique, son sable, son sel, la puissance de ses courants. Car le fleuve ne glisse pas sereinement dans l'océan, il s'y jette et s'y brise, il s'y engouffre puissamment. À quelques mètres seulement à gauche, ces eaux sont encore douces, accueillantes, et un peu plus loin à droite, l'océan s'apaise. Tous les jeunes pêcheurs apprennent dès leurs premiers coups de rame à contourner le Vidodo, l'embouchure, même les enfants pour qui la plage, l'océan, le fleuve sont incessants et inépuisables terrains de jeu savent que le Vidodo est l'arbre interdit planté au cœur de leur paradis.
(p.18-19)
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Que savaient-ils de l’indigence ? De nos vies bradées, nos rêves avortés, la pauvreté de nos horizons ? De la proximité et de la violation de toute intimité qu’elle suppose ? De l’ignorance crasse qui contraint à nager à contre-courant de soi-même pour espérer rattraper un peu de l’humanité dont d’aucuns ont hérité à la naissance ? Que savaient-ils de l’exil ? Je n’étais jamais aussi conscient de mes limites que lorsque j’étais face à eux. Je n’avais aucun souvenir de la première fois où j’avais dû faire face au racisme, et même si cela m’était arrivé, à cette époque je n’en concevais pas d’amertume inconsolable. 
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 Ma fille m’a redonné la vie, en me libérant de la solitude, elle m’a accouchée. 
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