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Critiques de Amin Maalouf (1197)
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Les désorientés

«… l’histoire des nôtres, de nos familles et de notre bande d’amis, celle de nos illusions et de nos égarements, n’est pas inintéressante à raconter, parce qu’elle est un peu l’histoire de notre époque, de ses illusions, justement, comme de ses égarements. » Amin Maalouf part de ce postulat, pour nous raconter de façon très libre et en partie imaginaire, sa propre jeunesse avec le regard de celui qui a vieilli.

Adam, Mourad, Sémi, Albert,… Jeunes et beaux, ils se rassemblent sur une terrasse et refont le monde. Ils vivent, on le devine, au Liban. Hélas, la guerre se déclare et chacun réagit à sa façon : fuite vers un autre pays, engagement, profit, survie… Le groupe d’amis est brisé et si certains liens sont encore ténus, la cassure est réelle. Trente ans plus tard, l’occasion leur est donnée de se réunir sur les lieux de leur enfance. Que sont devenus les idéaux de leur jeunesse ? Pourquoi n’ont-ils pas réussi à rendre le monde meilleur et finalement, quel est le sens de la vie ?

Comme toujours chez l’auteur, j’ai été conquise par le mélange de simplicité et d’humanité. Il fait preuve d’une maturité incroyable et on ressent qu’il a donné beaucoup de lui-même pour créer le personnage principal, Adam.

Qu’il s’agisse de la place de la religion dans nos sociétés, de la relation Orient-Occident, de l’importance du respect des cultures,… nombres de réflexions que l’auteur apporte me parlent. Les désorientés : quelle belle expression, aux sens multiples, pour définir cette génération, ni riche, ni pauvre, ni religieuse, ni profondément athée, qu’elle soit d’ici ou là-bas et qui est à la recherche de sens et de certitudes.

L’auteur, qui fait indéniablement partie de mes favoris, nous offre un grand roman, entre trame romanesque intéressante et idées puissantes sur la manière dont notre monde tourne, sans boussole. A lire.
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Le rocher de Tanios

Elu secrétaire perpétuel de l'Académie française le 28 septembre 2023 Amin Maalouf est devenu un ambassadeur prestigieux de la langue française. Découvrir sa plume avec le rocher de Tanios lauréat du Prix Goncourt général de 1993 a été une très agréable rencontre.

le rocher de Tanios nous emmène au Liban, dans les années 1830/40. L'empire ottoman voit sa suprématie territoriale battue en brèche par le Pacha égyptien Méhemet-Ali. Les anglais se rangent derrière les ottomans, les français derrière le Pacha et c'est tellement plus simple de s'affronter à distance ...

Le village de Kfaryabda, situé dans la Mont Liban, vit sous l'autorité de son cheikh. Nous sommes en terre chrétienne, les villageois s'estiment relativement heureux de leur sort. le seul reproche qu'il puisse faire au Cheikh est son insatiable appétit pour la gent féminine surtout pour Lamia la ravissante épouse de son intendant. Quand celle-ci met au monde un fils, Tanios, les langues vont bon train...

Voilà les présentations sont faites. Il n'y a plus qu'à vous laisser porter par la plume fluide et très agréable d'Amin Maalouf. L'histoire d'hier explique une fois encore l'histoire d'aujourd'hui et le Liban souffre de mille maux toujours et encore.

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Le Labyrinthe des égarés : L'Occident et ses ad..

Un essai qui constitue une formidable révision historique via la narration des origines, des évolutions et des états actuels de quatre grands pays qui modèlent encore le paysage géopolitique du monde. Tour à tour, l’auteur, nous emmène au japon, en URSS, en Chine et aux Etats Unis d’Amérique. Richement documenté, ce voyage temporel et géographique nous est offert avec les analyses très pertinentes d’un écrivain humaniste particulièrement inspiré. A lire pour réactiver des neurones fatigués d’histoire oubliée.
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Le naufrage des civilisations

Le naufrage des civilisations est un essai d'Amin Maalouf pour parler de notre monde.

Depuis plus d'un demi siécle Amin Maalouf a parcouru le monde que ce soit à Saigon pour la chute du Vietnam ou encore à Téhéran pour le retour de l'Ayatollah Khomeiny en Iran.

Amin Maalouf d'origine libanaise a une réflexion experte sur le Liban , le Levant et le moyen Orient.

C'est à partir de ma terre natale que les ténébres ont commencé a se répandre sur le monde écrit Ain Maalouf.

C'est la base de cet essai qui depuis les années 45 jusqu'à maintenant va décrire Le naufrage des civilisations.

S'appuyant sur les grands événements historiques comme l'arrivée au pouvoir de Nasser en Egypte , la guerre des 6 jours , la partition du Liban ou encore le retour de Khomeiny en Iran, Amin Maalouf nous fait revivre de façon passionnante cette histoire qui a modelé le monde.

Entre conservatisme et progressisme Amin Maalouf nous fait comprendre l'importance de l'année 1979/ 1980 avec l'arrivée au pouvoir de Margaret Tatcher , de Ronald Reegan et l'élection de Jean Paul II.

Ces années 1979 /1980 qui sont à l'origine des profonds changements qui mènent au naufrage des civilisations.

