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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Chères amies, chers amis, lectrices et lecteurs (et oui, je m'épargne la fainéantise de l'écriture inclusive… hé hé !), voici ma contribution de l'été pour vous encourager, non !, vous exhortez !, à découvrir (ou redécouvrir si vous l'avez déjà lu et rangé loin de vous), le texte de Jean VERCORS : le Silence de la Mer.
Les livres fleurissent de nos jours, comme autant de petits champignons agglutinés autour des grands arbres que sont les maisons d'édition. Et on appelle littérature des textes à la poésie facile, voir douteuse ou même inexistante. le silence de la mer n'est ni un texte récent ni un texte exsangue de poésie.
Passer une émotion comme on passe un savoir n'est pas chose facile. Transmettre l'amour, l'espoir, la peur, la révolte et arroser l'esprit de la lectrice ou du lecteur de ses larmes, l'éclairer des éclairs de sa colère et l'apaiser du baiser de son espoir, n'est pas donné à tous les écrivains.
Jean Vercors parvient dans ce texte, ce petit texte, cette nouvelle, à garder tant de réserve, à cultiver les silences, à broder les regards, à le faire avec force et pudeur.
Il y a celui et celle qui aiment la France parce qu'ils y sont nés, et celui qui l'aime de la découvrir mais qui vient pour la conquérir ; et il y a tous ces mensonges dont il se berce pour justifier cette conquête avec des mots et des idées qu'il agite, dont il aimerait se convaincre lui-même, mais qui se font juste l'écho d'un vide, d'un néant…
Dans ce texte de Jean Vercors, il s'agit de lire un amour impossible, une amitié interdite, qui aurait pu être intense et lyrique, romanesque même, alimentée de discutions et de débats, mais voilà… C'est la guerre ! Et la guerre ne justifie aucune conquête quand bien même on aime la terre que l'on découvre. Et la guerre s'oppose à l'amitié, quand elle veut rassembler deux êtres qui servent les drapeaux qui s'affrontent.
J'ai été bouleversé par les mots de Vercors, et plus encore par les silences entre les mots, par les espaces, par tout ce qu'il sait dire sans l'écrire et qui nous laisse hébété, essoufflé, pantelant. Tout ici est étrangement moderne, singulièrement actuel, dans un monde où 79 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, on retrouve la haine, la peur, l'agglutinement des pensées derrière des pensées uniques et des discours chargés de poings qui frappent des tables.
« Une bonne guerre » ça n'existe pas.
Et des textes comme ceux de Vercors nous le rappellent. le Silence de la Mer est un texte, et aussi un recueil de nouvelles, qu'il faut, absolument, bien évidemment, lire aussi !
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Pour qu'un livre vous bouleverse, le nombre de pages importe peu. Pour ma part j'ai eu des émotions très fortes avec « Guerre et paix », ou » le Docteur Jivago », ou pour rester français avec « Les Misérables » ou « Germinal » (pour donner quatre exemples « classiques ») j'en ai eu également avec des livres qui n'étaient pas des pavés, comme « Terre des hommes » ou « Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur » ou plus près de nous « Un long dimanche de fiançailles » ou « Ensemble c'est tout » … Vous me direz, c'est affaire de sensibilité, nous ne réagissons pas de la même façon devant les mêmes choses, et puis c'est la force, l'intensité de ce qui est écrit qui compte. Et vous aurez sans doute raison.
Voici un exemple de texte court, très court (34 pages très exactement) qui vous cloue à votre fauteuil, vous prend aux tripes et vous oblige non seulement à vous poser des questions, mais encore à trouver en vous des réponses…
Werner von Ebrennac est un officier allemand que les circonstances de la guerre obligent à se loger chez un vieil homme, le narrateur, qui vit avec sa nièce, une jeune fille. Werner est jeune, beau, cultivé, musicien, il met un point d'honneur à garder une courtoisie absolue, il bannit toute attitude de conquérant ou d'occupant. Bien au contraire, il parle de son amour pour la France, en tant que pays, nation et surtout en tant que culture. Face à lui il ne trouve qu'un mur de silence. Pas d'hostilité, rien que du silence. C'est une forme de résistance, farouche, à la fois impitoyable et absurde. L'officier peut d'un geste y mettre fin. Mais il ne le fera pas, il a une hauteur d'âme, un besoin de fraternité qui lui interdit toute violence. Cette situation est pathétique, car c'est une impasse pour les trois personnages. Pour l'officier d'abord qui voit ses efforts de conciliation réduits à néant. Et aussi pour l'oncle et la nièce qui n'ont rien à gagner dans cette attitude : la « victoire » de le voir partir à la fin de la nouvelle a un goût amer.
