En janvier 1947, l'hiver est particulièrement rigoureux à Hambourg – à Paris aussi me raconta jadis ma mère qui venait de me mettre au monde - dont la plus grande partie des quartiers industriels et ouvriers n'est plus qu'un monceau de décombres.
Plus rien n'est débarqué dans le port pris dans les glaces : ni blé, ni charbon, ni pétrole, ni nourriture pour les rescapés et les milliers de « personnes déplacées » réfugiées, libérées des camps … Des cadavres étranglés retrouvés nus dans des trous d'obus gelés, impossible à enterrer, dans des caves dans divers points de la ville : un vieil homme, deux jeunes femmes, une fillette … Malgré une intense campagne d'affichage (il n'y a pas assez de papier pour imprimer les journaux) personne n'est en mesure de reconnaître ces corps, personne n'a signalé leur disparition …
L'enquête est confiée à l'inspecteur Frank Stave. Sous la supervision d'un jeune officier de liaison britannique -l'autorité d'occupation - et avec l'apport d'un flic de la police des moeurs. L'inspecteur est un homme sympathique, 43 ans, et comme tous, il souffre de la faim et du froid intense.
Jadis opposé au nazisme, il a la confiance des nouvell
es autorités policières et occupantes, en particulier du procureur qui s'avère un chasseur de nazis. Sa femme a trouvé la mort dans un bombardement, leur jeune fils a disparu après s'être porté volontaire pour le front de l'Est dans les derniers soubresauts du confit. Lui-même a été blessé à la jambe. le marché noir règne, seul moyen de survie.
L'enquête piétine. Toutes les pistes s'achèvent en cul de sac. Personne n'a rien vu, il fait si sombre si tôt parmi les monceaux de gravats.
Encore un polar dans les ruines – après ceux de
Philip Kerr,
Harald Gilbers,
Volker Kutcher et d'autres - parce que j'aime le peuple allemand et que malgré l'horreur de la période nazie, on ne dit jamais assez combien l'après-guerre fut dramatique pour les survivants, les civils en particulier, et pas seulement à l'Est mais encore plus longtemps pour ceux-là.
Le style de
Cay Rademacher est limpide et ses personnages complexes, donc attachants. La construction répond à tous les canons du genre : recherche tous azymuts, indices semés mais bien dissimulés, révélations soudaines, scène de mise en péril de la vie du personnage principal puis solution de l'énigme et punition du coupable … D'accord, pas de surprise de ce côté-là, mais la différence se fait au niveau de la description du cadre géographique et historique, et la profondeur des protagonistes.
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