Petit livre introductif à la problématique finalement très large concernant la virtualité, les jeux vidéos, Internet, chez les jeunes et les moins jeunes, le risque de fossé croissant entre générations, mais également les possibilités de pont entre ces générations...
Un problème qui finalement n'est pas spécifique, mais de tout temps sur d'autres formes, avec d'autres moyens, d'autres médias...
Et l'auteur plaide pour une grande méfiance à la volonté de pathologisation, à risque de passivité, de médication exacerbée, d'étiquettage et donc de frontières, de rejets, d'évitement, d'enlisement.
Il propose évidemment des lectures pour approfondir les différentes facettes de ce sujet en (dé-)formation perpétuelle.
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... Serge Tisseron parle de "dyade numérique" pour évoquer la relation privilégiée qui peut s'établir entre un adolescent et la machine. Si quelque chose s'est mal passé dans les interactions précoces, si l'histoire du sujet est marquée par l'insécurité, la précarité symbolique, des excitations excessives, insuffisantes ou inadaptées, ou une souffrance narcissique, il pourra être tenté d'utiliser l'ordinateur comme un partenaire d'interactions et rejouer avec li ses relations problématiques afin de :
- rechercher un attachement sécurisé pour apaiser ses angoisses d'abandon ;
- devenir maître de ses excitations et rechercher des sensations fortes en utilisant les T.I.C. comme outil de régulation émotionnelle ;
- manipuler des aspects de soi-même et d'autrui grâce à la "pâte à modeler virtuelle" ;
- soigner une estime de soi défaillante ;
- nouer des liens sous le couvert de l'anonymat.
... en incluant de plus en plus de comportements dans la sphère de la "pathologie mentale", nous développons en même temps l'idée que seuls les spécialistes sont compétents pour les "traiter" et qu'il faut faire appel à eux sans délai au moindre constat d'excès. [...] le choix des termes utilisés pour décrire ces phénomènes a un impact plus important que nus pourrions imaginer a priori.
... il existe des traits de personnalité plus fréquemment présents chez les joueurs assidus. Une faible estime de soi et un manque de confiance en soi, ainsi qu'une personnalité introvertie, semblent prédisposer aux usages problématiques. Néanmoins, d'un point de vue statistique, la dépression est le meilleur facteur prédictif d'une U.P.T.I.C [utilisation pathologique des technologies de l'information et de la communication]. Nous pensions au départ aborder une problématique nouvelle et nous arrivons au constat que, dans ses fondements, elle n'a rien de très neuf...
... la pratique intensive des univers virtuels, tout comme l'objet transitionnel, peut-être utilisée pour apaiser les angoisses d'abandon. C'est-à-dire pas uniquement la crainte de se retrouver seul, mais bien l'appréhension du risque de séparation comme synonyme d'effondrement et d'annihilation. Les jeux vidéo et les avatars (lorsqu'on maintient ces derniers en vie ce qui implique une présence assidue "on line" du propriétaire) sont un des moyens de se rassurer face à l'appréhension de la possibilité de ce cataclysme psychique. Néanmoins, comme le relève Michael Civin, ni Internet ni un ours en peluche n'ont une essence transitionnelle a priori. Rien n'est intrinsèquement transitionnel, tout dépendra des possibilités psychiques de l'usager.
... "l'addiction au virtuel" à l'adolescence n'est pas un diagnostic, mais une stigmatisation sans base scientifique établie, qui fait courir le risque de figer l'enfant et sa famille dans une compréhension erronée de ses difficultés. Bien au contraire; les usages excessifs d'Internet et des jeux vidéo sont le plus souvent les nouveaux habits de la crise d'adolescence . Or celle-ci n'est pas une maladie. Elle ne doit pas être soignée, mais accompagnée. Elle ne relève pas d'un traitement, mais d'une éducation.