Naissance du terrorisme djihadiste , prédominance du conservatisme et du repli sur soi.

C'est clair , c'est net , c'est précis.

C'est grave , un peu noir mais c'est une réalité.

Il n'y a pas de lumière au bout du tunnel et sans être un oui-oui ou un ravi de la crèche il me semble que le constat est trop noir et qu'il laisse peu de place à une prise de conscience.

Elle sera sûrement tardive , mais pourquoi n'existerait-elle pas ?


Lien : https://auventdesmots.wordpr..
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Léon l'Africain

Léon l’Africain est la biographie (inventée) d’un grand voyageur arabe du seizième siècle devenu, par la force des choses, cartographe en Occident. L’occasion d’un chassé-croisé des deux côtés de la Méditerranée et de récit de voyages au croisement de civilisations peu connues, de Grenade à Tombouctou, en passant par le Caire. Ce récit est émaillé de contes d’Orient et d’évènements historiques. L’Histoire ne s’est pas faite qu’à Rome ou à Paris, elle a aussi impacté des hommes au Maghreb, au Moyen Orient et en Afrique. Un beau roman qui réussit à ouvrir l’horizon.
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Le rocher de Tanios

J aime beaucoup Maalouf c est un auteur très érudit le premier livre que j ai lu de lui m a donné un très bon aperçu de son talent. Ma seule erreur a été de lire Léon l africain avant le Rocher de Tanios, on ne peut pas lire un chef-d oeuvre et ensuite un autre récit quand bien même il peut-être bon. Si pour le récit de Tanios il reçu le prix Goncourt pour Leon l africain il mériterait le Prix Nobel. Vous l aurez bien compris j ai été beaucoup moins transporter par le Rocher de Tanios, alors un conseil commencer par celui-ci et ensuite Léon l africain vous ne serez pas déçu.
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Les Echelles du Levant

Le narrateur, immigré libanais, rencontre à Paris un de ses compatriotes, un peu égaré dans la ville. Après quelques échanges, le voyageur lui confie qu'il a un rendez-vous important dans quelques jours, et accepte de lui raconter son histoire jusqu'à cette date.



Ossyane est le petit-fils du dernier empereur ottoman. Élevé selon les méthodes de son père, qui a conservé ses habitudes de prince et voit en son fils un futur grand révolutionnaire, il est choyé, baigné dans les arts, instruit par les meilleurs précepteurs, mais écrasé par ce qu'on attend de lui.



Ossyane se retrouve, bien malgré lui, au point de rencontre de tous les conflits du vingtième siècle : son père est turc et sa mère arménienne au moment du génocide ; quand la seconde guerre mondiale éclate pendant ses études à Montpellier, il se retrouve enrôlé dans la Résistance un peu par hasard ; et il épousera une juive quelques mois avant le premier conflit qui opposera Israël aux pays arabes environnants.



L'amour contrarié par l'Histoire, un hymne au respect mutuel, ce livre possède tous les ingrédients pour une lecture agréable, mais il m'a tout de même manqué un petit quelque chose, je ne me suis jamais vraiment senti proche du héros principal.
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Léon l'Africain

Un magnifique voyage dans le temps et dans l'espace !



Dans le temps car Amin Maalouf nous raconte l'histoire de Hassan le Grenadin, alias Léon l'africain, qui a vécu fin du XVème / début du XVIème siècle.



Dans l'espace car ce personnage qui a réellement existé a voyagé tout autour de la Méditerranée.



J'ai adoré suivre le parcours de ce personnage car à travers son histoire, c'est aussi la grande Histoire que l'on voit : témoin de la chute de Grenade avec l'exil des musulmans, celle du Caire face à l'Empire Ottoman ou encore les conflits religieux au sein de la Chrétienté (papauté et luthériens) ainsi que l'opposition de Rome à Charles Quint.



Ce que j'ai adoré aussi, c'est l'immersion dans le quotidien des gens à cette époque, la cohabitation entre les différentes communautés religieuses, les traditions familiales qui en découlent avec la place des femmes, mais aussi l'esclavagisme et comment il était vécu. Passionnant.



Et pour tout ça, l'auteur a une plume magnifique. Il a construit son roman en quatre livres/parties qui correspondent aux quatre grandes périodes de la vie de Léon : ses premières années à Grenade, sa jeunesse à Fès, puis sa vie au Caire et enfin ses années à Rome.



J'avais beaucoup aimé le Samarcande d'Amin Maalouf, son Léon l'Africain m'a tout autant ravie. Un auteur que je vais continuer à lire, assurément.
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Le naufrage des civilisations

En revenant sur le parcours de sa famille et de lui-même, Amin Maalouf trace l'histoire du Proche-Orient des années cinquante à 2019 (date de parution de cet essai). Pour lui, la chute en cascade des civilisations prend naissance là-bas. Issu d'une famille de libanais ayant dû fuir l'Egypte après l'arrivée au pouvoir du Raïs (Nasser), il prend plutôt exemple sur Mandela qui a empêché la fuite des blancs après son accession à la présidence. Le Liban a été longtemps un refuge pour les Egyptiens, les Syriens et d'autres peuples de la région. Pendant un cours laps de temps, l'Egypte et la Syrie réunies dans la république Arabe Unie ont tenu le pari de traiter égalitairement toutes les communautés, même les plus petites. Mais tout cela n'a pas duré, la date charnière étant, selon l'écrivain, 1967 et l'humiliation des Arabes lors de la guerre des six jours.

