Coup d'essai, coup de maître.
Dès son premier roman mettant en scène et en action l'inspecteur Kurt Wallander,
Henning Mankell se hisse au niveau des meilleurs. Notamment de ses prédécesseurs Maj Sjöval et
Per Wahlöö (dont il cite, en hommage, l'un des titres « le policier qui riait »), longtemps méconnus de l'édition francophone.
Humain (trop humain ? ☺), l'inspecteur Wallander, empêtré dans une vie privée qui part en quenouille, tout autant que dans une enquête qui piétinera longtemps, nous est d'emblée proche et fraternel. Ses doutes, ses hésitations, ses mauvaises habitudes alimentaires, ses contradictions, la relation compliquée avec son ex-femme, avec sa fille, avec son père, son attachement à Rydberg, un vieux collègue dont la santé décline, tout concourt à nous le rendre, sinon sympathique, du moins à nous faire comprendre, par son entremise, les problèmes qui agitent la société suédoise en cette fin de XXe siècle. En particulier la montée de la xénophobie et du racisme à l'égard des réfugiés, qu'accompagne l'émergence d'une extrême droite violente. de ce point de vue, Mankell, dont le personnage de Wallander traduit l'inquiétude et le pessimisme, s'est montré intelligemment précurseur.
Une des seules faiblesse du récit est constituée, à mon sens, par la relation amoureuse esquissée avec la jeune et jolie procureure Annette Brolin, idylle qui reste à l'état d'ébauche un peu sommaire et un brin caricaturale.
Mais le reste n'est que plaisir de lecture.