Une quarantaine de textes courts (parfois moins d'une page comme pour « Des justiciers de l'injustice », p. 50) qui sont autant d'invitations à la lecture ou à la contemplation artistique (des références à la peinture, au cinéma et à la musique, des références historiques également) et qui abordent avec finesse les différentes facettes de la colère. Comme à son habitude,
Linda Lê n'en dit pas trop, mais incite judicieusement à la réflexion, tout en proposant des interprétations pertinentes. Il en résulte une flânerie passionnante à travers les arts, ayant comme fil rouge la colère, et comme espoir final la réussite de ceux qui « ont pour rôle d'empêcher l'homme de s'assoupir dans sa normalité » (p. 124).
Il s'agit d'un livre de commande achevé en 2019 et qui appartient à la collection des 7 péchés capitaux des éditions du Cerf que je remercie d'ailleurs chaleureusement pour ce cadeau magique. Pour rien au monde je ne raterai la sortie d'un livre de
Linda Lê.
Comme j'aime les critiques courtes, je vais simplement vous dire que c'est un livre à découvrir, surtout quand on ne connaît pas le travail de
Linda Lê. J'ai pour ma part une pensée toute particulière pour « l'ironie meurtrière » et le « délit de conférence » de
Claudio Magris (p. 42-46) qui m'a fait beaucoup rire, ainsi que pour l'évocation, dans « saine colère » des « étudiants, cheminots, médecins, auteurs "en colère", manifestant, non sans crier haut et fort qu'ils ne "lâcheraient" rien contre les réformes d'un gouvernement accusé d'être du parti des nantis. » (p. 69)
Cela donne très clairement envie de découvrir les autres livres de la collection des 7 péchés capitaux : la Paresse par
Céline Curiol : « La posture du pêcheur », la Gourmandise par
Cécile Ladjali : « Chère », l'Avarice par
Louis-Henri de la Rochefoucauld : « Mémoires d'un avare », la Luxure par
Laurence Nobécourt : « Post Tenebras Lux », l'Orgueil par
Laurent Nunez : « Regardez-moi jongler » et enfin l'Envie par
Mathieu Terence : « Du ressentiment ».
Grâce au dossier de presse qui accompagnait le livre, j'ai noté un autre auteur à découvrir aux éditions du Cerf, Évagre le Pontique, « un lettré venu des rives de la mer Noire » (tiens, ma Roumanie n'est jamais trop loin !)