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4,12

sur 476 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
L'expérience interdite.
A la façon de Léopold Bloom qui traverse Dublin dans « Ulysse » de James Joyce, Ulrich rentré en terre natale, l'empire austro-hongrois du début du XXe siècle, traverse le roman de Robert Musil, d'un salon à un autre, d'une société à une autre, de façon intemporelle. Il est la colonne vertébrale, le lien entre les savants développements de l'auteur. Sans profession ni statut social bien établi, il est « L'homme sans qualité », agent neutre, il va servir de guide au lecteur pour parcourir la pensée alambiquée et opaque de Musil.
L'oeuvre est un essai, mélange d'utopie et de dystopie, sur une société qui s'invente et dont on a beaucoup de difficulté à cerner le projet : Kaiserlick und Königlich, la cacanie.
« Alors, Ulrich se lança dans une tentative insensée.
- Altesse, dit-il, il n'y a pour l'Action parallèle qu'une seule tâche : constituer le commencement d'un inventaire spirituel général ! Nous devons faire à peu près ce qui est nécessaire si l'année 1918 devait être celle du jugement dernier, celle où l'esprit ancien s'effacerait pour céder la place à un esprit supérieur. Fondez, au nom de sa majesté, un Secrétariat mondial de l'Ame et de la précision. »
Ceci est l'exemple frappant de la folie de Musil. On ne sait plus si l'on est au milieu d'un cours de pataphysique d'Alfred Jarry ou dans le bureau d'Adrien Deume dans « Belle du seigneur » d'Albert Cohen.
Maintes fois Musil nous perds, alternant réflexions philosophiques, métaphores facétieuses, dialogues surréalistes.
« L'homme sans qualité » est l'oeuvre inachevée de Robert Musil mais aussi une lecture sur laquelle il faudrait revenir souvent pour commencer à en saisir l'un des multiples sens et, de facto, est une lecture inachevée elle aussi. C'est une aventure littéraire qui mène partout et nulle part, l'expérience interdite qui risque de nous égarer dans le labyrinthe maudit de la pensée de Musil.
Ainsi le disait Nicolas Boileau : « Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage, Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage. »
Traduction de Philippe Jaccottet.
Editions du Seuil, points, 834 pages.
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L'homme sans qualité. Il y a bien longtemps, j'ai lu le tome 1 en entier et une grande partie du tome 2. A l'époque j'avais apprécié les méandres de la vie d'Ulrich et la description de son rapport catastrophique à la vie et aux autres. Mais aujourd'hui, c'est un ouvrage que je ne relirais pas, trop prise de tête, sombre, avec un personnage principal qui se regarde le nombril. C'est une performance de réussir à lire ces deux Tomes.
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Vous savez vraiment bien nager? Alors plongez-vous dans ce livre. Moi, je m'y suis noyé vers la 250ème page, ne sachant que penser. Beaucoup de passages m'ont plu, mais je n'ai pas eu la force de continuer la traversée. Est-ce ma méconnaissance de l'Autriche de l'époque (je ne la connais pas beaucoup mieux aujourd'hui). Est-ce l'incompréhension du texte? L'homme sans qualités est un livre que je respecte, comme on respecte quelque chose de mystérieux et d'imposant, comme on respecte la forêt amazonienne ou l'Everest. Comme on respecte la personne qui est arrivée au bout de ce livre.
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Souvent classée parmi les oeuvres majeures du XXème siècle j'en ai parfois été lassé. Mais de quoi alors ? Comment une telle oeuvre (et disons déjà « le tome 1 ») qui condense de manière incomparable les interrogations et les potentialités, les contradictions et les craintes de ce début du XXème siècle peut être lassant ? Et bien justement, au bout de 1000 pages de tergiversations intellectuelles, on est rincé. On y parle de progrès, des sentiments, des Idées, du sens de la vie ou du sens de l'humanité, pour n'évoquer que ça.

L'écriture de l'Homme sans qualité était peut-être le moyen pour Robert Musil de mettre sur le papier, en le rendant inaltérable, le résultat de ses propres réflexions, pour tenter de comprendre dans quel état d'esprit était cette partie de l'Europe à la veille de la catastrophe que l'on connait : la première guerre mondiale.
Même si la situation géopolitique n'est pas approfondie dans l'ouvrage, on comprend bien l'enjeu de cette « Action parallèle » pour les « patriotes autrichiens » dans l'incapacité de définir leur identité propre dans cet empire austro-hongrois coincé entre l'Empire d'Allemagne et les pays slaves de l'Europe du Sud-Est.

Le personnage principal, qui a connu jusque-là un succès modeste dans sa carrière, est au centre de l'action de l'oeuvre. Cet Homme sans qualité, n'en est pas tant dépourvu, mais il ne sait pas comment se définir. L'auteur se sert de ce flou pour incarner ses propres réflexions et nous communiquer ses interrogations. A l'inverse, le personnage du Dr Harneim semble représenter un homme qui a toutes les qualités, un homme qui ne reste pas dans la « moyenne », qui à réponse à tout. On a l'impression que cet homme sait tout. Mais finalement lui-même reconnait qu'on ne peut pas tout connaitre, tout savoir, la vérité est propre à chacun, selon ses valeurs, sa culture, son histoire…

Et c'est le combat, intellectuel, du personnage principal, de faire reconnaitre cet état de fait, que tout ce que l'on fait, tout ce que l'on croit, dépend de nos mécanismes de pensée, qu'il n'y a pas une vérité unique. Finalement, il pourrait s'appliquer cette maxime bien connue de Socrate : « Tout ce que je sais, c'est que je ne sais rien ».
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