Une autre date très importante fut 1979, Amin Maalouf insiste beaucoup là-dessus : ce fut l'année des révolutions conservatrices, avec à leur tête Thatcher, puis plus tard Reagan mais aussi Khomeiny, Teg Siao Ping et Jean-Paul II.

L'auteur explique de même comment les Américains, pour contrer les Russes, ont favorisé la montée de l'islamisme radical et participé au massacre des communistes indonésiens (ce qui est moins connu).

J'ai trouvé ce livre intéressant et relativement instructif mais pessimiste, d'ailleurs il se conclut par l'évocation du naufrage du Titanic ; cependant, en constatant les évènements survenus après sa parution, n'y-a-t'il pas lieu de l'être et l'auteur n'est-t'il pas un véritable visionnaire dans son analyse ?
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Le rocher de Tanios

"Le destin passe et repasse à travers nous, comme l'aiguille du cordonnier à travers le cuir qu'il façonne".



Le destin de Tanios commence par le mystère qui entoure sa naissance.



Sa rivalité enfantine avec Raad , Fils du Cheikh qui gouverne le village perdurera à l'âge adulte.



Ses premiers émois avec Asma, fille de Roukoz le félon.



Tout se mêle et s'emmêle L Histoire et la Légende, ai eu du mal à démêler tout cela.



Je me suis un perdu dans les conflits entre puissances, les disputes et les déchirements des pays Ottomans avec l'Egypte et l'Angleterre.



Je n'ai donc retenu que la vie de Tanios.

Tanios dont les cheveux prématurément blanchis lui sauveront la vie.

Tanios qui jettera sa gourme auprès de la belle Thamar dans l'épisode des oranges en page 189.

Tanios qui se postera sur le rocher pour "voir plus loin".



Il faut toujours dans un village qu'il y ai de façon inopinée un fou et un mécréant.



Société où la politesse suprême à l'égard des femmes consiste à les ignorer .



(p.136) Pourquoi, devrais-je fuir comme le chacal qui a peur de son ombre .



L'Orient et toutes ses contradictions et ses traditions si loin des nôtres.



J'ai adhéré, moyen, pourtant bien écrit mais l'esprit n'y était pas ; il s'était égaré quelque part dans un endroit inconnu n'ayant aucun rapport avec le Pays du Soleil .
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Les Jardins de lumière

Amin Maâlouf retrace la vie tumultueuse d´un homme, parmi les hommes, «venu du pays de Babel, disait-il, pour faire retentir un cri à travers le monde», et ajoutant, avec le dépit de toute sa conscience naïve, «Au milieu de ces hommes, j´ai cheminé avec sagesse et ruse...»

Mais qui est ce personnage dont l´histoire semble se perdre dans la nuit des temps et dont le seul nom «Mani» demeure sur les lèvres pour exprimer, à l´emporte-pièce, une tendance gnostique souvent douteuse, et donc étrangère à l´authentique philosophie religieuse fondée sur la connaissance inspirée particulièrement du zoroastrisme, du bouddhisme et du christianisme? Cependant, sans entrer dans le détail de cette philosophie qui fit du personnage de Mani, en son temps, le messager de tous les défis t «le temps n´est que le fût où les mythes mûrissent» , «ses fidèles, observent notre auteur et les chroniqueurs chez qui, il a puisé abondamment, se jurèrent de ne plus l´appeler autrement que «Mani-Hayy», Mani le-Vivant. Termes devenus inséparables dans leurs récits comme dans leurs prières, au point que les Grecs n´entendront qu´un mot unique qu´ils transcriront «Manikhaios». D´autres disant «Manichaeus» ou encore «Manichée» (...) De ses livres, objets d´art et de ferveur, de sa foi généreuse, de sa quête passionnée, de son message d´harmonie entre les hommes, la nature et la divinité, il ne reste plus rien. De sa religion de beauté, de sa subtile religion du clair-obscur, nous n´avons gardé que ces mots «manichéen», «manichéisme» (...) Car tous les inquisiteurs de Rome et de la Perse se sont ligués pour défigurer Mani, pour l´éteindre. En quoi était-il dangereux qu´il ait fallu le pourchasser ainsi jusque dans notre mémoire?»

Amin Maâlouf, avec Les jardins de lumière ne fait pas seulement le récit des «aventures» de l´homme à la jambe torse, il en fait une passionnante analyse sociologique, et forcément très humaine, Mani est né dans un pays où les dieux sont nombreux, ont des yeux, des oreilles et une langue terrible. Ils sont sans âge et infaillibles, tout comme le sont aussi nécessairement leurs serviteurs, tels que Sittaï de Palmyre, le maître et guide des Vêtements-Blancs de la Palmeraie et qui se présente toujours en ces termes: «Je suis un chercheur de vérité!». Il sera «le voleur» de Mani qu´il arrachera «en douceur» à ses très jeunes parents. Mani est né d´un père nommé Pattig, portant «dans le regard une candeur enfantine», fils de la haute noblesse parthe, originaire d´Ecbatane, et de Mariam, une jeune femme dont la Médie est la patrie d´origine et qui appartient à la noble famille des Kamsaragan (dont plusieurs membres furent massacrés par les Romains), plus noble et plus ancienne encore qui fut associée au règne des Parthes.

