Citations de Joseph O`Connor (351)
Pleurer ? Oui, elle peut pleurer. Pas besoin d'un corps pour ça. Les larmes sont la partie visible du chagrin, au-dessus de la surface, ce n'est pas là qu'a lieu le naufrage.
Pour moi, Rome est une palette de peintre, un clair-obscur de roses lustrés, de cuivre vieilli, de brou de noix, de miel, d'ivoire, de moka. C'est aussi une musique, un sonate pour piano. Je ne peux écouter Clementi sans voir ma cité d'adoption bien-aimée et être transpercé par la lance du désir.
- Voilà pourquoi l’Angleterre veut m’étrangler, Miss Terry. En Irlande, avoir du charme passe pour un accomplissement personnel. Ici, c’est une honte pour la famille, comme d’avoir un cousin idiot.
- Taratata, Oscar, mon vieux, a repris Irving, tu es un peu dur avec nous. Nous avons bien exporté notre langue chez vous, les primitifs, après tout.
- En effet, mon chéri. À présent, nous savons dire « famine » en anglais.
Les fenêtres sont ouvertes sur la nuit, les oiseaux parlent grec.
L'écriture est d'une élégante calligraphie, gracieuse comme le cou d'un cygne.
Le train grommelle en grimpant Stubblefield Hill, il tressaute et oscille avec mollesse lorsqu'il se lance dans la descente et file de l'avant, vitesse déconcertante dans le virage du bas, et puis de temps en temps, une lourdeur soudaine, une sorte de drame inquiétant quand la voiture fait un bon tremblant ou pousse un crissement métallique.
Mes pensées gazouillaient et grondaient. Je n'aime pas l'aube. Si les poupées se lèvent, c'est bien à cette heure. (p134)
On a toujours le choix. On est même la somme de ses choix.
Jamais assez de temps pour aller jusqu’au bout d’une histoire. Jamais assez d’argent pour prendre le temps d’y réfléchir. L’argent est tout. Il ne le savait pas auparavant. Ce dont un écrivain a besoin, c’est de temps, d’avoir la permission d’échouer s’il le faut, de s’abstraire des tourments que vous inflige la nécessité de payer un loyer. L’argent est une fiction, mais elle est tout de même nécessaire. C’est la seule fiction qui existe.
Mais il n'y avait pas d'argent propre dans un monde sale.
Il faisait partie de ces gens qui attirent la plus grande attention en s'efforçant pourtant de passer inaperçus.
Ma sainte épouse, l'infortunée, a quitté Londres pour s'installer ici, également, dans une petite pension en bord de mer, et elle vient chaque jour en autobus me faire la lecture, si bien que nous continuons de nous délecter de nos chamailleries ainsi que seuls les gens mariés savent le faire. Nous aimons à nous quereller pour de petits riens, comme des sandwichs, ou la démocratie. (p. 15)
Je préférerais écouter n'importe quel fou délirer dans la rue plutôt qu'un acteur qui fait son numéro. Au moins, le fou ne s'attend pas qu'on l'applaudisse.
On se construit sa forteresse du mieux que l'on peut, avec des murs si épais qu'aucun canon ne puisse les transpercer, pourtant la plus minuscule des meurtrières peut laisser passer une balle. Et où se trouve-t-elle, celle qui nous préservera de la piqûre de l'envie?
Ce qu’ils appellent la vie est un vaisseau fantôme. Ce vaisseau compte bien des cabines. Des petites. Des grandes. Certaines sont destinées aux princes. D’autres aux pauvres. Elles sont innombrables. Il y en a toujours une autre. Voilà comment ils échappent à la prison du moi. Pour voir le monde à travers le hublot de la cabine d’un autre.
– Ah, c’est pour ça qu’existent les histoires, Nolly. Pour savoir ce que ça fait d’être une autre personne.
– Pourquoi voudrait-on cela ?
– Parce que parfois c’est éreintant d’être soi.
Le neuvième cercle de l’enfer de Dante, la fosse la plus profonde, est réservée aux pécheurs les plus infâmes, traîtres à ceux qui les ont bien traités, qui dans le donjon d’Hadès le plus sale, le plus brûlant, souffre l’éternelle dégradation des ingrats. S’il existait un dixième cercle, il serait réservé aux seules créatures encore plus méprisables et impardonnables : les auteurs qui font la promotion de leurs propres ouvrages.
Comme je n'arrive toujours pas à dormir, je lis un livre que j'ai emprunté à la bibliothèque de Whitby il y a quelques années et que j'ai oublié de rendre. Je l'ai rapporté, cette fois, car voler des livres, c'est mal, et ça porte malheur.
- Une réputation est souvent une œuvre de fiction, ainsi que je l'ai découvert.
- La réputation, pfff. J'en ai eu plusieurs, Mr Stoker, parfois même en l'espace d'une soirée.
Croire que le mal est l'apanage des monstres, et non des hommes, console la jeunesse.