Ainsi que le disait, si justement,
Victor Hugo : « Lire c'est voyager : voyager, c'est lire ».
Bibliophile depuis toujours, je lis pour étancher ma soif de connaissances mais aussi pour m'évader.
Que j'aurais aimé ne pas avoir à entreprendre ce voyage à travers «
Nos 14 novembre » de Aurélie Silverstre pareillement à celui que j'ai fait avec
Antoine Leiris et «
Vous n'aurez pas ma haine ».
Il y a des livres qui n'auraient jamais dû exister et ceux-là en font partie. Il y a des drames dévastateurs qui font sortir de l'anonymat des personnes qui s'en seraient bien passées. Nos auteurs sont deux d'entre-elles.
Pourquoi avoir, alors, entamé cette lecture qui ne s'annonçait pas comme un périple des plus joyeux ?
Tout simplement, pour rendre hommage à Madame Silvestre en particulier et à toutes les victimes de ces barbaries en général. Je n'étais pas habitée par du voyeurisme mais plutôt par un profond respect à son égard.
En cette veille de week-end, Matthieu, le compagnon d'Aurélie est content. Il part à un concert des Eagles of metal en lui promettant de rentrer tôt. Sauf que nous sommes le… vendredi 13 novembre 2015 et qu'il se rend au Bataclan. Il ne reviendra jamais laissant sa femme, enceinte de cinq mois, et leur fils, Gary, âgé de trois ans, seuls et désemparés.
La jeune mère, de trente-quatre ans, nous raconte sa survie dès le jour d'après la tragédie.
Tout d'abord, elle décrit ce cinquième jour de la semaine comme un vendredi des plus banals en n'omettant aucun détail : Son homme qui se lève le premier, l'instant à trois dans la salle de bain, le départ pour l'école, le boulot, le repas du soir en famille, un « je t'aime, à demain » d'un papa pour son enfant. Elle se souvient avec amour de ces instants comme étant ceux du calme avant la tempête et de cette nuit d'effroi qui va la plonger dans un chagrin incommensurable.
« Il ne reviendra pas. »
« J'entendrai l'ascenseur s'ouvrir dans le couloir à 19 heures, ce ne sera pas lui. »
« Mon téléphone sonnera à 13 heures, ce sera quelqu'un d'autre. »
« le café coulera le matin, ce sera une programmation automatique. »
« Je sentirai la cigarette dans la cour de l'immeuble, ce sera un voisin. »
« Il y aura un papier blanc sur la table de la cuisine le matin, ce sera la liste des courses établie la veille, pas un mot griffonné avant de partir. »
Quelles belles phrases pour illustrer l'absence ! Telles sont les expressions employées par notre auteure pour nous expliquer l'irréversible. A travers ces mots simples, d'un réalisme glacial, mais néanmoins bouleversant quant à leur sens, on mesure le vide abyssal laissé par la perte de celui qu'elle aime et son influence sur le quotidien.
Ce récit relate le choc qui se produit dans une vie harmonieuse. On comprend la douleur émotionnelle ressentie par la maman pour elle-même mais aussi pour son petit bonhomme. Elle nous explique qu'elle est véritablement devenue mère le matin où elle a dû lui annoncer que son père était mort.
Ceci étant dit, il ne faut pas croire que ce bouquin n'est que larmes et déchirement.
Avec des mots choisis admirablement, Aurélie s'efface pour mettre en avant son « amoureux » Elle dresse le portrait de la personne qu'il était pour que ses souvenirs ne disparaissent à jamais.
C'est un livre-testament pour que ses enfants apprennent à le connaître : « C'est une belle place, un livre, pour un mort ».
Elle a choisi le chemin de la vie et du bonheur avec la naissance de Thelma trois mois après la tragédie. « La vie après la mort et non plus la mort après la vie. »
Elle refuse d'être une victime collatérale des attentats.
C'est une véritable leçon de courage, de force écrite avec une plume juste, sincère, sans pathos.
Bien sûr, j'ai pleuré, j'ai souri mais j'ai surtout admiré son envie d'aller de l'avant sans oublier pour autant.
Bouquin lumineux qui se lit d'une traite. A lire nécessairement !
Bonne chance à cette petite famille et qu'elle soit heureuse à nouveau !
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