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Citations de Daniel Adam Mendelsohn (214)


Par un soir de janvier, il y a quelques années, juste avant le début du semestre de printemps au cours duquel je devais enseigner un séminaire de licence 1 sur l’Odyssée, mon père, chercheur scientifique à la retraite alors âgé de quatre-vingt-un ans, m’a demandé, pour des raisons que je pensais comprendre à l’époque, s’il pourrait assister à mon cours, et j’ai dit oui. Ainsi, pendant les seize semaines qui suivirent, il fit une fois par semaine le long trajet entre le pavillon de la banlieue de Long Island dans lequel j’ai grandi, une modeste maison à un étage où il vivait encore avec ma mère, et le campus en bordure de fleuve de la petite université où j’enseigne, qui s’appelle Bard College. Chaque vendredi matin à dix heures et demie, il prenait place parmi les étudiants de première année, des gamins de dix-sept ou dix-huit ans qui n’avaient pas le quart de son âge, et participait aux discussions sur ce vieux poème, une épopée où il est question de longs voyages et de longs mariages et de ce que peut signifier le mal du pays.
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La rancoeur que m'inspiraient la dureté de mon père, son obstination à penser que la qualité ne pouvait naître que de la difficulté, que le plaisir était suspect et que l'effort était une valeur, m'apparaît aujourd'hui ironique, car, à mon sens, ce sont précisément ces qualités qui m'ont donné envie d'étudier les auteurs anciens.
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Quiconque a beaucoup voyagé sait que même si vous croyez savoir ce que vous cherchez et où vous allez quand vous décidez de partir, ce que vous apprenez en route est souvent tout à fait surprenant
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L’obstination de Littell à développer à partir de son thème orestien le fantastique, le sexuel extrême résulte manifestement d'un choix délibéré; il a d'ailleurs lui-même scrupuleusement semé des indices sur le sens (et la justification) de ce choix - choix qui, au demeurant, n'a pas grand-chose à voir avec la Shoah proprement dit, ni même avec la fictionnalisation de l'histoire, mais relève entièrement d'un phénomène très français et très littéraire.
Exactement à la moitié des Bienveillantes, Aue se retrouve à Paris - nous sommes alors en 1943, et il s'agit du voyage au terme duquel il ira dans le Midi pour assassiner sa mère - et, en se promenant sur les quais, il fouille dans les caisses des bouquinistes et tombe sur un recueil d'essais de Maurice Blanchot (auteur que Littell a étudié sérieusement et qui, par une opportune coïncidence, vient d'être traduit en anglais par Charlotte Mandell, la traductrice des Bienveillantes). Comme il se doit, Aue est fasciné par un essai dont il nous dit vaguement qu'il traite d'une pièce de Sartre sur le thème d'Oreste: il s'agit à n'en pas douter du recueil de 1943 de Blanchot, "Faux pas" qui, dans une partie intitulée « De l'angoisse au langage », contient l'essai « Le mythe d'Oreste ». La pièce de Sartre dont il est question est Les Mouches, créée en 1943. Aue ne dit pas grand-chose de cet essai, se bornant à paraphraser sa thèse, selon laquelle Sartre "se servait de la figure du malheureux parricide pour exposer ses idées sur la liberté de l'homme dans le crime; Blanchot le jugeait sévèrement et je ne pouvais qu'approuver";
La pièce de Sartre, on le sait, est essentiellement une parabole sur l'Occupation et les dilemmes moraux qui se posaient à la France; dans ce texte, Oreste rentre à Argos et retrouve une ville corrompue, et même un cosmos corrompu; il apprend de la bouche de Zeus en personne que les dieux eux-mêmes sont injustes, révélation qui vide de tout leur sens ses aspirations – et celles de n'importe qui - à une vie débarrassée d'angoisse morale, une vie dans laquelle chacun pourrait être un individu comme n'importe quel autre, un « frère humain ». Comme dans l' Orestie, Oreste doit tuer sa mère, mais ici, l'acte revêt une signification résolument ancrée dans le xxe siècle à laquelle Eschyle n'aurait jamais songé, comme le souligne l'interprétation que Blanchot donne du matricide :
« Le sens de son double meurtre, c'est qu'il ne peut être vraiment libre que par l'épreuve d'une action dont il accepte et supporte tout ce qu'elle a d'insupportable dans ses conséquences. [...] Le héros revendique toute la responsabilité de ce qu'il a fait; à lui l'acte appartient absolument, il est cet acte qui est aussi son existence et sa liberté. Pourtant, cette liberté n'est pas encore complète. On n'est pas libre si on est seul à l'être, car le fait de la liberté est lié à la révélation de l'existence dans le monde. Oreste ne doit donc pas seulement détruire pour lui-même la loi du remords, il doit l'abolir pour les autres et établir par la seule manifestation de sa liberté un ordre d'où aient disparu les représailles intérieures et les légions de la justice peureuse. »

