The Boy on fire

- Tu me frappes beaucoup, Nelly, pour une fille censée ne pas me toucher.
ses sourcils dansent et sa voix joueuse me provoque encore un peu.
- C'est ton seul mais ton immense talent, ça, Jagger : tu rendrais violente la plus pacifiste de toutes les femmes de la terre.

- C'est bon homme des cavernes, on a vu que tu étais courageux et musclé, ironisé-je pour faire passer mon trouble.
- N'hésite pas à te rincer l'œil, femme, c'est cadeau.

Dans une autre vie, je me serais collé à elle depuis longtemps, je l'aurais plaquée contre ce mur ou allongée par terre pour lui faire toutes les choses qui me passent par la tête et bien d'autres encore. Mais ici, maintenant, je manque d'air. De cran. De spontanéité. Ce ne sont pas les mêmes règles du jeu, pas les mêmes conséquences. Et son putain de regard me cloue sur place : elle me hait, elle me veut, elle a envie de moi et elle déteste ça.
Tout à la fois.

- Si tu n'as pas envie de t'amuser avec moi, on peut parler...
- Plutôt mourir.
- Arrête avec ça. Tu parles beaucoup trop de la mort pour une gamine qui a toute la vie devant elle...
- Qui tu viens de traiter de gamine ?

- Sérieux, il doit bien exister une once de joie de vivre en toi, non ?
- Partie.
- Où ça ?
- Très loin. En même tems que ma liberté et les proches que j'ai perdus.
Le garçon aux yeux lumineux cesse alors de manger pour mieux me regarder.
- La mort est venue rendre visite à ma famille aussi, les drames connaissent bien mon adresse, m'annonce-t-il. Je n'ai pas baissé les bras pour autant. Il faut se battre un peu, se forcer à sourire, sinon à quoi bon ?

Il a les yeux qui brillent et les mâchoires qui s'activent, les mains qui s'agitent, les doigts qui découpent de gros morceaux de pain à l'avance, il les enfonce dans sa bouche qui grogne de plaisir tout en mâchant, il essuie des miettes sur ses lèvres du dos de son poignet, il commente à quel point il avait faim et comme il déteste attendre... Et je devine que ce mec fait tout intensément. A fond. Sans filtre.
Ce feu en lui m'effraie...mais pas seulement.
Et ça me fait le détester encore un petit peu plus.

- Laisse-moi deviner, tu ne m'aimes pas beaucoup, c'est ça ?
- Non, je te détestes déjà.
- C'est dommage, mais c'est franc, au moins.
- Être beau ne suffit pas, gros malin.
- Ah oui ? Regarde-moi d'un peu plus près, pour voir ?

Je t'aime, je t'aime à en crever.

Je n'ai jamais eu une telle envie de me tirer d'ici... avec elle.

Ne pas faire de Jagger mon allié.
Il est plein de choses... mais pas ça.
Dans ce Cercle de malheur, c'est chacun pour sa peau.