Il est né à Mardibu, un village non loin de la ville de Ctésiphon, métropole du pays de Babel et résidence des rois parthes. Ici commence l´histoire de Mani. Notre auteur écrit: «L´histoire de Mani commence à l´aube de l´ère chrétienne, moins de deux siècles après la mort de Jésus. Sur les bords du Tigre s´attardent encore une foule de dieux. Certains ont émergé du déluge et des premières écritures, les autres sont venus avec les conquérants, ou avec les marchands.»

Dès lors, le roman va se développer comme une suite d´événements programmés montrant progressivement la naissance d´un être exceptionnel. Sa foi en l´homme sera sa priorité exercée comme un sacerdoce: sa raison de vivre. Il sera le peintre, puis le médecin, puis le prophète d´une société pour laquelle, il essaiera de construire un monde profondément humaniste. Cependant, son discours, sans cesse inspiré, s´enflamme, se précise: «...aux commencements de l´univers, deux mondes existaient, séparés l´un de l´autre: le monde de la Lumière et celui des Ténèbres. Dans les Jardins de Lumière étaient toutes les choses désirables, dans les ténèbres résidait le désir, un désir puissant, impérieux, rugissant. Et soudain, à la frontière des deux mondes, un choc se produisit, le plus violent et le plus terrifiant que l´univers ait connu. Les particules de Lumière se sont alors mêlées aux Ténèbres, de mille façons différentes, et c´est ainsi que sont apparus toutes les créatures, les corps célestes et les eaux, et la nature et l´homme... En tout être comme en toute chose se côtoient et s´imbriquent Lumière et Ténèbres. Dans une datte que vous croquez, la chair nourrit votre corps, mais le goût suave et le parfum et la couleur nourrissent votre esprit. La Lumière qui est en vous se nourrit de beauté et de connaissance, songez à la nourrir sans arrêt, ne vous contentez pas de gaver votre corps...»

Toutefois, de tels discours ne tarderont pas à provoquer l´irrémédiable. L´ignorance, le fanatisme, l´intolérance, la trahison, les excès du pouvoir, la haine, l´envie malsaine, tout cela et d´autres choses que toute une vie ne pourrait connaître, et même la vérité qui est dite et qui n´est pas bonne à dire, livrent au supplice des fers, tuent les rois et les princes, les dominateurs et les dominés, les croyants et les non-croyants, les fidèles et les infidèles... Bientôt «le fils de Babel» est banni, puis, il est arrêté et jeté dans une prison dans les quartiers de Beth-Lapat. Le prophète est persécuté. Il subit un affreux martyre: «Une lourde chaîne scellée autour du cou, trois autres autour du buste, trois à chaque jambe, et trois encore à chaque bras...Sous le poids, sa vie allait s´épuiser goutte à goutte...Au vingt-sixième matin s´acheva le dernier acte de sa passion...C´était en l´an 584 des astronomes de Babel, le quatrième jour du mois d´Addar pour l´ère chrétienne le 2 mars 274, un lundi, la passion de Mani se confond depuis, avec la nôtre.»

Et Amin Maâlouf de conclure: «Ce livre est dédié à Mani. Il a voulu raconter sa vie. Ou, ce qu´on peut en deviner encore après tant de siècles de mensonge et d´oubli.» Pour l´auteur, comme pour nous, Les jardins de lumière constituent un témoignage fort et juste sur un espoir humain brisé par la haine et la sottise malfaisante des inquisiteurs de tous les temps.
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Un fauteuil sur la Seine

Quatre siècles d'histoire, il fallait les avaler, d'autant que la quatrième de couverture m'invitait à la fronde, à moins d'être boulimique, cette dégustation ressemblait à un repas de la IVème république avec 4 poissons puis 4 viandes.



Quel chef, ! Monsieur Amin Maalouf nous a préparé un menu étoilé à la Gagnère en nous épargnant le digestif, à savoir sa propre montée des marches vers l'éternité !



Des plats imposés, 18 impétrants à se succéder par le menu, les uns accompagnés de leur mentor, les autres arborant fièrement leurs origines, leur millésime, leur l'intelligence ou leur bouquet de rimes ou de prose.



Monsieur l'académicien Me Amin Maalouf, ne s'est pas posé sur un fauteuil au bord de la Seine, pour raconter de mémoire ce qu'il savait de ces immortels. Retroussant ses manches il arpenta toutes les bibliothèques susceptibles de le renseigner sur la qualité des récipiendaires.



Ce récit est magnifique, authentique, vrai, du bio, ou du moins du biographique, plein de finesses, de tendresse pour leurs défauts, de l'ironie pour ce qu'ils ont cru être leur panthéon, un florilège de l'esprit français.



