Après la lecture de cette riche et concise biographie de l'âme damnée de la Révolution, et au-delà, j'ai écrit un article autour de ce personnage toujours aussi incandescent dans la mémoire collective, laquelle s'accommode trop souvent de raccourcis simplistes et anachroniques. Car
Robespierre est de ces figures mythologiques de l'Histoire des hommes qui demandent une acceptation de la complexité pour les comprendre, loin d'un monolithe sans nuance et effroyable tel qu'Hitler.
Je disais, dans mon article, entre autres, ceci :
{Le 28 juillet 1794, ayant comparu devant le Tribunal révolutionnaire,
Maximilien Robespierre était exécuté avec les « robespierristes » après une arrestation violente à l'Hôtel-de-Ville de Paris, au cours de laquelle il aurait soit tenté de se suicider, soit reçu une balle dans la mâchoire tirée par le gendarme Méda, selon les versions. Mâchoire retenue par un bandage que le bourreau arrachera sans ménagement sur l'échafaud, découvrant aux yeux du peuple une blessure hideuse.
Robespierre – qui, jadis, prononça devant le lycée Louis-le-Grand, où il était élève, un éloge du roi
Louis XVI qui passait par là : ironie de l'Histoire ! – est un homme politique peut-être sombre et controversé du roman national ; il n'en est pas moins d'une envergure indéniable. On pourra gloser sur sa froideur, sa cruauté, mais il est essentiel de mettre sa politique en parallèle avec la situation d'alors : la France est attaquée aux frontières par une coalition de puissances étrangères ; à l'intérieur, elle subit l'insurrection vendéenne (dont il ne faut pas ignorer au passage la quasi génocidaire répression) ; la Révolution est incapable de mener une politique unitaire, les factions s'entredéchirant. Dans ce maelstrom de l'Histoire, l'avocat d'Arras reste un fervent patriote […].
Croyant en un Être Suprême – donc en Dieu –,
Robespierre fustigera la déchristianisation de la France comme contre-révolutionnaire, rappelant en même temps le principe de la liberté de culte. Il savait aussi certainement qu'on ne détricote pas le passé d'une Nation au risque de la précipiter dans le chaos. Chaque Nation possède un socle sans lequel on ne peut rien construire de viable.
Et si, exalté par sa propre voix, il a initié la dictature de la Terreur, résumer
Robespierre à un remplisseur de charrettes pour la guillotine est un peu léger. […]
Robespierre demeure un personnage, non pas idéal – parce qu'il a à répondre devant l'Histoire de ses excès meurtriers –, mais cependant majeur ; pris dans une tourmente collective immense, il en a toujours appelé à la République une et indivisible.
Pour conclure, laissons-lui le mot de la fin à travers deux extraits de son dernier discours, prononcé le 26 juillet 1794, riches d'enseignements et douloureusement d'actualité :
“Dirons-nous que tout est bien ? Continuerons-nous de louer par habitude ou par pratique ce qui est mal ? Nous perdrions la patrie. Révélerons-nous les abus cachés ? Dénoncerons-nous les traîtres ? On nous dira que nous ébranlons les autorités constituées, que nous voulons acquérir à leurs dépens une influence personnelle. Que ferons-nous donc ? ” […]
“ Je suis fait pour combattre le crime, non pour le gouverner. le temps n'est point arrivé où les hommes de biens peuvent servir impunément la patrie; les défenseurs de la liberté ne seront que des proscrits, tant que la horde des fripons dominera. ” }