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Citations de Jean-Paul Didierlaurent (648)


Les gens n'attendent en général qu'une seule chose de vous: que vous leur renvoyiez l'image de ce qu'ils veulent que vous soyez. Et cette image que je leur proposais, ils n'en voulaient surtout pas. C'était une vue du monde d'en haut, une vue qui n'avait rien à faire ici. Alors s'il y a une leçon que j'ai bien apprise en près de vingt-huit ans de présence sur cette Terre, c'est que l'habit doit faire le moine et peu importe ce que cache la soutane.
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Yvon pouvait rester de longues minutes sans dire un mot, tout entier accaparé par ses lectures. Ses silences étaient pleins. Guylain pouvait s'y glisser comme dans un bain tiède.

P39
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14 717. Je rêve toujours d'un nombre plus chaleureux, plus rondouillard, plus agréable à l'œil. Un nombre avec en son sein quelques zéros bien ventru, voire des huit, des six ou des neufs pansus à souhait. Un beau trois, généreux comme une poitrine de nourrice, suffirait amplement à mon bonheur. 14 717, c'est tout en os, un nombre pareil. Ça vous exposé sa maigreur sans détour, vous agresse la rétine de l'aigu de ses angles. Quoi que vous fassiez, une fois posé sur le papier, ça reste toujours une suite de droites facturées.

P109
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"N'oublie jamais ça, petit : on est à l'édition ce que le trou du cul est à la digestion, rien d'autre !"
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"C'est dans les cicatrices des gueules cassées que l'on peut lire les guerres, Julie, pas dans les photos des généraux engoncés dans leurs uniformes amidonnés et tout repassées de frais [...]."
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Alors s'il y a une leçon que j'ai bien apprise en près de vingt-huit ans de présence sur cette Terre, c'est que l'habit doit faire le moine et peu importe ce que cache la soutane.
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Comment avaient-ils pu transformer une passion torride en cette relation normalisée qui les liait aujourd'hui, un foyer dans lequel ne brasillaient plus que quelques escarbilles à condition d'y remuer les cendres ?
p110
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Jean-Paul Didierlaurent
Tandis que le jour naissant venait s'écraser sur les vitres embuées, le texte s'écoulait de sa bouche en un long filet de syllabes, entrecoupé ça et là de silences dans lesquels s'engouffrait le bruit du train en marche. Pour tous les voyageurs présents dans la rame, il était le liseur, ce type étrange qui, tous les jours de la semaine, parcourait à haute et intelligible voix les quelques pages tirés de sa serviette.

(" Le liseur de 6h 27") Une pensée aussi pour lui, parti si vite...
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Son aquarium de substitution avait dû lui paraître un peu trop exigu pour pouvoir s'y dégourdir les nageoires dignement et l'animal avait préféré faire le grand saut dans l'inconnu, histoire d'aller voir ailleurs si le monde n'était pas meilleur. Son dernier rêve de liberté se sera brisé sur l'inox froid de mon évier, pense Guylain avec tristesse.
(p. 145 de l'édition folio)
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Se fondre dans le paysage jusqu'à se renier soi-même pour rester un ailleurs jamais visité.
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Se fondre dans le paysage jusqu'à se renier soi-même pour rester un ailleurs jamais visité.
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Tapotant de ses doigts nerveux sur la vitre, le type reprit plus méprisant que jamais : " Il va se décider quand, à la bouger sa barrière ? "
Un nouveau, pensa Guylain. Seul un nouveau pouvait se permettre une telle liberté de ton avec Yvon Grimbert ! Après avoir glissé un marque-page dans son édition du Cid de 1953, Yvon indiqua à Guylain le coffret entreposé sur l'étagère qui courait le long de la guérite. Il y avait là, précieusement conservées, des années de versification de son invention. La caisse sur ses genoux, le gardien passa en revue le répertoire à sa disposition devant le regard courroucé du chauffeur. La moustache frémissante de contentement, Yvon se saisit de la fiche n°24 intitulée " Retards et châtiments". Tout en réajustant sa cravate d'une main experte, il jeta un bref coup d'œil au texte, le temps de s'imprégner du rôle. Il lissa du plat de la main sa chevelure argentée, s'éclaircit la voix d'un ultime raclement de gorge. Alors, Yvon Grimbert, ancien élève du cours Alphonse Daubin de Saint-Michel-sur-l'Ognon, promotion de 1970, abonné au Français depuis 1976, tira une première salve :