On devine que l'ultime préoccupation de l'auteur est de montrer l'apport de chaque personnalité à la culture, la réussite de cette quête on la trouve dans ce mélange de tempéraments qui entremêle le cardinal de Fleury à Claris de Florient qui goûta à la prison, de Ernest Renan à Paul Chalmel l'amoureux discret, de André Siegfried l'orateur à Henry de Montherlant le toréador tourmenté.,



Amin Maalouf brosse un tableau singulier de notre langue avec ses multiples apports de personnalités du monde des arts des lettres ou des sciences.



On sera surpris par les diverses éruditions, ainsi réunies dans cette géologie académique, et le nombre de sciences nouvelles crées par ces artistes du verbe français ; la médecine expérimentale avec Claude Bernard, l'histoire des religions et la vie de Jésus avec Ernest Renan, l'anthropologie sociale avec Claude Lévi-Strauss, la biographie comme science avec Joseph Michaud, la physiologie et l'humanisme avec Pierre Flourens, de la manière de négocier avec François de Carrière.



François de Carrière s'est éteint en 1717 à 70 ans, ayant tardivement publié son ouvrage  "de la Manière de Négocier", car il attendait la mort de son maître Louis X1V ! Son texte et sa personne de tardèrent pas à sombrer dans l'oubli.



C'est 200 ans plus tard en 1917 que son texte entame une lente résurrection.

C'est un anglais sir Ernest Satow qui publia en 1917 un guide pratique se référant chapitre après chapitre à l'ouvrage de François de Carrière décrit comme une mine de sagesse politique.

On sait par exemple que Thomas Jefferson avait lu et admiré l'ouvrage de Carrière dont il gardait un exemplaire en permanence dans sa bibliothèque



Ainsi, l'art de négocier n'est pas une science, mais bien un art enseigné à Harvard, et l'auteur devenant ironie de l'histoire l’apôtre de la persuasion, pour l'inventeur du softpower, sa carrière est maintenant assurée, il a de nos jours un succès fou..



C'est le vœu que je forme pour Mr Amin Maalouf, puisse ce texte devenir un art, l'art d’accommoder les talents de nos ancêtres.

Cette première est une réussite littéraire, un hommage à l'esprit français cher à Molière, à Le fontaine, à Molière et à Hugo.

A noter que le développement sur François de Carrière est personnel et subjectif.



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Les croisades vues par les Arabes

Le livre décrit les développements au Moyen-Orient de la première invasion chrétienne en 1096 jusqu'à la fin de l'époque des croisades deux siècles plus tard. L'auteur a utilisé des sources arabes historiques pour raconter comment « les Arabes ont vu les croisades ». L'époque de croisades au Moyen-Orient était une époque chaotique. Avant l'invasion des croisés, la région connaissait déjà beaucoup des conflits, des batailles et des révoltes. L'arrivée des Occidentaux n'a pas aidé à améliorer la situation locale.



Le livre comprend une longue série de batailles, de sièges et de meurtres. C'est une boucherie après l'autre et une suite impressionnante de trahisons et de meurtres des tout-puissants. Cependant, les grandes lignes de l'histoire et la vue générale de cette région et de cette époque, elles manquent un peu. L'auteur présente un grand nombre d'événements successifs, des batailles, des sièges et des meurtres. Malheureusement, on ne trouve pas des autres informations, par exemple sur l'économie ou sur des habitants locaux. le livre ne traite pas la question si les suites de l'invasion des croisés étaient complètement négatives pour la population locale. Peut-être on a établi quand même des nouveaux commerces ? Quelles étaient les autres conséquences des croisades, outre les barbaries, pour la population indigène ?





Évidemment, les croisés ont agi cruellement pendant des sièges et des batailles. Ils ont mis à mort n'importe qui ; des combattants musulmans, mais aussi des civils musulmans et chrétiens. Ils ont détruit des villes et des villages et ils ont mis à sac des régions entières. Cependant, les croisés ont occupé un territoire pendant presque deux siècles. On ne trouve pas beaucoup d'information dans le livre sur les interactions durant les temps un peu plus paisibles. Quels étaient les développements pendant les temps sans grandes batailles et conflits armés ? Les croisés, n'ont-ils rien contribué à l'économie locale ou à la population indigène ?



Le livre présente quand même des choses marquantes. Par exemple, la façon opportuniste des tout-puissants musulmans de régler leurs conflits réciproques et d'éliminer leurs ennemis locaux par collaborer avec des croisés chrétiens.

Quelques fois, par exemple pendant les conflits entre les sunnites et les chiites, la menace des chrétiens a été considérée moins dangereuse que celle d'un tout-puissant musulman d'une autre faction ! On trouve aussi des exemples d'alliances temporaires entre des chrétiens et des musulmans pour combattre des autres coalitions de chrétiens et musulmans... Il y avait aussi une population indigène chrétienne, comme les Arméniens, qui n'a pas souhaité la bienvenue aux croisés. Selon le livre, ils avaient demandé de l'aide aux musulmans pour se protéger mieux contre leurs coreligionnaires européens.



C'est aussi intéressant d'apprendre comment les générations ultérieures de tout-puissants chrétiens ont adopté les façons locales pour faire la politique. Les générations ultérieures consistaient en enfants de la noblesse chrétienne qui étaient nées au Moyen-Orient et qui n'avaient jamais visité l'Europe de leurs pères. Ils se pliaient facilement aux circonstances locales et faisaient la politique comme les indigènes, les vizirs et les sultans.