Il y a silence et silence. Celui qui préside ici, plus que le silence neutre est peuplé de non-dits. On sent qu'il suffirait de peu d chose pour que la situation se débloque. En écoutant les monologues de Werner, on ne peut qu'être ému de cette constance à essayer de tenter un dialogue (indirect, car il ne s'adresse jamais personnellement à ses interlocuteurs) et cet entêtement à se taire de l'oncle et de la nièce (qui par effet de miroir renvoie à l'entêtement à parler d'Antigone, aussi absurde, aussi inutile) est également émouvant dans sa puérilité.
Car peut-on parler de résistance passive dans ce cas de figure ? le fait que la nouvelle ait été éditée en pleine Occupation par des combattants de l'ombre, pousse certes à accepter cette explication, mais en y regardant bien, nous avons ici une situation qui pour être hautement dramatique, est assez peu crédible : un officier allemand de cette culture et surtout animé de cette envie de partage, peut-il accepter le travail qu'il fait ? L'oncle et la nièce sont-ils conscients de jouer avec le feu ? Il suffirait qu'un autre allemand entre dans la pièce pour qu'ils soient obligés de briser le silence.
On peut peut-être voir les choses un peu différemment, comme un appel pacifiste (Vercors, avant la guerre et jusqu'à ses débuts dans la Résistance, était foncièrement pacifiste) qui malheureusement tombe à plat pour cause d'intransigeance ou pour le moins d'incommunicabilité.
Finalement ce qui nous émeut profondément, ce qui donne à cette nouvelle sa grande force émotionnelle, c'est que l'auteur déclenche en nous une grande pitié pour ces personnages, pour lesquels on aurait souhaité certainement un meilleur sort.
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Terribles nouvelles sur l'occupation de la France et le sentiment atroce de voir son pays vaincu, et livré à l'ennemi. Que faire quand celui-ci se montre courtois et respectueux? Se montrer courtois avec lui en retour? Ne rien faire? Résister à chaque instant, par tous les moyens, avec toutes les parcelles de son corps et de son âme?
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Une ouvre profonde que cette sorte de huis clos entre une famille française et un officier allemand. La révolte gronde dans ce silence de combat contre la folie nazie. On devine dans ce roman (ce n'est pas le seul de l'auteur, contrairement à ce l'on pense parfois) toute la déchirure qu'a été pour lui l'abdication de 1940. Vercors illustre ici le mot de Thucydide : "De toutes les manifestations de puissance c'est la retenue qui impressionne le plus". Paradoxalement eu égard à la situation décrite, il y a dans chaque personnage de la famille contrainte une sérénité, une noblesse qui vous emporte. On devine l'espoir viscéral du succès de l'intelligence de coeur sur la barbarie au bout de l'épreuve de l'Occupation. Si les armes détruisent le matériel, elles sont impuissantes face à la résilience. de bien belles pages.
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Le Silence de la Mer, dans l'édition de poche, est une nouvelle donnant son nom à un ensemble de textes. C'est le plus célèbre de Vercors, ça n'est, néanmoins pas, à mon sens, le meilleur, aussi bien du point de vue de la valeur littéraire que de la charge émotionnelle qui s'en dégage. Il ne fut pas exempt de critiques à sa parution.