Nous voyons donc ici l'ambitieux objectif intellectuel qu'est censé servir le thème d'Oreste, tel qu'il est transmis par le texte de Blanchot auquel se réfère si ouvertement le roman de Littel!. Au tout début des Bienveillantes, Aue se fait fort de refuser le cadre rassurant qu'offrent les repères moraux traditionnels :
« Ce n'est pas de culpabilité, de remords qu'il s'agit ici. Cela aussi existe, sans doute, je ne veux pas le nier, mais je pense que les choses sont autrement complexes. »

Et effectivement, dans ses entretiens à la presse comme dans le texte de son roman, Littell s'est appesanti sur les différences entre la morale judéo-chrétienne (et l'importance qu'elle accorde à l'intention et à l'état d'esprit, au péché et à la possibilité de rédemption) et la morale plus austère, moins sentimentale et plus « franche» qu'il trouve dans la tragédie grecque. (" L’attitude grecque est beaucoup plus carrée. Je le dis dans le livre : quand OEdipe tue Laïos il ne sait pas que c'est son père, mais les dieux s'en foutent : tu as tué ton père. Il baise Jocaste, il ne sait pas que c'est sa mère, ça ne change rien: tu es coupable, basta. ")
Mais Littell ne cherche absolument pas à inférer que Aue se situe « au-delà de la moralité », bien au contraire: il veut brosser le portrait d'un personnage qui, tout comme ses actes l'ont placé au-delà des limites de la loi morale, se place également lui-même au-delà des concepts classiques réconfortants de moralité et de justice comme l'Oreste de Sartre, dans l'interprétation de Blanchot :
« Il serait enfantin de croire qu'avec son effroyable meurtre celui-ci s'est débarrassé de tout, que, libre de remords et continuant à vouloir ce qu'il a fait même après l'avoir fait, il est quitte de son acte et étranger à ses conséquences. C'est au contraire maintenant qu'il va sonder le surprenant abîme de l'horreur, de la peur nue, libre, pure des superstitions complaisantes. [... ] "Il est libre, la réconciliation avec l’oubli et le repos ne lui est plus permise, il ne peut dorénavant qu’être associé au désespoir ou à l’ennui."
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Au début, ces juxtapositions nous horrifient, et l'on peut s'exaspérer de ce qui ressemble à une recherche obstinée d'effets choquants; mais peu à peu, on commence à s'y faire: par leur longueur interminable et leur banalité, ces discours « quotidiens »(beaucoup trop nombreux, au demeurant, au point que certains lecteurs les sauteront) finissent au bout d'un moment par nous engourdir. Or c'est bien entendu exactement le but de la manoeuvre : Littell a écrit un roman de la Shoah qui rend le mal aussi banal que l'on nous a dit qu'il l'était - c'est-à-dire non pas « banal» au sens d'ennuyeux ou ordinaire, mais plutôt « banalisé» : il devient quotidien, participe de la vie de tous les jours, se pare des atours de la normalité.
Des dizaines de pages de juxtapositions de ce type, où s'entrechoquent la politique meurtrière et les patates au four,préparent Max (et le lecteur) à l'imperceptible dégringolade sur une pente morale qui, sous la plume de Littell, prend un éloquent tour littéral. Dans l'une des scènes que les critiques ont lue comme un exemple de la « pornographie de la violence», Max se retrouve très littéralement à glisser sur les cadavres jonchant les ravins escarpés de Babi Var :
« La paroi du ravin, là où je me tenais, était trop abrupte pour que je puisse descendre, je dus refaire le tour et entrer par le fond. Autour des corps, la terre sablonneuse s'imprégnait d'un sang noirâtre, le ruisseau aussi était noir de sang. Une odeur épouvantable d'excréments dominait celle du sang, beaucoup de gens déféquaient au moment de mourir; heureusement, le vent soufflait fortement et chassait un peu ces effluves. [... ] Pour atteindre certains blessés, il fallait marcher sur les corps, cela glissait affreusement, les chairs blanches et molles roulaient sous mes bottes, les os se brisaient traîtreusement et me faisaient trébucher, je m'enfonçais jusqu'aux chevilles dans la boue et le sang. C'était horrible et cela m'emplissait d'un sentiment grinçant de dégoût, comme ce soir en Espagne, dans la latrine avec les cafards. »

Ici encore, la composante morale si choquante vient presque moins des détails sur le théâtre du massacre que de cette juxtaposition paroxystique et déboussolante de l'extrême et du normal- l'insoutenable spectacle de la boucherie, et un simple souvenir déplaisant de vacances en Espagne.
Vers le milieu du roman, il ne reste plus rien de l'angoisse méditative qui accompagnait les premiers exploits de Aue – une angoisse toujours apaisée, au bout du compte, par l'allégeance fanatique de Max à l'idéologie nazie et aux objectifs de la guerre, même après sa brillante évocation de la catastrophe de Stalingrad, l'un des morceaux de bravoure du roman.

