Songez quelques instants à votre propre existence et rembobinez-la mentalement. Imaginez ce qui se serait produit pour vous, ou les membres de votre famille si... ou si... ou si pas... et ainsi de suite jusqu'à vos plus jeunes années.
N'est-ce pas vertigineux ?
Hop ! Mieux vaut rembobiner de nouveau dans l'autre sens et accepter notre présent, puis en savourer chaque seconde... ou chaque journée, ce sera déjà bien assez.
Jurons de ne jamais nous perdre de vue, même si la distance et la vie nous séparent.
- Je le jure ! lance Ramon en crachant.
- Je le jure ! répond DeMarcus.
Ah ! Les belles paroles de l'enfance... De celles auxquelles on croit dur comme fer. Des serments que l'on fait pour la vie et qu'on oublie, année après année, parce que la vie nous rattrape, parce que le monde tourne, parce que le destin pousse devant nous d'autres personnes, d'autres choix, d'autres épreuves.
Faire le tour de soi-même est parfois plus long que de faire un tour du monde en solitaire.
Le hasard. Qu'est-ce que le hasard ? Est-ce pareil au destin ? Maîtrise-t-on l'un et l'autre ? Ou les subissons-nous ?
La vie n'est-elle pas qu'une accumulation de hasards ? De coups du sort ? Quelle drôle d'expression "coups du sort", non ? Déjà, c'est un coup et un coup, ça fait mal, non ? Et le sort : n'est-ce pas de la même famille que le sortilège ? Dieu ne serait-il pas finalement qu'un grand sorcier facétieux ?
Qu'est-ce qu'une seconde dans une vie ? Une poussière infinitésimale, rien du tout, presque le néant... Et pourtant ! Combien de destins ont basculé pour une malheureuse seconde en trop... ou manquante... L'espace d'une, de dix, de vingt, de trente secondes, que de choix à faire, conscients ou inconscients, décidés ou subis...
Une rencontre, un mot, un geste, un feu tricolore, une glissage, un contact, un regard vers les nuages, un coup de fil inattendu... tout, la moindre petite seconde de notre vie peut être décisive... et donc fatale ou salvatrice !
Que l'on fasse ceci, ou que l'on ne fasse pas cela...
Que l'on croise untel ou évite unetelle...
Qu'on se lève du pied gauche ou du pied droit.
Et ceci vaut pour chacun d'entre nous, pour chaque individu sur cette terre. Chaque vie est ainsi interdépendante de celle des autres, dans des proportions plus ou moins grandes, qu'il s'agisse d'un proche, ou d'un inconnu. Cet inconnu qui, une seconde plus tard, peut vous devenir proche ! Parce que vous aurez croisé sa route... Ou bien vous serez passé au meme endroit, trente secondes plus tôt ou plus tard... et il restera un inconnu...
C'est sans compter sur les impondérables : tous ces petits événements, tous ces petits riens qui, mis bout à bout, forment une journée. Ces petits moments où chaque seconde peut devenir un choix. Selon qu'on part à gauche, ou à droite. Qu'on entre, ou pas, dans tel endroit. Qu'on croise, ou non, telle ou telle personne. Qu'on dise, ou qu'on taise, telle ou telle chose.
En somme, la vie de chacun n'est que l'accumulation de petits riens dans la grande mêlée générale de la fourmilière humaine.
Puis franchir le seuil de la porte de ton home et découvrir ta femme avec les yeux rougis d’avoir trop attendu, les paupières lourdes d’avoir assumé toute seule les soins de son fils, le petit qui ne comprend pas encore pourquoi son père rentre toujours si tard, il a bien le temps pour ça, le pauvre enfant ; bien le temps de comprendre la lâcheté des adultes, l’irresponsabilité des uns, la démission des autres…
Tu m'en fait goûter une? demanda t elle en désignant la crevette qu'il terminait de décortiquer.
Sacha lui glissa le petit crustacé dépouillé entre les lèvres. La laissant dépasser de moitié entre ses dents, elle approcha lentement sa bouche de celle du jeune homme pour la partager. Il croqua dedans à son tour et, tels la Belle et le Clochard avec leur spaghetti. Ils la grignotèrent délicatement jusqu'à finir sur un baiser profond et salé.
Détends-toi, ma fille. Tu vois le mal partout chaque fois que ton boulot te monte au cerveau. À traquer en permanence crimes et délits, à envisager souvent le plus noir de l’âme humaine, tu en viens à ne plus faire la part des choses entre le bien et le mal. Comme si ton curseur mental s’affolait, ne sachant où se positionner.
Mais que vaut le sourire d’une photo ? Un tic forcé ? Le besoin de paraître bien dans sa peau, bien dans l’instant ? Une fois la photo fixée, le sourire s’efface, les souvenirs refont surface, le spleen revient…