Un officier allemand prend ses quartiers dans une famille française, le narrateur et sa nièce. Ces derniers adoptent l'attitude de la défense passive, non pas en occultant les fenêtres, mais en opposant un silence inexorable aux avances du soldat. On ne peut rien reprocher à ce dernier, si ce n'est sa qualité d'envahisseur : discret, d'une extrême politesse, raffiné. Devant son public réfractaire, il affirme tout son attachement pour la France, l'admiration qu'il porte pour sa culture. Comme si l'assassin prononçait in persona l'oraison funèbre de sa victime. Il proclame que cette défaite est en fait l'aube de la renaissance de leur pays, de l'amitié fraternelle et indissoluble des deux peuples belligérants pour la grandeur de la civilisation européenne. L'officier semble ignorer tout du dessin des nazis, ça n'est pas particulièrement crédible et puis cette défense par le mutisme c'est bien le moins que l'on puisse attendre d'une famille française même s'il s'agit d'un oncle plus tout jeune et de sa nièce. On voit en quoi Vercors a prêté le flanc à la critique.

L'ensemble des textes réunis ont trait à la Seconde guerre mondiale, à l'occupation. Ils ont été écrit durant cette période même. Ils ont valeur d'engagement politique et de témoignage. On est ému de la naïveté de certains personnages, la nausée vous prend face à l'abjection de certains autres. La Marche à l'étoile est un récit bouleversant qui narre l'amour inconditionnel de Thomas Muritz, jeune morave, pour la culture française, sa civilisation, son humanisme, partant par les chemins rejoindre son pays d'élection, pour y trouver quelques décennies plus tard son terrible destin, par l'entremise des représentants de l'ordre d'un pays dévoyé qu'il aima jusqu'au bout d'un l'amour exclusif de jeune homme.

Voici bien un livre qui mériterait de figurer sur les listes de lecture de tout les collèges de France. Je l'ai apporté durant un séjour à Rouen, théâtre du sacrifice ultime de la Pucelle d'Orléans. Au vu de tous ses monuments, imprégné de la présence impalpable de cette incarnation de la France résistante, j'étais dans les meilleurs conditions pour être réceptif au présent volume. Je fus pris, je le confesse bien volontiers, d'un élan irrépressible et un peu naïf de patriotisme. Une oeuvre forte.
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Vercors : le Silence de la Mer, précédé et suivi de quelques autres récits : 7 nouvelles dont la plus connue : le Silence de la Mer.
27 critiques, 29 citations de lecteurs(trices) de Babelio, toutes élogieuses. Qu'ajouter ? Ce livre de 1942 fera connaître, peut-être aux jeunes générations ce texte petit par sa brièveté mais grand par l'émotion.
En quelques mots : un vieil homme et sa nièce sont contraints de loger dans une chambre de leur maison un officier allemand féru de culture française. A ses tentatives d'approche, pleines de tact, au cours d'un monologue, chaque soir répond un silence farouche, des visages fermés.
Six mois s'écouleront jusqu'à ce qu'un événement survenu dans la vie de l'officier rompt ce lourd silence par un seul mot échangé entre l'officier et la jeune fille "adieu"...
J'ai relu ce livre plusieurs fois, et à chaque fois j'ai ressenti la même émotion.
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J'ai redécouvert ce livre par hasard sur les étals d'une librairie, trente ans après l'avoir lu, en avoir présenté un extrait au bac français aussi (Les adieux de l'officier qui concluent "Le silence de la mer") et l'avoir aussi offert à un ami, tant cette lecture m'avait remué à l'époque de mes jeunes années et de mes cours de littérature et d'histoire... Sa relecture m'a été très profitable car je n'en avais plus qu'un vague souvenir, (sauf de certains passages qui m'avaient particulièrement marqués comme celle de l'histoire de "Ce jour-là" avec le petit garçon qui comprend à sa façon ce qui est en train de lui arriver, ou encore de "La marche à l'étoile" dont je ne me souvenais que de la fin tragique. La première nouvelle est la plus connue bien sûr mais toutes gagnent à être lues et partagées ; bien sûr le thème central de toute l'oeuvre est l'occupation de la France par les nazis pendant la seconde mondiale mais à chaque fois c'est sur un mode différent qu'il est décliné, le seul petit bémol que l'on pourrait faire c'est le pessimisme ambiant qui transpire à chaque page et dans la conclusion de chacun de ces récits, bien sûr c'est à la véracité et à l'authenticité du contexte historique que l'on doit cela et c'est finalement aussi bien ainsi. J'ai extrait une citation de la nouvelle "L'impuissance" qui à mon sens vaut pour tout le recueil et fait sortir l'âme humaine de la noirceur de cette époque que l'on peut pourtant transposer à tout autre temps de guerre n'importe où ailleurs sur la planète : "L'art seul m'empêche de désespérer (...) Nous le voyons bien que l'homme est décidément une assez sale bête. Heureusement, l'art, la pensée désintéressée le rachètent".
