Je sors du dernier roman de
Thilliez comme d'un premier date avec une personne qui t'aurait vendu du rêve pendant des mois sur une appli de rencontre et que la réalité d'une conversation autour d'un repas mal assaisonné aurait rendu fadasse.
Je savais d'emblée qu'il n'y aurait ni
Sharko, ni Hennebelle dans cette nouvelle intrigue policière donc pas de surprise de ce côté-là. Mais j'ignorais que l'ensemble du roman allait se montrer aussi peu original que la quatrième de couverture : « Dans l'univers hostile du Grand Nord, personne ne vous entend crier. » Ouais… on a visiblement préféré « l'univers hostile » à « l'Enfer » pour ne pas tomber dans le poncif, mais on n'a pas hésité à chourrer l'accroche publicitaire d'Alien pour pas trop se casser la tête. N'aie crainte, ici, pas de petits extraterrestres impatients de te sortir du bide pour voir les tronches hallucinées de Sigourney et de ses potes, mais seulement une jeune femme assassinée près d'une réserve autochtone dans une ville minière très isolée du Grand Nord québécois,
Norferville. le père de la demoiselle, un détective criminologue lyonnais quitte la France pour se rendre directement sur place et mener l'enquête aux côtés d'une flic métisse originaire de la ville susmentionnée mais qui l'a quittée adolescente après avoir subi des violences sexuelles.
Voilà, voilà. Partant de là, on a un papa plutôt beau gosse, mais forcément au passé bourré de traumatismes, qui ne pourra pas renouer avec sa fille qui avait coupé les ponts depuis la mort de sa mère (c'est triste), et une flic elle-aussi jolie et elle-aussi meurtrie par son passé, qui compte bien résoudre l'enquête et découvrir aussi qui sont les trois salopards qui l'ont violée 20 ans auparavant (c'est triste aussi). L'essentiel du roman s'attarde donc sur… la météo. C'est fou ce qu'il vente, ce qu'il neige, et ce qu'il fait « frette » dans le grand Nord québécois ! OK, le décor est planté, les protagonistes vont se les geler pendant plus de 400 pages, mais les descriptions climato-paysagères récurrentes finissent par lasser et aboutisse ce que l'on redoute le plus dans un polar, l'ennui. Coupable identifié ? Tout est bien qui finit b… Taratata… Comme il reste 150 pages, et que tu n'es pas trop teubé, tu sais que ce n'est pas fini… On ne te la fait pas. L'enquête continue, il fait toujours froid, et finalement, en 10 pages, tout est bouclé. Celui ou ceux que tu soupçonnais quasiment dès-le-départ-mais-ce-serait-un-peu-gros s'avère sans surprise les pas-gentils, le beau et la belle se bécotent depuis un bon moment parce-que-quand-même-il-faut-du-love et fin.
Bref, déception que ce
Norferville de la part d'un auteur que j'apprécie énormément. Alors d'accord, il y a eu certainement beaucoup de documentations pour construire de toute pièce la ville fictive de
Norferville et retranscrire la condition des autochtones et en particulier des femmes que veut dénoncer
Thilliez. Il écrit dans sa note finale aux lecteurs : « je voulais (…) proposer un roman d'ambiance où vous, lecteurs, seriez confrontés aux éléments et ressentiriez le froid à chaque page tournée. » Malheureusement, le froid, ça anesthésie et mon intérêt pour l'enquête l'a été, aussi insensible et rabougri qu'une mentule sortie d'une baignade hivernale en pleine Manche. Bref, cet opus m'aura laissé de glace. Vivement le prochain qu'on se réchauffe !