« Les Croisades vues par les Arab » est un vaste livre historique à lire absolument pour toutes les intéressées au Moyen-Âge européen.
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Le rocher de Tanios

En ce 19ème siècle, le sultan de l'empire ottoman et le pacha d'Égypte s'affrontent pour l'hégémonie de la région, soutenus et favorisés par de grandes puissances occidentales. Coincé entre ces deux blocs, un petit village de montagne va devoir lutter pour ne pas se faire broyer et conserver tant bien que mal son identité.



Dans cette situation déjà complexe, la naissance de Tanios va servir de catalyseur : l'identité de son père est suspecte, le cheick du village ayant poursuivi de ses assiduités sa mère, ce qui ne plaît ni à la famille puissante de la femme du cheick, ni au patriarche qui a organisé le mariage. Un cycle de représailles se déclenche, dans un coin du monde où personne n'oublie jamais une offense.



Le ton du roman est assez mélancolique : le héros est obligé de subir son destin, dépassé par le cours des événements qu'il a provoqué. On assiste également à la fin d'un mode de vie et de privilèges séculaires, imposé à une population qui n'avait pourtant rien demandé. Bien écrit assurément, mais aussi un brin déprimant.
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Les croisades vues par les Arabes

C'est difficile pour moi d'écrire une critique sur ce livre car je suis vraiment entre 2 chaises.

D'un coté, je reconnais les qualités intrinsèques de cet ouvrage : il est extrêmement bien documenté, très précis, et rien à dire non plus sur l'écriture de l'auteur.

D'un autre coté, je n'ai pas aimé le sujet alors que je le trouvais intéressant au départ : L'autre point de vue des croisades. Ce que je n'aime pas, c'est les descriptions de batailles, de guet-apens et de sièges. J'ai horreur de la guerre et du coup, cela a ternit ma lecture. Et pourtant, j'aurais du m'en douter avant de l'ouvrir !

Bref, un livre que je pense excellent mais que je ne peux pas juger à sa juste valeur simplement à cause de mes sentiments personnels.
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Léon l'Africain

Que dire d'une telle épopée ? Qu'elle est la résultante d'une conjonction entre la grande Histoire et la petite histoire. Celle de Léon (né Hassan) et de sa famille à Grenade alors sous occupation musulmane jusqu'à leur exil à Fès. L'occasion de découvrir les moeurs sociales et les soubresauts politiques des terres traversées.



Puis vient le temps du périple individuel vers d'autres contrées de ce grand voyageur dont les observations, les rencontres et les sensations emportent aisément le lecteur.

Un récit enchanteur.
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Le rocher de Tanios

Des années que je vois ce livre dans ma PAL

Des années que ce n’est pas lui que je choisis

Et bien voilà c’est fait. Enfin choisi, lu et énormément aimé.

Partant d’un fait réel, s’appuyant sur des souvenirs familiaux, l’auteur nous conte la légende de Tanios, nous fait partager son Liban, les montagnes, les coutumes, l’Histoire du XIX ème siècle de son pays.

Que c’est prenant ! Que c’est dépaysant !

L’histoire est très forte. Oppression, vengeance, amour……une foule de personnages forts et attachants et le tout servi par une écriture sobre et belle.

Une intrigue qui tient en haleine, donnant à réfléchir sur l’origine des légendes

Un conte oriental qui se prolonge dans l’esprit bien après avoir refermé le livre.

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Les désorientés

C'est sa propre histoire qu'Amin Maalouf narre dans ce livre exceptionnel. Un beau soir, le romancier à succès reçoit un étrange appel venu du Levant. Au téléphone, un ex-ami de fac auquel il n'a plus parlé depuis plus de vingt ans. Celui-ci lui explique la voix vacillante qu'il est mourant et qu'il désirerait le voir une dernière fois... Surpris par sa propre spontanéité, l'écrivain prend le premier vol pour Beyrouth, le jour même.

A peine arrivé sur la terre qu'il n'a plus foulée depuis la guerre civile (1975-1990), il apprend que son complice d’autrefois vient de s'éteindre. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, il décide de rester jusqu'aux obsèques et de passer le temps en rendant visite à quelques (rares) amis demeurés au pays.



Ce roman ostensiblement autobiographique est l’occasion pour Maalouf de régler ses comptes avec un vécu dont les blessures ne sont pas encore totalement cicatrisées et un présent qui lui laisse un goût pour le moins amer.



