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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
L'onirisme qui se dégage de la couverture est à l'image de celui que nous ressentons dans le livre. « Oiseau » du norvégien Sigbjørn Skåden nous donne l'impression de rêver, un rêve en noir, blanc et rouge, un rêve où le cours du temps est fluctuant, un rêve composé de multiples signes à interpréter comme ces obélisques, doigts inquiétants tournés vers le cosmos maintes fois présents, un rêve qui se termine de façon abrupte…quelle frustration cette fin, pourquoi ? Et ensuite ? Je ne peux m'empêcher d'imaginer une suite. D'imaginer les raisons de cette fin. Je tourne et retourne l'histoire dans tous les sens, et cette ambiance omniprésente qui me hante désormais.

« le paysage est aride et désert, seules quelques saillies rocheuses viennent percer le sable rouge, pas un brin de verdure, pas un mouvement, tout est statique, mort, sauf les bourrasques qui balaient le sable épais, fait non de grains mais de débris écarlates».

Ce livre de science-fiction se déroule sur une planète lointaine au sein du système solaire, nommée Home, sur laquelle l'eau a permis d'accueillir une poignée d'humains, des pionniers, ayant quitté la Terre alors menacée. Les chapitres alternent 2048, l'arrivée des premiers colons dont la petite Su, premier enfant à être né sur Home, et 2148 et la trentaine d'humains encore présents. Il n'est nullement question de vaisseaux spatiaux, nullement question de guerre des étoiles, de technologie poussée. Au contraire. C'est une vie simple, d'un certain dénuement, sans technologie, à laquelle nous sommes témoins sur Home, une vie sous cloche de verre dans un environnement de sable rouge, de roches noires, de plantes blanches, tâches claires dans tout ce rouge. Tableaux magnifiques sur lesquels l'auteur norvégien trace ces trois couleurs en aplats subtils, disjoints, sans entre deux, sans mélange. Les tempêtes de sable heurtent cette planète et ralentissent sa rotation, allongeant le cours du temps. Une planète silencieuse sur laquelle seule la lumière du soleil émet un bruit, un son comme un crépitement qui sape les êtres humains, leurs relations, les animaux quand il y en avait. Tous les sons sont étouffés, aucun bruit ne porte, de sorte que les humains communiquent entre eux en s'écrivant sur des tablettes ce qui ralentit la communication. La nuit, lorsqu'il fait noir, le cri de la terre, le crépitement, se tait et le silence total s'impose. de l'autre côté de la planète, il y a bien l'océan, mais à plusieurs jours de marche, où un spectacle grandiose attend les plus chanceux : des tourbillons s'agitent à fleur d'eau fronçant la noirceur de l'eau.

« Avec la nuit surgit le froid. La température chute d'un coup, et en quelques secondes, le paysage se couvre d'un voile blanc, comme si le souffle diffus du sol se transformait en une brume glacée. Il lévite un instant au-dessus du sable rouge, jusqu'à ce que la surface granuleuse gonfle dans le froid et que le brouillard se dissipe ».

L'arrivée de nouveaux terriens va bousculer la routine de ce groupe, notamment du trio formé par Persiles, sa mère et sa future, Angjir. Doivent-ils leur dire que depuis les pionniers, ils ont régressé ? Qu'aucun progrès ne s'est réalisé ? Que leur vie se résume à cultiver, manger, dormir ? Que veulent-ils ? Quelles sont leurs intentions ? Leur arrivée perturbe tous les principes qui guidaient leurs vies, la crainte et l'espoir de plus de liberté s'entremêlent et se bousculent. En effet, ils sont plus nombreux, et possèdent des biens comme des avions des appareils technologiques, des médicaments. Et même, même, une histoire d'amour flamboyante en noir, rouge et blanc m'aura fait rêver le temps d'un songe, le temps d'un fantasme…

« C'est avec le sentiment de plonger dans les deux grandes mares noires que forment ses pupilles au milieu de son visage qu'il la pénètre, elle bascule la tête en arrière, une large veine pulse en travers de sa gorge, gonfle à mesure qu'elle contracte les muscles, qu'elle courbe le dos ».

Le temps sur Home infuse dans le texte. L'auteur prend son temps, sorte de rêve éveillé, nous invitant à nous émerveiller, à regarder. Pas de grandes actions, pas de rebondissements. Sauf la toute fin. Même lorsque les personnages échangent entre eux, comme nous savons qu'ils prennent le temps de tout écrire, le temps de notre propre lecture en est modifié. Cette novella a vraiment son empreinte propre, ses couleurs, son rythme. Et surtout, son étrangeté.

