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Dominique Tassel (Traducteur)
EAN : 9782072822445
800 pages
Gallimard (02/09/2021)
4.14/5   7 notes
Résumé :
Dans ces douze cahiers, que Kafka qualifie parfois de Journal, observations de vie quotidienne, rêves, visions, fulgurations, réflexions et même dessins alternent avec de multiples débuts de récit, certains répétés comme s'il s'agissait de réchauffer un moteur narratif refroidi. Dans cette galaxie brille un seul récit achevé, Le Verdict, écrit d'une traite une nuit de 1912, devenu pour l'écrivain le modèle du bonheur de raconter.Mille et une nuits d'écriture de nota... >Voir plus
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Vous allez peut-être faire fi de ce mot, or vous ne devriez pas, vous devriez plutôt demander ce qu’il en est précisément, auquel cas je serais tenu de vous donner précisément et brièvement la réponse qui suit. Mon emploi m’est insupportable parce qu’il contrevient à mon unique désir et à ma seule vocation c’est-à-dire la littérature. Comme je ne suis rien d’autre que littérature et ne peux ni ne veux être quoi que ce soit d’autre, mon emploi ne peut jamais m’enthousiasmer mais il peut tout à fait me démolir complètement. Et je n’en suis pas loin. Je suis la proie d’états nerveux de la pire espèce, sans discontinuer, et cette année de soucis et de tourments au sujet de mon avenir et de celui de votre fille a définitivement avéré mon défaut de résistance. Vous pourriez me demander pourquoi je ne quitte pas cet emploi et ne cherche pas — puisque je suis sans fortune — à vivre de mes travaux littéraires. À quoi je ne peux que donner cette pitoyable réponse : je n’en ai pas la force et si je peux juger globalement de ma situation je vais plutôt m’abîmer à ce poste, et ce dans les plus brefs délais.
Et maintenant confrontez-moi à votre fille, cette jeune femme saine, joyeuse, naturelle et vigoureuse. J’ai eu beau le lui répéter tant de fois dans près de 500 lettres et elle a eu beau me tranquilliser autant de fois avec un « Non » qui n’avait pas à dire vrai de fondement convaincant — il n’en est pas moins vrai qu’elle sera malheureuse avec moi pour autant que je puisse en juger. Ce n’est pas seulement ma situation extérieure, mais plus encore ma nature profonde qui fait l’être malheureux, renfermé, taiseux et revêche que je suis, sans y voir pour autant un malheur car ce n’est que le reflet du but que je poursuis. Du genre de vie que je mène chez moi, il est néanmoins possible de tirer au moins quelques conclusions. Eh bien je vis dans ma famille, avec les personnes les meilleures et les plus aimables qui soient, plus étranger qu’un étranger. À ma mère je n’ai pas dit vingt mots par jour depuis plusieurs années, avec mon père je n’ai tout au plus échangé que des salutations. Avec mes sœurs mariées et mes beaux-frères je ne parle pas du tout sans être fâché avec eux. La raison en est simplement que je n’ai pratiquement rien à leur dire. Tout ce qui n’est pas littérature m’ennuie et je le déteste, car ça me dérange ou me fait perdre du temps, même si ce n’est que soi-disant. De ce fait je n’ai aucun sens de la vie en famille à part celui de l’observateur dans le meilleur des cas. Je n’ai aucun sentiment d’appartenance à une famille, et je considère les visites littéralement comme de la méchanceté dirigée contre moi.
Le mariage ne pourrait pas me changer, pas plus que mon emploi ne peut me changer.
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Sans cesse la vision d'un large couteau de boucher qui m'entame par le côté à toute vitesse et à une cadence mécanique et détache des tranches très fines qui volent au loin, s'enroulant presque sur elles-mêmes tant le travail est rapide.

(4 mai 1913)
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De l’inquiétude est revenue. D’où ? De certaines pensées vite oubliées mais qui laissent de l’inquiétude inoubliable. Plutôt que les pensées c’est l’endroit où elles me sont venues que je pourrais indiquer, l’une p. ex. sur le petit chemin gazonné qui passe devant la synagogue Altneu. Également de l’inquiétude née d’un certain bien-être qui s’est approché de temps à autre timidement et au loin. Inquiétude aussi du fait que ma décision nocturne reste juste une décision. Inquiétude du fait que jusqu’ici ma vie n’a été qu’une marche sur place, une évolution tout au plus dans le sens de celle suivie par une dent devenant creuse et qui va tomber. N’existait pas de mon côté la moindre règle de vie ayant fait ses preuves. C’était comme si m’était donné comme à tout autre le centre du cercle, comme si j’avais ensuite comme tout autre à suivre le rayon déterminant pour tracer ensuite le beau cercle. Au lieu de quoi j’ai toujours pris pour le rayon un élan que j’ai constamment dû couper sur-le-champ (exemples : piano, violon, langues, germanistique, antisionisme, sionisme, hébreu, jardinage, menuiserie, littérature, tentatives de mariage, logement personnel) Le centre du cercle imaginaire est hérissé de rayons amorcés, il n’y a plus de place pour une nouvelle tentative, plus de place veut dire vieillesse, faiblesse nerveuse, et plus de tentative signifie : fin. Quand il est arrivé que je poursuive le rayon un petit bout plus loin que d’habitude, p. ex. pour les études de droit ou les fiançailles, tout a empiré justement de ce bout au lieu de s’améliorer.
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Deux enfants traînaient devant la vitrine de Casinelli, un garçon d’environ 6 ans, une fille âgée de 7 ans, luxueusement habillés, parlant de Dieu et du péché. Je restai derrière eux. La fille peut-être catholique considérait que mentir à Dieu était le seul péché proprement dit. Avec un entêtement d’enfant le garçon, peut-être protestant, demandait ce qu’était mentir à un homme ou voler. « Aussi un très grand péché » dit la fille « mais pas le plus grand, c’est uniquement les péchés envers Dieu qui sont les plus grands, pour les péchés envers les hommes nous avons la confession. Quand je me confesse, l’ange se retrouve immédiatement derrière moi ; et quand je commets un péché, c’est le diable qui vient derrière moi, c’est juste qu’on ne le voit pas. » Et fatiguée d’être à demi sérieuse, elle fit volte-face pour plaisanter et dit : « Tu vois il n’y a personne derrière moi. » Le garçon se retourna aussi et me vit là. « Tu vois » dit-il sans tenir compte du fait que j’allais forcément entendre mais également sans y penser « derrière moi il y a le diable. » « Je le vois aussi » dit la petite fille « mais ce n’est pas celui dont je parle »
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Vers la fin, ma main me passait devant le visage en un geste incontrôlé et véridique. J'avais les larmes aux yeux. Le caractère indubitable de l'histoire s'est confirmé.

(25 septembre 1912)
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Vidéo de Franz Kafka
En juin 1924, l'auteur tchèque Franz Kafka décédait à 40 ans des suites d'une tuberculose. Cent ans après, que nous dit encore son oeuvre du monde qui nous entoure ?
Pour en parler, Guillaume Erner reçoit : Léa Veinstein, écrivaine Christine Lecerf, germaniste, spécialiste de littérature autrichienne et productrice à France Culture Philippe Zard, professeur de littérature comparée à l'université Paris Nanterre
Visuel de la vignette : Getty
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