WorldShaker, by Richard Harland
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- Bien, dit M. Gibbon en faisant craquer ses doigts. Notre prochain sujet d’études sera… sera… (il attendit d’avoir leur attention)… sera la géographie. Qu’est-ce que la géographie, Clatterick ?
- Aucune idée, monsieur.
- Parce que vous êtes un sot et un niais. Mais moi, je sais. Votre humble professeur, M. Bartrim Gibbon, sait.
C’était le vendredi après-midi, et Fefferley et Haugh avaient déjà sorti leurs oreillers. M. Gibbon déroula deux cartes, une du monde et une du Vieux Pays, qu’il épingla au tableau.
La géographie de M. Gibbons était aussi morale que tous ses autres cours. Il divisait le monde en bonnes et en mauvaises côtes. Les bonnes côtes, comme celles de la Floride et du cap York, étaient fermes et fières et pointaient dans l’océan. Les mauvaises côtes, tels le golfe du Mexique et la grande baie australienne, se repliaient vers l’intérieur comme des mauviettes. De manière générale, les côtes européennes étaient les meilleures de toutes, et celles du Vieux Pays absolument parfaites.
- Voyez le pays de Galles qui s’avance dans la mer, dit-il en pointant la carte avec l’une de ses cannes. Et les Cornouailles, ici. Le Kent. L’East Anglia. Toutes des côtes convexes. Des côtes pleines de caractère.
Col inspira profondément et bomba le torse. Les traits de la reine Victoria étaient exactement tels que sur ses portraits : elle était noble et majestueuse comme un pur-sang de course. La seule différence était son froncement de sourcils, qui exprimait moins la sévérité qu’une migraine imminente. Sir Mormus fut le premier à s’incliner devant la reine, puis devant le prince consort. Col fit de même.
- Et bien, eh bien, eh bien, dit la reine Victoria.
Sir Mormus s’éclaircit la gorge.
- Puis-je vous présenter mon petit-fils, Colbert Porpentine ?
- Votre petit-fils (elle les examina attentivement l’un comme l’autre.) Vous devez donc être son grand-père…
- Il entre au lycée demain, poursuivit Sir Mormus.
- Ah. Le lycée. L’éducation. L’apprentissage.
La reine semblait avoir du mal à se concentrer sous le poids de sa couronne.
- Posez donc une question à ce garçon Albert.
- Quel genre de question, ma chère ?
- Ah… quelque chose fois quelque chose.
- Sept, dit le prince Albert. Sept fois…euh sept.
- Quarante-neuf, répondit immédiatement Col.
- Excellent effort, le félicita la reine Victoria.
- Remarquable, remarquable, approuva le prince Albert.
- Et juste Madame, Monseigneur, ajouta Sir Mormus.
- C’est encore mieux. (La reine Victoria se tourna vers son époux.) Posez-lui encore une question, mon ami.
- Voyons voir…(Le prince Albert mâchonna sa moustache pendant une demi-minute.) Je crois bien que je n’en ai plus.
Ses cheveux étaient plaqués contre son crâne et ses vêtements lui collaient au corps. Dans les ténèbres, il n'était qu'une ombre ; quand les éclairs s'allumaient, il paraissait plus grand et plus imposant que jamais.
- Tu es doué pour te battre. J'aimerais être comme toi.
- Tu es doué avec les livres.
- Oui, et bon à rien dans la vraie vie. Je peux réfléchir à ce que j'aurais dû faire, mais jamais sur le moment.
Quand elle repensait à ces trois mois, ils n'avaient pas franchement été agréables. Le chagrin mêlé à la joie, la terreur à l'euphorie, les épreuves aux bons moments... Non, pas agréables... par contre, ô combien excitants ! Le frisson de son évasion de Swale House... l'adrénaline, lorsqu'ils avaient joué devant un public hostile... la confrontation terrifiante avec Scarrow et son pistolet... Oui, elle aimait l'intensité qu'il y avait à vivre sur le fil du rasoir. Sa nouvelle vie valait mieux que ses anciennes rêveries.
- Je t'ai déjà dit qu'il n'était qu'une rêverie, pour moi.
- Une rêverie qui te brise le cœur.
Mave eut un haussement d'épaules.
- Ça m'est égal. je n'ai jamais pensé que l'amour me rendrait heureuse. [...]
- Je ne pige pas.
- Non, personne ne peut comprendre. Comment te dire... J'ai besoin de ma tristesse. Je m'en sers, je la transforme. C'est le matériau dont je construis mes chansons.
- Mais... tu ne préférerais pas le bonheur ?
- Non, je préfère être créative.