« Oiseau » est une véritable réussite alliant contemplation, poésie et, étonnamment, une grande violence, entremêlant douceur, étrangeté et dureté. Ce livre m'a à la fois émerveillée et secouée. Frustrée aussi. C'était sans aucun doute le but de l'auteur. Mission réussie.


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Lire, c'est rêver, voyager, voir le monde, parcourir des distances infinies, aller à la rencontre des autres, de mondes qui ont existé ou qui n'existent pas encore.
Le roman de Sigbjorn Skaden un peu tout cela à la fois.

*
Avec « Oiseau », j'ai voyagé à la vitesse de la lumière pour trouver une nouvelle terre d'accueil.
Notre planète Terre, notre maison, est à l'agonie, à bout de souffle, épuisée par notre mode de vie insouciant, irrespectueux et nuisible.

C'est donc avec un serrement au coeur, les larmes aux yeux que j'ai choisi de la quitter, avec une trentaine d'hommes et de femmes, pour trouver une nouvelle terre d'asile.
Notre choix s'est porté sur la planète Sedes, que nous avons surnommée affectueusement « Home ». Notre nouvelle maison, vierge de toute présence humaine.
Remplissant toutes les conditions requises pour un nouveau départ, nous avons décidé de nous y installer.

La vie sur Home n'est pas facile, la terre infertile. Nous devons nous acclimater à la rigueur du climat et faire des concessions pour survivre.

« Dans la lumière matinale, tout ce qui nous entoure est d'une blancheur aveuglante. Pas une plante, pas âme qui vive, rien que les reliefs sableux, comme une mer en pleine tempête. »

Tout est à construire. Mais l'espoir est permis avec la naissance de la petite Su, la première petite humaine qui ne verra jamais la Terre. C'est notre rayon de soleil.

*
Le scénario est captivant, parfaitement maîtrisé, alternant deux moments très forts :
l'année 2048 marquée par l'arrivée des premiers pionniers sur Home et le début de la colonisation ; l'année 2148 avec l'arrivée de nouveaux colons, source d'espoir et d'inquiétude.

« Je pense juste qu'il faut être prudent, on ne sait pas comment ils réagiront quand ils découvriront notre façon de vivre et à quoi le quotidien sur Home ressemble réellement. »

Ce tempo crée un rythme assez lent, contemplatif et le lecteur découvre progressivement les mystères que cachent Home et ses habitants.

Et à mesure que la fin du récit se rapproche, l'espace se compresse en un huis clos captivant dont l'issue est incertaine.
Le dénouement m'a cueillie au vol, je ne l'ai pas vu venir, j'ai été balayée, emportée, catapultée, surprise par cette tempête que je n'avais pas vue déferler. Et lorsque j'ai refermé le livre, je me suis demandée si je n'avais pas rêvé.

*
J'ai été saisie par la beauté de cette planète.
Mais l'écriture douce et poétique ne peut dissimuler très longtemps la rudesse et la violence de cette planète traversée de tempêtes si puissantes qu'elles influent sur sa vitesse de rotation, modifiant le rythme des jours et des nuits.
La caresse des mots ne peut adoucir le contraste des couleurs qui immiscibles, s'entrechoquent, se percutent sans fusionner, entre les vagues de sable rouge et le noir des montagnes.

L'éclat des mots enveloppe Home d'un voile de silence, uniquement brisé par le crépitement de la lumière. Les hommes sont sourds à tout autre son. Les émotions, les sentiments passent alors par les non-dits, le regard, le toucher. Et j'ai été touchée par cette forme de dialogue, belle assurément.
Le choix des mots écrits sur des petites tablettes devient alors presque superflu, dérisoire, vide.

« Je me concentre sur Su. Ma petite Su. Sa poitrine se gonfle lentement dans son sommeil. Je me glisse tout contre elle, lui murmure combien je l'aime. Je pourrais le lui crier, mes paroles ne résonnent que dans ma tête, de toute façon. Mais je préfère murmurer. Et le silence ne tarde pas à s'imposer au fond de moi. L'obscurité me libère de la lumière. Couchée auprès d'elle, je la regarde jusqu'à trouver le sommeil. »

*
La construction de récit, particulièrement bien réussie, joue sur les contrastes de lumière et d'ombre, de silence et de bruit, de calme et de violence.
J'ai été envoûtée par la beauté rude de Home, la férocité des tempêtes qui se heurtent au dôme protègeant la petite communauté. J'ai été bercée par le souffle du vent, enrobée par ces aplats de couleurs sans dégradé. Je me suis adaptée à ce monde fait de silence.