Il commence par décrire avec une nostalgie non feinte l’incroyable confiance en l'avenir qui animait sa génération. Ses compagnons d'études chrétiens, musulmans et juifs n'éprouvaient aucune animosité ni même méfiance l'un envers l’autre : « Mes amis appartenaient à toutes les confessions, et chacun se faisait un devoir, une coquetterie, de railler la sienne - puis gentiment, celle des autres. Nous étions l'ébauche de l'avenir, mais l'avenir sera resté à l'état d'ébauche. Chacun de nous allait se laisser reconduire, sous bonne garde, dans l'enclos de la foi obligée. Nous nous proclamions voltairiens, camusiens, sartriens, nietzschéens ou surréalistes. Nous sommes devenus chrétiens, musulmans ou juifs, suivant des dénominations précises, un martyrologe abondant, et les pieuses détestations qui vont avec. »



Puis, à travers un échange épistolaire avec ses amis de la diaspora, il passe peu à peu aux raisons qui l’ont poussé à quitter le pays dès le début du conflit : « Nous étions jeunes, c'était l'aube de notre vie, et c'était déjà le crépuscule. La guerre s'approchait. Elle rampait vers nous, comme un nuage radioactif ; on ne pouvait plus l'arrêter, on pouvait tout juste s'enfuir. »



Mais, le plus intéressant on le lit entre les lignes : même s’il se présente en homme épanoui qui a pris du recul sur le passé, Maalouf éprouve encore un fort sentiment de culpabilité : celui d’avoir abandonné un bateau multiethnique en train de couler. Raison pour laquelle il n’a de cesse de vouloir se justifier : « Le pays où tu peux vivre la tête haute, tu lui donnes tout, tu lui sacrifies tout, même ta propre vie ; celui où tu dois vivre la tête basse, tu ne lui donnes rien. Qu'il s'agisse de ton pays d'accueil ou de ton pays d'origine. La magnanimité appelle la magnanimité, l'indifférence appelle l'indifférence, et le mépris appelle le mépris. Telle est la charte des êtres libres et, pour ma part, je n'en reconnais aucune autre. »



Pourtant, à son corps défendant, l’écrivain fait part avec beaucoup de pudeur d’un attachement intact pour son pays d’origine : « On ne cesse de me répéter que notre Levant est ainsi, qu'il ne changera pas, qu'il y aura toujours des factions, des passe-droits, des dessous-de-table, du népotisme obscène, et que nous n'avons pas d'autre choix que de faire avec. Comme je refuse tout cela, on me taxe d'orgueil et même d'intolérance. Est-ce de l'orgueil que de vouloir que son pays devienne moins archaïque, moins corrompu et moins violent ? Est-ce de l'orgueil ou de l'intolérance que de ne pas vouloir se contenter d'une démocratie approximative et d'une paix civile intermittente ? Si c'est le cas, je revendique mon péché d'orgueil, et je maudis leur vertueuse résignation. »



En donnant la parole à ses amis, il en profite même pour lancer des saillies aux intégristes et réactionnaires de tout bord : « La religion, c'est important, mais pas plus que la famille, pas plus que l'amitié, et pas plus que la loyauté. Il y a de plus en plus de gens pour qui la religion remplace la morale. Ils te parlent du licite et de l'illicite, du pur et de l'impur, avec des citations à l'appui. Moi j'aimerais qu'on se préoccupe plutôt d'être honnête, et de ce qui est décent. Parce qu'ils ont une religion, ils se croient dispensés d'avoir une morale. »



On pourrait encore citer mille mots d’esprit d’une histoire qui permet une lecture à plusieurs niveaux et qui offre un épilogue totalement inattendu. Plusieurs semaines après avoir dévoré ce livre, on n’arrive toujours pas à comprendre les raisons qui ont poussé l’auteur à conclure d’une manière aussi étrange. Et c’est sans doute ce qui fait le charme de ce récit hors normes : les portes qui se ferment en ouvrent d’autres qui a leur tour laissent le champ libre à toutes les spéculations…
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Origines

Face à une malle remplie de courriers familiaux divers Amin Maalouf écrira : "Moi qui étais venu chercher en ce lieu une clé pour ma porte, je voyais de dresser devant moi mille portes sans clés. Que faire de cet amas de vieux papiers ? Je ne pourrai jamais rien écrire à partir de cela ! Et, ce qui est pire : tant que ces reliques encombreront ma route, je n'écrirai rien d'autre non plus.".

Et commence pour l'auteur un long travail de tri et de recoupements de courriers, de télégrammes, de photos, pour comprendre ce passé familial, l'histoire de son grand père et de son frère, son grand oncle. Une enquête minutieuse, associée à ses souvenirs, aux conversations avec ses parents, pour comprendre et nous faire partager cette histoire familiale mais aussi une partie de cette histoire de l'immense Turquie, qui s'étendait avant la Première Guerre mondiale bien au delà de ses frontières actuelles...c'était avant la création des actuels Syrie, Irak, Liban, Palestine, Jordanie, Yemen, de la Grèce dans ses frontières d'aujourd'hui....

C'était un vaste territoire de tolérance dans lequel la religion était une affaire personnelle, où chaque religion était acceptée, plusieurs religions pouvant se côtoyer au sein d'une même famille, d'un même couple...comme dans toute la famille d'Amin Maalouf.

C'était il y a un siècle.

Deux frères aux profils différents, un grand père poète, amoureux des mots, de culture, de la Connaissance et d'éducation, créant des écoles ouvertes au plus grand nombre, dans l'actuel Liban, et un oncle, cherchant à s'enrichir, parfois par tous moyens, au delà des frontières en Amérique et à Cuba. Deux frères qui entretiennent avec les leurs et entre-eux une correspondance importante, correspondance d'amour et de querelles parfois.

Amin Maalouf ira à leur rencontre, courra le monde pour retrouver dans les archives des États américains, ou cubains la trace de leur arrivée, de leur passage, de leur vie, et dans les journaux de l'époque, l'histoire de leur vie, de leur mort, traces, courriers et vieux bâtiments qui lui permettront de mieux connaître ainsi la mémoire de la famille Maalouf, une famille ouverte sur le Monde.

