Juste un bouquin sur les Borgia parmi d'autres ? Oui et non.
Que trouver dans celui-ci qui n'a pas déjà été dit, supposé, détourné ?
Parmi les plus connus : un Dumas trop factuel, sans souffle (un comble pour lui !), Hugo et sa Lucrèce sublime mais bien loin de la réalité, Puenzo qui s'englue dans ses fantasmes mafieux. Sans compter la série canalplusienne.
Vazquez Montalban se concentre ici sur le côté politique, ou plutôt son envers fait de tractations, trahisons, coups d'éclats, meurtres et bassesses.
Si nous suivons évidemment Rodrigo Borgia dans son ascension sur le trône papal et le destin de ses enfants, le roman se veut plus large, avec une incursion dans le passé et le premier pape Borgia, Alphonse, jusqu'à la fin de l'arrière-petit-fils de Rodrigo, François Borgia. Un saint issu de cette famille!
Tous les enfants semblent les pions de leur père, sans réel pouvoir de décision. Tous, sauf César qui va au-devant de son destin, le provoque même. Fougueux, impulsif, calculateur, possiblement fratricide, il quitte rapidement sa défroque de cardinal pour un attirail de guerrier et de conquérant. Car le rêve secret
De César et de son père est de créer un véritable état pontifical à force d'annexions, prélude à une utopique unité italienne.
L'action contée au présent déroute pendant quelques pages mais constitue un parti pris qui tourne à son avantage sur la durée.
En plus de quelques personnages (très) secondaires bien connus comme Savonarole, Machiavel ou
Léonard de Vinci, des ombres fugaces apportent un petit plus historique et ancrent le roman dans une époque : des Rois catholiques espagnols à Jeanne la folle, de
Michel Ange à Julia Farnèse, en passant par
Thérèse d'Avila ou
Ignace de Loyola.