Je vous recommande ce magnifique roman, beau et violent, poétique et âpre, émouvant et impitoyable, sombre et lumineux.

Pour finir, je remercie HordeduContrevent et Patlancien qui m'ont guidée vers cette magnifique lecture grâce à leurs superbes critiques.
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De temps en temps, il nous arrive de tomber sur des livres hors du commun, de petites pépites insoupçonnées. Oiseau de Sigbjørn Skåden est l'une d'entre elles. Publiée chez Agullo, dans la toute récente collection Agullo Court, c'est une lecture indispensable.

2048, Heidrun s'adresse à sa fille Su. Celle-ci est la première enfant née sur Home et représente l'avenir de l'humanité sur cette planète inhospitalière. 2147, un siècle plus tard, la colonie survit tant bien que mal, en vénérant les premiers arrivants. La routine d'une vie de labeur s'est installée. L'arrivée d'un vaisseau en provenance de la Terre va faire éclater cette fragile communauté. Entre espoir et méfiance, les sentiments des primo-arrivants sont partagés.

Ne lisez pas la quatrième de couverture car même si elle ne dévoile pas beaucoup plus d'informations, elle apporte quelques éléments supplémentaires sur le contexte et l'univers de l'auteur qu'il vaut mieux, à mon humble avis, découvrir par soi-même au cours de la lecture. Il suffit de se laisser porter et de savourer cette ambiance, quasi Weird, si particulière.

Oiseau est une novella contemplative et poétique dont il est très difficile de parler sans dévoiler les mécanismes du récit, sans risquer de rompre le charme de la découverte. Ce récit âpre et violent, qui ne peut laisser indifférent, sort des sentiers battus. L'auteur s'interroge, entre autres, sur la nature humaine et ses travers avec en point d'orgue une vision pessimiste (réaliste) de nos comportements même quand la survie est en jeu.

Pour conclure, Oiseau est donc une histoire cruelle naviguant entre poésie et mélancolie, tout en sous-entendus et en silences qui ne peut que vous émerveiller (et/ou vous secouer !).

Lien : https://les-lectures-du-maki..
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Autant roman d'anticipation qu'un roman de survie.

L'auteur pose de façon onirique et poétique la question des facultés d'adaptation de l'homme dans un milieu qu'il ne connaît pas.

J'ai été tenue en haleine du début à la fin.

Les personnages sont attachants même s'ils donnent cette impression de froideur.

Par contre, on referme ce livre en ayant encore 1000 questions sans réponse. J'ai vraiment du mal avec les fins ouvertes qui laissent envisager plusieurs possibilités.

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Oiseau est un court roman de science fiction écrit par l'auteur norvégien Sigbjørn Skåden et publié en version française en octobre 2021 chez Agullo.
Une petite communauté humaine évolue sur une planète vide, hostile par son absence quasi absolue de vie, son atmosphère irrespirable et ses propriétés physiques qui défient l'entendement. Sur ce monde, une micro-société s'est construite sous des contraintes de vie qui ont modifié profondément l'humanité en tant que mode de pensée. Et puis soudain, l'isolement est rompu.

Oiseau est un chef d'oeuvre de littérature SF. Un roman contemplatif et réflectif qui sonde la psychologie humaine et évoque l'avenir de l'humanité autant que ce qui en fait son essence même. Sa capacité de résilience, d'adaptation, son potentiel scientifique et aussi ses limites, ses tentations, ses pulsions, la puissance de sa volonté, ce qu'elle est capable de supporter pour assurer sa survie… Mais aussi l'inconséquence de ses comportements lorsque le désenchantement incontrôlé suscite le désespoir. Sigbjørn Skåden signe ici un roman de science fiction où l'écriture d'une saisissante et noire poésie nous transporte au beau milieu d'une tragédie d'outre espace, et commet l'un de ces livres dont on n'oubliera jamais la sensation qu'il nous a laissé au moment ou on l'a refermé.
Un pur chef d'oeuvre oui, absolument !

Chronique complète sur le blog !
Lien : http://les-carnets-dystopiqu..
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Drôle d'oiseau que cet Oiseau-là !

Avec ses 130 plumes, ses envolées lyriques, son environnement et son ciel maintes fois décrits, on peut dire qu'il ne s'y passe pas grand-chose.
Et pourtant... et pourtant…
Sitôt cette novella engloutie, une intensité folle me submerge.
C'est que, dans l'écriture de Skåden, tout est fort car tout est vrai. Et tout est vrai car tout est simple.