« En Ukraine ou au Caucase, des questions de cet ordre me concernaient encore, je m'affligeais des difficultés et en discutais avec sérieux, avec le sentiment qu'il s'agissait là de problèmes vitaux. [...] Le sentiment qui me dominait à présent était une vaste indifférence non pas morne, mais légère et précise. Mon travail seul m engageait. »

Le travail en question, soulignons-le, se rapporte à ses fonctions au sein du service « économique », auquel il a été affecté après avoir été remarqué par Himmler: au moment où la guerre commence à tourner contre les Allemands, le service « économique» est chargé d'optimiser la productivité de la main- d’'oeuvre forcée, mission qui, parce que Max est maintenant obligé de considérer les prisonniers comme des travailleurs à nourrir, habiller et loger correctement, finit par le placer dans .l'étrange position de devoir veiller sur la vie des Juifs qu'il avait jusque là docilement tués. Ici encore, l'attention méticuleuse de Littell aux détails convaincants, les manoeuvres mesquines pour gagner une promotion, les plaintes exaspérées sur l'efficacité et le gaspillage - la façon dont, enfin, l'usage des mots « mon travail » dans la phrase « mon travail seul m'engageait », trahit des énormités morales - nous rend l'effondrement de Max insupportablement palpable.
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Transgression

Comme Oreste, héros des Euménides, la tragédie grecque à laquelle son titre fait allusion- et qui selon son auteur donna d'emblée à son roman sa " structure sous-jacente"- Les Bienveillantes- a été tout aussi accablé de louanges que couvert d'opprobre. Dès sa sortie en France, en 2006, il a été couronné des plus prestigieux lauriers de la critique: salué par des recensions enflammées, il a également reçu le prix Goncourt et le Grand Prix du roman de l'Académie française. Il a de surcroit connu un étonnant succès commercial..
Cette salve de hourras et d'euros , pour un thème, disons-le, plutôt sensationnel- le livre ,qui pèse son petit millier de pages, se présente sous la forme des mémoires d'un officier SS qui, outre ses activités de guerre qu'il relate par le menu, est également un matricide homosexuel qui entretient une relation incestueuse avec sa soeur jumelle -, a joué un rôle non négligeable pour conférer au roman l'éclat du triomphe et de l'excès qui accompagne son arrivée sur les rives étrangères.
Les attaques ont aussi été légion- et sont parties de France même. Claude Lanzmann, auteur du documentaire épique Shoah dont Littell dit s'être inspiré pour son livre, ne fut pas le seul à dénoncer ce qu'il appelait le " décor de mort" .

On ne s'étonnera donc pas qu'un livre prétendant offrir un récit convaincant de ce que pourrait être une personne apparemment civilisée qui finit par commettre des actes d'une inimaginable barbarie ait, dans l'ensemble, été accueilli avec enthousiasme et, dans une moindre mesure, vigoureusement rejeté dans un pays qui entretient un rapport historique si tourmenté aux questions de collaboration et de résistance. Pour la même raison, peut-être, on ne s'étonnera pas non plus d'apprendre que les critiques les
plus virulentes, fustigeant le « kitsch», la « pornographie et la violence» de ce livre « monstrueux» soient venues d'Allemagne
et d'Israël : à savoir du pays des bourreaux et de celui des victimes.
La journaliste de Die Zeit s'interrogeait non sans une certaine amertume :
" Pourquoi devrais-je lire un livre écrit par un imbécile cultivé qui écrit mal, est obsédé par les perversités sexuelles et s'est abandonné à une idéologie raciste et à une croyance archaïque au destin, je crains de ne toujours pas avoir trouvé la réponse."
La réponse à cette question exaspérée a sûrement un rapport avec l'immense ambition du roman, qui nous invite précisément à nous demander pourquoi nous devrions nous intéresser au processus par lequel une personne cultivée peut céder à une idéologie raciste, et quelles pourraient être les conséquences d'une telle attitude. Certaines de ces ambitions sont brillamment menées à bien ; d'autres avec moins de bonheur.
Mais toutes font du livre de Littell un ouvrage sérieux, qui mérite d'être abordé sérieusement.