Que reste-t-il de ce passé de cette fortune de son grand oncle..les problèmes familiaux sont passés par là...les décès brutaux ont exacerbé l'avidité de certains....dans cette famille aussi

L'occasion pour nous de lire un roman familial d'amour et de découverte du passé

J'ai lu ce livre, ces moments d'histoire familiale et d'Histoire avec grand plaisir, l'écriture d'Amin Maalouf attaché à ses racines est toujours aussi envoutante, et je l'ai quitté avec un sentiment de vide : que sais-je de mes grands-parents, de mes grands oncles et tantes..? Je ne dispose malheureusement pas d'une correspondance importante, je n'en sais que ce que m'ont dit mes parents, je n'ai que ces souvenirs d'enfance faits de tendresse, et ces querelles familiales aussi...et que vais je faire pour le transmettre à mes enfants et petits-enfants ?

Je ne pense pas être le seul.

Parmi tous les extraits de livre qui m'ont touché je retiendrai ce passage qui devrait pousser chaque lecteur à être un trait d'union entre ses anciens et ses enfants : "La présence des vieilles personnes est un trésor que nous gaspillons en calories et boniments, puis nous restons à jamais sur notre faim ; derrière nous des routes imprécises qui se dessinent un court moment, puis se perdent dans la poussière. Certains penseront : Et alors ? Quel besoin avons-nous de connaitre nos aïeuls et nos bisaïeuls ? Laissons les morts, selon une formule galvaudée enterrer les morts et occupons-nous de notre propre vie ! Aucun besoin pour nous, il est vrai, de connaître nos origines. Aucun besoin non plus pour nos petits-enfants de connaitre ce que fut notre vie. Chacun de nous traverse les années qui nous sont imparties, puis s'en va dormir dans sa tombe. À quoi bon penser à ceux qui viendront après nous puisque pour eux nous ne serons plus rien. Mais alors si tout est destiné à l'oubli, pourquoi bâtissons-nous, et pourquoi nos ancêtres ont-ils bâti ? Pourquoi écrivons-nous, et pourquoi ont-ils écrit ? Oui dans ce cas pourquoi planter des arbres et pourquoi enfanter ? À quoi bon lutter pour une cause, à quoi bon parler de progrès, d’évolution, d'humanité, d'avenir ? À trop privilégier l'instant vécu on se laisse assiéger par un océan de mort. À l'inverse en ranimant le temps révolu, on élargit l'espace de vie. Pour moi, en tout cas, la poursuite des origines apparaît comme une reconquête sur la mort et l'oubli, une reconquête qui devrait être patiente, dévouée, acharnée, fidèle." (P. 259-60)


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Le rocher de Tanios

Un beau roman prenant pour cadre le village libanais de Kfaryabda dirigé par un cheikh amateur de femmes…il demande régulièrement aux femmes de son village de lui apporter quelques fruits ou quelques douceurs au moment de la sieste, et tout le monde sait qu’il est père de nombreux enfants dans le village. Et un jour il demande à la belle Lamia, épouse de son intendant Gérios de lui apporter des fruits pendant sa sieste.

Quelques mois après naît un garçon, qu’il prénomme comme si c’était son propre fils Abbas. Heureusement les parents arrivent à donner à cet enfant le prénom de Tanios…Il n’en fallait pas plus pour semer un doute jamais éclairci dans l’esprit de chacun: qui est le vrai père de Tanios ?

Le lecteur va suivre la vie de ce gamin et son adolescence, racontée par un ancien du village le vieux Gebrayel, Tanios gamin sage et studieux, reconnaissable entre mille, ses cheveux blanchirent très tôt, s’accordant ainsi très bien avec sa sagesse naturelle.



En suivant la vie et les aventures de ce personnage principal du roman, le lecteur assistera à l’arrivée des anglais qui prennent pied dans ce Liban catholique en créant des écoles, sans doute pour y implanter la religion anglicane, un Liban où s’exercent tour à tour les pouvoirs de l’émir, du patriarche catholique, du curé du village…et de sa femme, des idées révolutionnaires venant de France….un Liban féodal sous influences turques et égyptiennes, un Liban d’amour et de violences, de meurtres, d’intrigues, de trahisons et de guerres, d’alliances, de mésalliances et de ruse, un Liban communautaire où druzes et catholiques cohabitent mais peuvent d’affronter

Et dans les dernières pages nous apprendrons pourquoi tous les rochers ayant un nom, il est interdit de s’asseoir sur le Rocher de Tanios

S’appuyant un fait historique qu’Amin Maalouf nous dévoile à la fin du livre, il précise « ..tout le reste n’est qu’impure fiction »

Pour le vieux Gébrayel narrateur : « Les faits sont périssables, crois-moi, seule la légende reste, comme l’âme après le corps, ou comme le parfum dans le sillage d’une femme », alors suivez le parfum de cette « impure fiction », prix Goncourt 1993, le talent de conteur d’Amin Maalouf qui étourdit le lecteur, le séduit, lui donne de belles heures de lectures.
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