L'auteur nous ramène à l'essentiel, à ce qui seul compte à la fin : la vie et ses moments, l'Homme et ses penchants.

Le style est neutre et direct, la narration détachée. Et derrière l'apparente banalité des évènements rapportés se dissimule le génie de l'auteur, car il maîtrise à la perfection l'adage bien connu de l'écriture : ne pas dire mais montrer. de fait, ces 130 pages en valent bien le double, si l'on tient compte de ce qu'elles parviennent à véhiculer en nous. Ayant ressenti cet effet assez tôt, j'ai d'ailleurs réduit ma vitesse de lecture de moitié de façon à bien faire retentir chaque phrase dans ma tête et laisser le temps aux non-dits de produire leur pleine magie.

Le résultat fut pour moi plus qu'un coup de coeur : un coup de massue, tant la démonstration est simple, claire et puissante.

Je dois avouer que rien n'était gagné d'avance. J'ai ainsi mis plusieurs jours à passer les premières pages, butant sur quelques choix stylistiques, comme l'abondance des virgules, ou encore les dialogues dépourvus de tirets (d'autant plus gênants que le temps de la narration est le présent).
Avec le recul je dois bien reconnaître qu'aucun de ces aspects ne m'a vraiment gêné par la suite, et je pense que l'idée des dialogues fondus dans la narration est de produire une continuité uniforme de celle-ci, ou peut-être un moyen de faire relativiser la parole, compte tenu des caractéristiques de ce monde (à ce propos, je conseille au futur lecteur de ne pas lire le quatrième de couverture, pour la simple raison qu'il dévoile ces caractéristiques, sapant l'effort de l'auteur à nous les montrer sans nous les dire trop tôt).

Un dernier mot : si Oiseau a pour thème la colonisation d'une planète par les humains, celui-ci est traité de manière minimaliste (pour les besoins de la démonstration, et eux seuls). Ceux qui veulent de la SF pour la SF risquent de ne pas s'y retrouver.
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Des humains ayant colonisé une nouvelle planète évoluent dans un univers hostile, où ils ne peuvent recourir à l'oralité pour communiquer. Sans personne pour leur apprendre la langue des signes, ils parlent par messages écrits interposés, s'affichant sur les écrans recouvrant leur corps. L'existence est silencieuse, aride. Tout autant roman de survie que de SF, Oiseau de Sigbjørn Skåden interroge les limites de la fameuse « capacité d'adaptation » de l'être humain et la difficulté de vivre sans culture et sans passé, déraciné, non pas de sa région de naissance, mais de sa planète tout entière. Sans jamais évoquer frontalement les questions politiques et écologiques, qui traversent l'époque, Oiseau dresse pourtant en filigrane un portrait juste et pessimiste du devenir humain. La planète est nommée Home, mais pas dans le sens « home sweet home », plus dans l'idée d'une résignation, celle de faire d'un endroit détestable sa maison, parce qu'aucun autre choix ne s'offre à nous. L'univers est si riche, que le roman donne parfois l'impression d'être le prologue d'une immense saga à venir, rendant l'ensemble un chouia frustrant. Mais aux questions que se pose le lecteur, Sigbjørn Skåden sait toujours répondre avec une tournure poétique, qui touche dans le mille. C'est magnifiquement traduit du norvégien par Marina Heide. À nouveau une très belle réussite pour la collection Court de Agullo Editions.
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Comment parler de ce roman SF, étrange et volatil, t'en en dire pourrait lui nuire dans le cas présent d'un billet livresque ?
Nous sommes en présence de l'histoire d'une colonie survivant t'en bien que mal dont une présence nouvelle remettra en cause l'existence, t'elle qu'elle l'aura connu pendant un siècle..
Roman court et saisissant de poésie contemplative sur un décor époustouflant et inhospitalier d'une planète nommée Home. Roman de la survie sur une terre lointaine où est née un enfant de l'avenir ; un avenir certain ?

J'ai aimé ce livre triste, brutal, surprenant d'une SF différente, ou le questionnement sur la nature humaine reste toujours passionnant, dans une ambiance si particulière, l'auteur surprend.

Laisser-vous tenter, l'expérience y est douteusement réelle et réellement pessimiste, hélas, oui, évasive aussi, et savoureuse d'une écriture qui ne laisse pas indifférents.

Bienvenue sur Home.

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