C'est dans les résonances complexes du titre du roman qu'il faut chercher la clé de ces ambitions.
Les Bienveillantes est la traduction française du grec Eumenides : « celles qui veulent du bien », appellation rituelle plutôt flatteuse qui désignait jadis les horribles êtres surnaturels que nous connaissons mieux sous le nom d'Érinyes - les Furies des Romains.
Dans l' Orestie d'Eschyle - oeuvre que le roman de Littell convoque constamment, depuis l'ami intime du protagoniste que celui-ci surnomme avec désinvolture son « Pylade », jusqu'à des éléments clés du récit, en particulier la façon dont le héros assassine sa mère et son beau père -, Oreste est persécuté par ces horribles créatures baveuses à tête de chien dont la spécialité est de punir les crimes familiaux , après avoir tué sa mère Clytemnestre pour venger le meurtre de son père Agamemnon, accomplissant ainsi la volonté des dieux( Clytemnestre a tué Agamemnon parce qu'il avait sacrifié leur fille Iphigénie afin d'assurer à sa flotte des vents favorables lorsqu'elle ferait voile vers Troie.)
Le coeur de cette trilogie est en fait articulé sur un conflit entre soif de vengeance et soif de justice; ce n'est pas un hasard si elle trouve son paroxysme dans la troisième pièce,sous forme d'une scène de procès. Les Euménides se termine en effet sur l'acquittement d'Oreste par un tribunal récemment institué, au grand dam des Furies que seule une promesse parvient enfin à apaiser : elles ne seront désormais plus considérées comme des créatures diaboliques honnies mais intégrées à la vie de la cité athénienne et auront leur temple au pied de l'Acropole. Et pour mieux refléter leur nouveau statut, leur nom est également embelli : elles ne sont plus les redoutables Furies, mais deviennent les Euménides, les « Bienveillantes».
Il est pourtant difficile de ne pas ressentir les accents troublants de cet apparent dénouement heureux: pouvons-nous vraiment croire que, par la grâce d'un simple changement d'appellation, ces Furies seront vraiment apprivoisées ?
Choisir de donner à une oeuvre littéraire le titre du troisième volet de la trilogie d'Eschyle revient donc à se réclamer, très consciemment, de deux thèmes étroitement liés: l'un touche à la civilisation en général, et l'autre à la nature humaine. Le premier a trait à la justice, à sa nature et ses usages : comment elle est instituée, puis exécutée, en quoi elle se heurte à la soif de vengeance relativement primitive qu'elle est censée dépasser, la régule voire l'apaise. Le second, plus perturbant, concerne les forces sombres et potentiellement violentes qui guettent sous les dehors les plus agréables et les plus « bienveillants ». Ni l'un ni l'autre, il va sans dire, n'est l'apanage de la tragédie grecque ni même de la civilisation antique; mais tous deux sont intimement liés à la préoccupation centrale du roman de Littell : le programme nazi d'extermination durant la Seconde Guerre mondiale.