" Il est passé midi, voyez la grande horloge.
Déjà sur la demie, la grande aiguille se loge !
Quittez cette arrogance, rengainez ce dédain,
Il reste une petite chance que je vous ouvre enfin. "

L'hébétude qui se dessinait sur le visage du chauffeur avait balayé toute sorte de colère. Son menton persillé d'une barbe naissante s'affaissa au fur et à mesure qu'Yvon scandait le quatrain de sa voix puissante. Guylain sourit. C'était bien un nouveau. Ca leur faisait souvent ça la première fois. L'alexandrin les prenait de court. Les rimes leur tombaient dessus, les asphyxiant aussi sûrement qu'une volée de coups portée en plein plexus. " C'est droit comme une épée, un alexandrin, lui avait un jour expliqué Yvon, c'est né pour toucher au but, à condition de bien le servir. Ne pas le délivrer comme de la vulgaire prose. Ca se débite debout. Allonger la colonne d'air pour donner souffle au mot. Il faut l'égrener de ses syllabes avec passion et flamboyance, le déclamer comme on fait l'amour, à grands coups d'hémistiches, au rythme de la césure. Ca vous pose son comédien, l'alexandrin. Et pas de place à l'improvisation. On ne peut pas tricher avec un vers de douze pieds, petit. " A 59 ans, Yvon était passé maître dans l'art de les décocher. Déployant son mètre quatre-vingt-cinq, le gardien était sorti de sa guérite :

" Nombreux sont les livreurs qui affrontent mon courroux.
Arrivez donc à l'heure et vous me verrez doux.
Livrez ce chargement, quittez cet air hagard,
Effacez le tourment qu'à causé ce retard.

Tachez à l'avenir de respecter l'horaire,
Ne laissez pas tarir ma patience légendaire.
Quelle que soit l'heure passée, il n'est plus grand outrage
Que de réceptionner un nouvel arrivage.
[...]

L'inquiétude avait pris possession du camionneur. Il n'avait plus soudain devant les yeux Yvon Grimbert, insignifiant gardien d'usine, mais le grand prêtre tout-puissant du temple.
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A droite de la route, le Pacifique déchaîné léchait le gris du ciel de la crête de ses vagues. Les paquets de mer s'affalaient sur la plage dans des explosions d'écume.
p205
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Si un sourire ne coûte souvent rien, il peut en revanche rapporter beaucoup.
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Il a fallu me rendre rapidement à l'évidence que les gens n'attendent en général qu'une seule chose de vous: que vous leur renvoyiez l'image de ce qu'ils veulent que vous soyez.
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Chaque bouquiniste avait aussitôt mis en alerte son propre réseau pour débusquer le Graal. Il ne se passait pas de week-end sans que Guylain ne se rendit sur les quais pour jouer les coursiers et ramener à Giuseppe les fruits de la récolte. Il avait aimé ces moments de flânerie, à contempler les bateaux-mouches chargés de touristes glisser paresseusement sur les eaux argentées de la Seine. C'était bon de constater qu'il existait un autre monde que celui de la STERN, un monde où les livres avaient le droit de finir leur vie douilletement
rangés dans les casiers verts le long des parapets en vieillissant au rythme du grand fleuve sous la protection des tours de Notre-Dame . (p.70-71)
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Avoir pour confident un poisson rouge impliquait de ne rien attendre d'autre de lui que cette écoute passive et silencieuse, même s'il croyait parfois déceler dans le filet de bulles qui sortait de sa gueule un début de réponse à son questionnement.
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Jean-Paul Didierlaurent
C’est le privilège de l’auteur de pouvoir se permettre toutes les fantaisies, même les plus folles.
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Manger au restaurant était devenu un calvaire. Il choisissait les tables isolées, prenait le menu du jour parfois sans même le lire et avalait son plat du bout de la fourchette en parcourant le journal local avec l'idée d'en repartir au plus vite. La semaine précédente, le type venu s'asseoir à sa table, sans doute un confrère, avait tenté d'engager la conversation avec lui. " Vous faites dans quoi ?" " Dans les WC quand il y en a, sinon dans la nature comme tout le monde ! " avait-il répondu sans même lever la tête de son assiette.
p41
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A l'abri dans le vaste hall, les moins vaillants finissaient de s'avachir sur eux-mêmes, indifférents à l'agitation ambiante. Des êtres en partance plongés dans l'attente d'un départ qui se refusait à eux.
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