Ils passèrent leur chemin. Norma était en tête à présent. Elle se retourna une ou deux fois. Et de nouveau, cette lumière qui semblait émaner non pas du soleil, mais de l'homme qui était ou n'était pas son confident.
Et ici,avec ces flocons blancs qui filent au vent,s’arrête le récit de Fanny.Elle ramène ses cheveux en arriere. Elle regarde Karen.Elle montre quelque chose,mais maintenant ,nous ne savons plus ce que c'est.Juste la neige .Il n'y a pas de culpabilité . Pas
d'innocence.Il en est ainsi des animaux de la foret,ainsi des hommes et des femmes.Etre un humain ,cela signifie qu'on ne peut pas choisir.Qu'on doit tout aimer.Nous sommes condamnés à tout aimer,pour ne rien oublier ou ignorer.
D'où sa colère lui venait,Fanny n'en avait pas la moindre idée,mais c’était une émotion souvent présente;elle maudissait alors ses parents,leur absence,comme s'ils l'avaient quittée pour des raisons égoïstes,comme s'ils lui avaient laissé des miettes qu'elle devait trouver en rampant gaiement sur le sol.Tous ces souvenirs plus ou moins diffus ,rarement bienvenus,qui s'agitaient sous son nez: qu’était-elle censée en faire?
Singulièrement,en le basculant sur le coté,elle eut l'impression de s’élever et non de sombrer.Elle songea que ce qui pouvait la sauver n'imposait pas d'exigences,mais ne renfermait sans doute pas de délivrance non plus.Ce qui pouvait la sauver était ce qui l'avait crée.Ainsi était sa foi.Telle était sa nature.Mais cette foi n’était que volonté ,volonté et obstination.
Fanny ôta les draps et les fourra dans le lave-linge de la salle de bains.Elle voulait s’approprier la chambre .Dormir là où ses parents avaient dormi,respirer là où ils avaient respiré et rêver là où ils avaient rêvé,comme s'il était possible de mélanger toutes ces représentations distinctes:celles de la mère,celles du père,les siennes.
Elle souffrait rien qu'à la pensée de la pénible posture dans laquelle elle s'était elle-même placée.