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Être en vie, c'est avoir une histoire à raconter. Être en vie, c'est précisément être le héros, le centre de l'histoire de toute une vie. Lorsque vous n'êtes rien de plus qu'un personnage mineur dans l'histoire d'un autre, cela signifie que vous êtes véritablement mort.
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De ce Shmiel, bien entendu, je savais quelque chose : le frère aîné de mon grand-père qui, avec sa femme et ses quatre filles superbes, avait été tué par les nazis pendant la guerre [...]. C'était là, nous le comprenions tous, la légende non écrite des quelques photos que nous avions de lui et de sa famille, qui étaient désormais rangées soigneusement dans un sac en plastique, à l'intérieur d'une boîte qui se trouvait elle-même à l'intérieur d'un carton dans la cave de ma mère.
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Tandis que chez Homère, les anneaux nous entraînent vers la révélation et l’illumination, par des spirales remontant toujours plus loin dans le passé d’Ulysse pour nous ramener à l’instant de sa naissance et à celui où il reçut son nom, deux clés de son identité et de celle de son épopée, les cercles du récit de Sebald nous conduisent vers une enfilade de portes fermées pour lesquelles il n’y a aucune clé.
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Qu'est ce que la mémoire ? la mémoire, c'est ce dont on se souvient.
Non , on change l'histoire; on se la rappelle Une histoire pas un fait.
Ou sont les faits ? Il y a la mémoire; il y a la vérité_ on ne peut pas savoir jamais
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"Un étranger arrive dans une ville inconnue après un long voyage. Ce fut un voyage sinueux et semé d'écueils ; l'étranger est fatigué. Il approche enfin de l'édifice qu'il habitera un certain temps et, laissant échapper un léger soupir, il avance vers l'entrée, dernière étape, brève, du chemin improbable et détourné qui l'a conduit jusqu'ici. Il a peut être quelques marches, qu'il gravit d'un pas las. Ou bien d'une arche floue se fondant à l'obscurité béante, comme quelque personnage mythologique disparaissant dans la gueule d'un monstre. Ses épaules ploient sous le poids des sacs qu'il porte, les deux sacs contiennent désormais tout ce qu'il possède, à l'exception de la femme et de l'enfant. Il a fait son bagage à la hâte. Qu'emporter? Qu'est-ce qui est le plus précieux? L'un des sacs contient probablement des livres."
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Les morts n'ont pas besoin d'histoires: c'est le fanatisme des vivants qui, à la différence des morts, se sentent coupables.
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Freud a écrit: « Les garçons que l’adolescent aime désormais ne sont que des personnes de substitution et des renouvellements de sa propre personne enfantine, qu’il aime comme sa mère l’aimait enfant ». (…) Je trouvais [Brad] irrésistible parce que certains détails me redonnaient accès à ma propre enfance perdue et malheureuse, comme si j’avais pu en aimant Brad être capable de récupérer et de réparer quelque chose en moi qui n’avait pas été comme il fallait, quelque chose qui avait été abimé.
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Peu à peu, le mot nostos, teinté de mélancolie et si profondément ancré dans les thèmes de L'Odyssée, a fini par se combiner à un autre mot du vaste vocabulaire grec de la souffrance, algos, pour nous offrir un moyen d'exprimer avec une élégante simplicité le sentiment doux-amer que nous éprouvons parfois pour une forme particulière et troublante de vague à l'âme. Littéralement, le mot signifie "la douleur qui naît du désir de retrouver son foyer", mais comme nous le savons, ce "foyer", surtout lorsque l'on vieillit, peut aussi bien se situer dans le temps que dans l'espace, être un moment autant qu'un lieu. ce mot est "nostalgie".
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Tel père, tel fils.
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Pour un helléniste, le simple fait d'ouvrir un exemplaire de l'Illiade ou de l'Odyssée est un rappel de cette longue lignée, de l'immense travail d'abeilles qui en vingt-cinq siècles a lentement ajouté des gouttes de savoir à notre compréhension de ce que sont les poèmes et de ce qu'ils racontent.
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Il ne recourait pas au procédé évident de commencer par le commencement et de finir par la fin ; il préférait la raconter par de vastes boucles, de telle sorte que chaque incident, chaque personnage, mentionné pendant qu'il était assis, là, sa voix de baryton déchirante oscillant sans cesse, avait droit à sa mini-histoire, un récit à l'intérieur du récit, de telle sorte que l'histoire ne se déployait pas (comme il me l'a expliqué un jour) comme des dominos, mais plutôt comme des boîtes chinoises ou des poupées russes, chaque évènement en contenant un autre, et ainsi de suite...."
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Aie toujours Ithaque en tête. Y parvenir est ta destinée. Mais ne hâte en rien ton voyage. Mieux vaut qu'il dure nombre d'années ; Que tu ne jettes l'ancre qu'une fois devenu vieux, riche de tout ce que tu auras glané en chemin, sans attendre d'Ithaque qu'elle te rende riche.
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But now I can see that the reason why I preferred the Greeks, above all others, to the Hebrews was that the Greeks told stories the way my grandfather told stories. When my grandfather told a story – for instance, the story that ended but she died a week before her wedding – he would'nt do anything so obvious as to start at the begining and end at the end ; instead, he told it in vast circling loops, so that each incident, each character he mentioned as he sat there, his organ-grinder baritone seesawing along, had its own mini-history, a story within a story, a narrative inside a narrative, so that the story he told was not (as he once explained it to me) like dominoes, one thing happening just after the other, but instead like a set of Chinese boxes or Russian dolls, so that each event turned out to contain another, which contained another, and so forth.
(page 31)
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Comme la plupart des tragédies, Ion ne vous gratifie pas d'une réponse toute prête , mais plutôt d'un paradoxe, d'un "men" et d'un "de". À la fin de votre quête d'identité, Ion semble vous dire que votre recherche d'une connaissance vraie et absolue de vous-même, de votre composition génétique et des traits qui vous font être vous de façon inlassable et inaliénable , tout cela pourrait ne pas aboutir à une réponse unique, mais à une énigme nouvelle, à une réponse qui ne peut être connue que de vous : vous êtes peut-être deux choses plutôt qu'une, un garçon à deux pères.
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