Alvina Wright quitte la Californie pour se rendre à Pine Hills dans une ancienne base militaire réhabilitée, afin de mettre ses compétences au service d'un nouveau programme d'algorithmes dont elle doit assurer la supervision. Entre nuits froides, bâtiments déserts et ses propres angoisses, elle va se sentir coupée du reste du monde, tourmentée par un drame récent qui la lie de façon macabre à un certain Brandon, une présence en filigrane. Ses recherches la conduisent à une terrible découverte et son trouble s'accroît, vertige en écho à sa propre histoire en même temps qu'elle côtoie un collègue inquiétant.
Une belle écriture toute en subtilité
J'avoue qu'étant peu familière du domaine numérique, les détails techniques assez poussés dans les tout premiers chapitres m'ont demandé de la concentration, mais, je pense que c'est un des aspects de l'histoire qui plaira assurément aux aficionados.
J'ai aimé le style parfois presque télégraphique des phrases brèves, posées comme des battements, un rythme agréable plantant avec soin un décor esthétiquement enveloppant (comme une nappe de brume). Et en parallèle, une qualité d'élégance dans l'écriture impressionnante, les métaphores dégagent une grâce particulière, le récit réussit à être à la fois fluide et riche et m'a bien fait ressentir chaque émotion de l'héroïne. J'ai adoré la teneur des dialogues qui expriment un essentiel concis et pourtant évocateur.
Les descriptions jouent visuellement entre matière et texture.
Une intrigue quasi onirique
J'ai été captivée par cet univers clos où les personnages évoluent de façon spectrale.
L'héroïne donne l'impression de se fondre sans cesse au fil d'un rêve éveillé qui se répercuterait à travers son propre corps, elle est entourée par des machines auxquelles elle attribue des caractères organiques.
Les lignes brouillées amènent progressivement au sein du mystère, et là tout s'emballe, les émotions pulsent au milieu d'un gris presque minéral, sous le bruit entêtant des serveurs informatiques. Une ambiance envoûtante.
Outre les souvenirs personnels d'Alvina, un pan de l'Histoire se matérialise sous la forme d'une antenne de radio, catalyseur qui joue un rôle important.
Une novella construite avec talent
On sait qu'Internet constitue une immense banque de données avec toutes les traces de vies qu'on y sème, mais je ne m'étais jamais questionnée au sujet de ce qui y perdure après la mort.
Le portrait d'Alvina qui tente de garder le cap est attachant et réaliste.
KeoT nous fait partager un regard visionnaire passionnant sur les futurs progrès technologiques, cette « guerre invisible » de collectes de données qui traquent nos envies et nos besoins.
J'ai vraiment beaucoup aimé perdre pied dans cette impression de malaise croissant mais aussi en paradoxe, savourer de belles images sous différents éclairages. Une histoire de fantômes qui fait frémir et qui prend au coeur grâce à des thématiques actuelles sur la perversion des réseaux sociaux notamment. Je recommande chaleureusement
Signal mort, pour son charme métallique et authentique et sa chute inattendue.