Citations de Bruno Tessarech (31)
Je suis un nègre. Quelqu'un qu'on paie pour écrire ce que les autres signent.
Où finissent les compromis, où commencent les compromissions, nœud gordien délicat à trancher.
Il faudrait comprendre, Monsieur Orvieto, que nul n'a encore inventé la guerre propre; Je vais vous choquer, et je m'en excuse. Mais qu'après trois années de conflit nous comptions déjà les morts par millions, des soldats, des résistants, des otages, des Polonais, des Français, des Juifs, eh bien moi, voyez-vous, ça ne me surprend pas trop. Sans doute parce que j'ai été moi-même sur le front, une expérience que peu d'entre vous connaissent. Ma réponse à votre note, elle tient en une phrase, que voici : commençons par gagner cette guerre, nous pleurerons nos morts ensuite.
Il faudrait comprendre, monsieur Orvieto, que nul n'a encore inventé l
Patrice passait ses journées à courir entre l'immeuble de Carlton Gardens, où de Galle et ses collaborateurs venaient de s'installer et les différents ministères où Dewavrin l'envoyait retirer des dossiers, porter des plis confidentiels, nouer des contacts. Il découvrait combien la guerre est agréable quand on ne la fait pas. Elle gomme le quotidien, annihile toute pensée individuelle, et décuple le sentiment de puissance.
Vous avez donc compris que cette leçon n'en est pas une. Narrateur omniscient, roman à la première personne, présence d'un Il privilégié, mise en avant d'un témoin complice, tout est possible à condition de veiller à la logique interne de votre roman. Là encore, l'avance fluide et naturelle de l'action doit être prise en compte car elle assure le confort du lecteur, lequel ne doit pas se sentir entravé par un système trop expérimental.
Pour chaque amateur de livre, la lecture est un délice. Découvrir que tel livre m'attendait, que l'auteur l'a écrit pour moi et pas seulement pour lui, est un moment magique. Grâce aux livres, les journées sont plus longues et plus intenses, ils ouvrent la porte de la réflexion autant que du rêve, tiennent éveillé au sens du monde et de l'homme, procurent ce sentiment trop rare d'émerveillement et de liberté.
Tout était dit. Les images. Sans elle, impossible d'imaginer, précisément. Le journaliste n'était pas convaincu, Wernher le sentait bien. Mais il ne pouvait rien répliquer. Pas d'image, pas de preuve. Donc pas de mots, pas de commentaires, pas de questions ni de remarques, oui mais quand même, ne pensez-vous pas, ne vous dites-vous jamais que ... Fin de la discussion.
Quelques années auparavant, j'avais éprouvé pour elle un tendre amour et un profond désir, et puis elle s'était lassée de nous au motif que vivre avec un écrivain relevait du cauchemar- " quand tu n' écris pas tu es déprimé, et quand tu écris, tu es angoissé". (p; 173)
L'art est beaucoup mieux que la vie ! Sa revanche, son double positif, sa lumière, ses guirlandes, sa musique...Vous allez crever, si vous ne jouez plus ! " Moment pathétique et merveilleux. C'est pourquoi je vous le répète, Louis: laissez les trucs alimentaires, retournez à votre écritoire et ne vous occupez plus du reste. (...)
En somme , la journée n'aura pas été inutile. Je vous aurai fait visiter mes moulins à vent à moi. Et, j'espère, convaincu de reprendre votre plume. La vôtre, pas celle des autres. Raison pour laquelle nous ne ferons pas ce livre ensemble. J'ai mieux à faire que de raconter ma vie, et vous, de l'écrire. Vous avez vos romans, j'ai mes rôles. (p; 237)
Par exemple je me rends compte que, dans un voyage, les bons moments se limitent en général à l'arrivée et au départ, lorsqu'on est tout heureux de ce qu'on va découvrir, et à la fin content de rentrer chez soi. (p. 203)
Le mécanisme de l'écriture l'intriguait. Il se demandait comment on peut se tenir tout le jour devant une feuille de papier à inventer des choses. Comme je le comprenais.
- On n'invente rien, Jean [Rochefort] . On interprète ce qu'on sent au fond de soi. On joue son rôle comme vous.
- Oui, mais nous on a un texte, un metteur en scène, des gens partout autour ! Vous, c'est la solitude. Comment vous vous arrangez sans rien d'autre que vous même ?
- Je ne saurais vous dire. On regarde vivre ses personnages. Et surtout on perd son temps. Au total il y a beaucoup de vides dans l'écriture, le rendement est d'une faiblesse inimaginable. (p. 93-94)
Sur le mode exubérant qu'il affectionnait, il lui adressait de vibrantes déclarations d'amour dont l'espérance de vie ne dépassait guère de trois mois. "La durée de vie moyenne d'un livre sur la table des libraires, m'avait-il un jour confié sur un ton fataliste. Qui sait si le jour où je publierai un chef-d'oeuvre immortel, je ne rencontrerai pas le grand amour ? Nous sommes des êtres bizarres. Nous espérons travailler pour l'éternité et notre existence ne connaît que les saccades trimestrielles des mises en place et des retours", avait-il ajouté, soudain morose. (p. 189)
Question inutile. Pour lui, les gens, c'était tout le monde, la foule des anonymes qui allait lui permettre de devenir plus que du vent et de la poussière. Entre l'achèvement du livre et sa livraison au public, les mots portaient en eux un rêve d'éternité. (p. 172)
Ecris à cette altitude -là, avec cette ampleur- là. Embrasse à la fois l'étable et la planète entière. Car tout est dans tout, je le répète assez. (p. 148)
Les autobiographies n'avaient droit qu'au prêt-à-porter, parce que rien ne ressemble plus à une vie qu'une autre. Seule la fiction permettait le sur-mesure, l'unique. (p. 122)
De manière confuse, j'étais persuadé que les livres ne découlaient pas du réel, mais qu'ils le commandaient, l'inspiraient, lui insufflaient une vie qu'il n'aurait jamais connue sans eux. l'origine des pensées comme des sentiments gisaient au cœur des textes. Le monde tentait de les imiter, en général assez platement. C'est la raison pour laquelle , même si un jour je ne parvenais plus à écrire, je ne pourrais jamais quitter les livres et leurs auteurs. (p. 60)
Lacan, c'était tout bonnement génial. Une force de la nature, un type qui avait d'autant plus exprimé l'essentiel qu'on n'y comprenait rien- mais Dieu n'était-il pas invisible et le sens des choses caché ? (p. 113)
De manière confuse, j'étais persuadé que les livres ne découlaient pas du réel, mais qu'ils le commandaient, l'inspiraient, lui insufflaient une vie qu'il n'aurait jamais connue sans eux. L'origine des pensées comme des sentiments gisaient au cœur des textes. Le monde tentait de les imiter, en général assez platement. C'est la raison pour laquelle, même si un jour je ne parvenais plus à écrire, je ne pourrais jamais quitter les livres et leurs auteurs. (p.60)
Plus rien de tout ça, puisque ce boulot de nègre, justement parce que c'est un boulot de nègre, je m'en tape. Je m'étais trompé. Ecrire, c'est écrire. L'histoire d'un homme, vraie ou fausse, reste l'histoire d'un homme. On ne plaisante pas avec ces choses-là. Les mots nous tiennent à la gorge. Au mieux nous en sommes les serviteurs, le plus souvent les prisonniers. (p.81)