La société, et son agent psycho-social, la famille, ont à résoudre un difficile problème : comment briser la volonté d'une personne sans qu'elle s'en rende compte ? Et pourtant, par un processus compliqué d'endoctrinement, de récompenses, de punitions et par une idéologie adéquate, la société (et la famille), dans l'ensemble, vient si bien à bout de cette tâche que la plupart des individus croient suivre leur propre volonté sans se rendre compte qu'elle est elle-même conditionnée et manipulée.
Être égoïste, cela signifie que je veux tout avoir ; que posséder, et non pas partager, me procure du plaisir ; que je dois devenir cupide parce que mon seul but est d'avoir : plus j'ai plus je suis ; que je dois me sentir hostile à l'égard de tous les autres : mes clients que je dois tromper, mes concurrents que je désire éliminer, mes ouvriers que je veux exploiter. Je ne peux jamais être satisfait parce que mes désirs sont sans fin ; je dois envier ceux qui ont plus que moi et avoir peur de ceux qui ont moins.
Mais la plupart des gens estiment qu'il est trop difficile d'abandonner leur orientation " avoir "; toute tentative dans ce sens éveille chez eux une angoisse intense, et ils ont l'impression de n'être plus du tout en sécurité,
comme si, ne sachant pas nager, ils étaient précipités dans l'océan.
Ils ne savent pas qu'à partir du moment où ils ont renoncé à la béquille de la propriété, ils peuvent commencer à se servir de leurs propres forces et se mettre à marcher tout seuls.
Derrière la façade chrétienne se lève une nouvelle religion secrète, la « religion industrielle » qui est enracinée dans la structure de caractère de la société moderne, mais qui n'est pas reconnue comme « religion ». La religion industrielle est absolument incompatible avec le christianisme authentique. Elle fait des individus les esclaves de l'économie et du machinisme qu'ils ont construits de leurs propres mains.
On peut en dire autant des mariages. Qu’ils soient fondés sur l’amour, ou, comme les unions traditionnelles du passé, sur les convenances sociales ou sur la coutume, les couples qui s’aiment vraiment semblent être l’exception. Ce qui n’est que convenance sociale, usage, communauté d’intérêts économiques, souci partagé des enfants, dépendance mutuelle ou haine et peur réciproques est consciemment expérimenté comme " amour " - jusqu’au moment où l’un des partenaires, ou les deux, se rendent compte qu’ils ne s’aiment pas et même qu’ils ne se sont jamais aimés.
Fabrice Midal, directeur de la collection L'Esprit d'ouverture des éditions Belfond, présente le livre "L'Art d'aimer" d'Erich Fromm.
Pour Erich Fromm, éminent psychanalyste, l?amour est un art qui s?apprend et se cultive. Accessible, lumineux, profondément humaniste, "L?Art d?aimer" est un ouvrage majeur, un classique indispensable, plus que jamais en résonance avec notre époque.
Lire un extrait de "L'Art d'aimer" : http://bit.ly/1GJN04S
http://www.espritdouverture.fr