J'ajoute que cette nouvelle édition augmentée présente l'auteur Jean Bruller (alias Vercors) d'une façon tout à fait inédite et que l'on a à la fin du recueil toute l'histoire de la création des éditions de Minuit et de cette oeuvre qui est l'un des fers de lance de la résistance intellectuelle pendant les années d'occupation, un véritable témoignage historique donc, et un petit chef-d'oeuvre aussi, tant d'un point de vue historique que d'un point de vue littéraire.
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Après la publication en 1942, dans la clandestinité, du « Silence de la mer » signé Vercors, un recueil de six nouvelles portant le même nom prolongé par un « et autres récits » va paraitre aux éditions de minuit.
Parmi ces textes, on retrouve bien sûr le bouleversant « Silence de la mer » qui a eu un très grand succès mais aussi un autre texte essentiel « La marche de l'étoile ». Vercors était très attaché à ce récit, vibrant hommage à son père Louis Bruller.
Vercors raconte la vie de Thomas Muritz, jeune Hongrois nourri de culture française qui précipite son destin vers la France, pour lui terre de Justice et de Liberté. Mais il va y mourir abominablement trahi par sa patrie d'élection.
La construction du texte est intéressante, comme un témoignage ou un chant d'éloges à Thomas Muritz. le narrateur ainsi que tous ceux qui l'ont côtoyé, famille ou amis, dressent son portrait. Comme l'oncle Béla qui raconte la jeunesse studieuse de Thomas Muritz en Hongrie où il va découvrir la France par le biais de ses lectures. L'éclat spirituel de ce pays est en effet symbolisé par « Hugo, Alexandre Dumas, Balzac, Eugène Sue », écrivains que le jeune garçon sacralise.
Cette valeur que Thomas donne à l'art est récurrente sous la plume de Vercors. Celui-ci n'est pas l'unique personnage à glorifier ainsi l'art : dans « le silence de la mer », l'officier allemand Werner von Ebrennac voit aussi dans la littérature française l'incarnation de ce pays.
Les autres nouvelles de ce recueil ont également leur intérêt. Et tous ces textes sont passionnants tant par le thème récurrent, la seconde guerre mondiale et son impact sur la vie des gens pendant l'occupation, que par le très beau style de l'auteur.


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Relisant le silence de la mer après vingt ans, je m'aperçois que je n'en ai oublié quasiment aucune phrase... Les longs monologues de l'officier allemands, dont je ne me souvenais plus ne sont en fait pas dans le texte ! Un nouvelle difficile à commenter donc, tant chaque élément, dans une sobriété intense, s'ajuste parfaitement à sa place. Grand texte de la Résistance française, le silence de la mer peut également, avec le recul, être lu plus largement comme un éloge de la résistance au sens large, celle qui refuse la compromission et l'abandon des valeurs par les moyens les plus infimes - le silence imposé à quelqu'un qu'on pourrait admirer...
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[...] l'histoire raconte comment un vieil homme et sa nièce se murent dans un silence profond et consternant face à un officier allemand logé chez eux. le mutisme sera, pour eux, une manière de résister à l'oppression. Bien sûr, Werner von Ebrennac n'est pas une brute fanatique et sanguinaire. Encore moins un nazi convaincu. C'est un allemand courtois, cultivé, intelligent et esthète, qui aime la France et ses grands auteurs, son histoire aussi. Mais il est l'occupant, et même s'il a droit au respect, aucun dialogue n'est possible dans ces conditions. La résistance de l'oncle et de la nièce se fera dans un mur de silence, une obstination forcenée à refuser d'entrer en contact avec l'ennemi, fût-il érudit.
Lien : http://dunlivrelautredenanne..
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