Cyril Conroy, parti de rien et devenu un magnat de l'immobiler, a acquis en 1946 un manoir dans une riche banlieue de Philadelphie pour y loger sa famille, sa femme Elna, et leurs 2 enfants, Maeve et Danny. Une maison immense datant de 1922, entièrement meublée, un cadeau surprise à sa femme, alors que Maeve a 5 ans et que Danny n'est pas encore né.
La maison, construite pa
r un couple hollandais qui a fait fortune dans la cigarette, n'a pas été vidée. Les imposants portraits des anciens propriétaires trônent toujours dans le salon.
Une maison somptueuse avec d'immenses vitres qui recèle des histoires sombres et qui est au coeur de ce roman.
Alors que Maeve est âgée de 10 ans et Danny 3, leur mère s'en va. Sa disparition cimente un lien indestructible et puissant entre Maeve et Danny, un amour indéfectible qui sera renforcé par les épreuves.
Ils restent seuls quelque temps avec leur père, un homme mystérieux, impénétrable, rigide et froid, ainsi que 2 autres employées de maison après le renvoi de leur nounou, Pluche, qui servait déjà les anciens propriétaires.
Un matin, Maeve et Danny sont appelés pour salue
r une jolie et jeune veuve prénommée Andrea. Elle est fascinée par la maison. Elle va s'y fraye
r un chemin accompagnée de ses 2 petites filles. L'arrivée de cette femme, encore plus que le départ de leur mère, signe la fin de l'innocence et de l'enfance de Maeve et Danny.
Le roman est écrit à la 1ère personne du point de vue adulte de Danny. On va suivre le frère et la soeur pendant 50 ans.
Comme la mémoire, le récit n'est pas linéaire et fait des allers et retours dans le temps.
Dans cette histoire, seule la maison ne change pas, seul élément immuable de leur vie (une maison si bien décrite qu'elle semble exister!) et devant laquelle ils vont instaure
r un rituel. Ils vont prendre l'habitude de se garer dans leur ancienne rue, en face de la maison et passer du temps assis dans la voiture de Maeve à discuter.
Ce roman est une histoire de paradis perdu, représenté par la maison qui cristallise leurs différentes pertes et les émotions qui y sont liées.
C'est également l'histoire d'un frère et d'une soeur qui s'adore. Presque une déclaration d'amour à une soeur (le but initial du récit de Danny étant d'ailleurs de raconter l'histoire de Maeve).
Ce roman lumineux est captivant et saisit « avec brio comment le temps défait toutes les certitudes. »
Comme à son habitude,
Ann Patchett se montre une fine observatrice de la nature humaine et maîtrise à merveille le vieillissement d'un ensemble de personnages sur plusieurs décennies. Et elle confirme qu'elle est une conteuse hors pair.
La romancière revisite ses préoccupations principales: les familles dysfonctionnelles avec lesquelles les enfants doivent grandir, l'instabilité de la vie familiale, les liens entre frères et soeurs et le processus de pardon.
J'apprécie énormément les romans dans lesquels une maison constitue le coeur du roman (je pense notamment à Rebecca) et représente une charge symbolique émotionnelle très forte en lien avec les personnages. Celui-ci ne fait pas exception. En bref, une réussite!