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sur 284 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Mon Dieu ! Que de chiffres, de pourcentages, d'abscisses et d'ordonnées, de graphiques colorés, de courbes, de points d'intersection… Toute une population de gaulois réfractaires mise en coupe réglée. Prodigieux travail même si parfois le tournis m'a pris. Jérôme Fourquet nous montre avec beaucoup d'acuité comment notre nation une et indivisible s'est transformée en quelques décennies en une nation multiple et divisée. le référentiel commun qui nous soudait et existait encore du temps de mon enfance, celui d'une France conservatrice et catho d'un côté et d'une France rouge de l'autre, s'est effondré face aux coups de boutoirs de l'évolution des moeurs, de l'individualisme, de l'immigration massive et de la mondialisation. En 2019, la société française est devenue totalement hétérogène. Elle est désormais constituée d'un archipel d'îles plus ou moins grandes, certaines conquérantes, d'autres en voie de disparition, s'ignorant « les unes des autres »
« Halalisation » des quartiers de banlieue victime de ségrégation ethnoculturelle, paupérisation de certains territoires, regroupement des élites dans les grands centres urbains, chacun vit sur son île, pratiquant l'entre-soi et le grégarisme.
L'élection présidentielle de 2017, où les clivages gauche/droite ont été balayés, est la première traduction politique d'ampleur de ces bouleversements. Nous avons en effet assisté à la confrontation brutale entre deux Frances, deux îles, qui ne se voient plus et se comprennent encore moins. Nous avons la France (ou l'île…) des « gagnants/ouverts » composée de l'élite, de cadres +++, adaptés à la mondialisation, favorables à l'Europe et à l'ouverture des frontières. Ils ont envahi les grands centres urbains, et leur mode de vie comme leur idéologie les éloignent du reste de la nation. Puis nous avons la France (ou l'île) des « perdants/fermés », celle des déclassés, des humiliés de la mondialisation qui vivotent dans des déserts culturels, administratifs et économiques. Ceux-là ne sont guère européens et voient dans le rétablissement des frontières une forme de protection. le mouvement des gilets jaunes, mouvement intrinsèquement violent, d'un nihilisme tapageur, un jour récupéré par l'extrême droite, un autre par l'extrême gauche, est la simple prolongation de cette confrontation et la preuve par A plus B que les élites sont déconnectées de leur réalité.
Aujourd'hui, les partis politiques, de la LFI, le RN à LAREM, par intérêt, par calcul, par paresse idéologique aussi, se positionnent en fonction de ces deux Frances. Même si j'ai fait mon choix, je n'en suis pas satisfait pour autant. C'est que je l'aime, mon pays ! et ça me fait mal au coeur de le voir se déchirer, se haïr, se fragmenter, se disloquer, se dissoudre, tomber en quenouille. Les conclusions de Jérôme Fourquet son hâtives et guère optimistes. Eh bien, moi, ne vous en déplaise, je veux encore rêver d'une grande et ambitieuse destinée commune.
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Violences entre groupes ethniques d'immigrés, (maghrébins contre roumains...) dans les banlieues et villes de province...


L'auteur est directeur des études à l'Ifop. Et, si les sondages ethniques sont interdits, il a réussi, par recoupements, à dégager des clivages entre les Français (différences de classes, d'opinions et de croyances...)


Dans ses voeux fin 2017, E.Macron souhaitait la cohésion sociale pour la France, (on a vu la suite...) à travers la victoire des Bleus, l'hommage rendu au colonel Beltram, et même l'adieu à Johnny, à l'église de la Madeleine!


J.Fourquet nous parle de la divergence des valeurs, en France. Clivage dans les croyances religieuses: la baisse des baptêmes, et du nombre de prêtres catholiques (moins 47%). Clivage de valeurs: dans les années 80, les personnes sondées déclaraient, face aux enquêteurs, que l'homosexualité était soit une perversion, soit une maladie mentale.
En 2013, moins de 5% pense cela! Et leur attitude change envers la PMA.


Clivage social : les enfants des classes favorisées vont étudier à l'international, alors que ceux de la France profonde, des banlieues et de la campagne ne maîtrisent pas suffisamment l'anglais. Macron parle couramment l'anglais, à la différence de ses prédécesseurs.
Il y a un hiatus entre ses "premiers de cordée" et le reste de la population. Des gagnants et des perdants! Bordeaux est devenu l'épicentre du mouvement des gilets jaunes, car la ville de Juppé a subi une hausse énorme des loyers, en 20 ans..


Clivage culturel: une évolution des prénoms, car Marie n'est plus usitée, au profit des prénoms anglo-saxons, comme Kevin ou Brandon, ou au profit des prénoms arabo-musulmans...L'auteur souligne, que dans le Nord, les prénoms des enfants polonais ont disparu en une génération, et sont devenus des prénoms "catholiques", et communs à la culture de la France. Contrairement à ceux du Moyen Orient, bien que les parents connaissent le racisme et la xénophobie en France. C'est une contre réaction qui affirme ses propres convictions. Hélas, M.Le Pen et ses acolytes se sont empressés de surfer, sur cette différence de valeurs!


La cohésion sociale du Catholicisme et du clivage gauche-droite s'est perdue, à travers la montée de ces nouveaux courants.
La question se pose: que peuvent faire les hommes politiques, avant que toutes ces différences ne submergent, comme une marée montante, tout l'archipel français ???
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On dit que l'on peut faire tout dire aux chiffres. Mais quand ils sont présentés par Jérôme Fourquet, le Directeur du Département Opinion à l'IFOP, que celui-ci s'appuie sur des données multiples de nombreux sondages, d'analyses fouillées de l'INSEE, que ces chiffres sont argumentés avec beaucoup de précautions, de nuances, alors on obtient un ouvrage remarquable et passionnant, une véritable photographie en haute définition de notre société française, une analyse détaillée de sa fragmentation et des conséquences de celle-ci sur notre paysage politique.

Le livre se divise en 3 parties.

Dans une première, l'auteur nous montre que la "matrice" catholique qui contribuait fortement à la structuration de la société française s'est effondrée à partir des années 1950-1960, et nous décrit les différents signes de ce qu'il nomme un basculement anthropologique, caractérisé entre autres, par la reconfiguration des structures familiales (baisse des mariages, hausse des divorces, prédominance des couples non mariés), par l'acceptabilité majoritaire de l'IVG et de l'homosexualité, par un nouveau rapport au corps (hausse des pratiques d'incinération, de tatouage, ...), et par le développement de la cause animale.

Dans une deuxième partie, l'auteur montre comment la société française s'est fragmentée depuis cinquante ans.
Il y a d'abord la disparition de l'église "rouge" qu'était le parti communiste, contrepoids au bloc catholique.
Il y a surtout le développement de l'individualisme dont témoigne par exemple la multiplication des prénoms rares, le déclin des grands médias et le recours de plus en plus important aux réseaux sociaux, générateurs de fake-news propagatrices de théories du complot, surtout chez les jeunes.
Puis, c'est le tableau, pas forcément joyeux, de notre société "archipellisée" qui nous est peint:
- des élites diplômées de l'enseignement supérieur (CSP+) qui vivent dans l'entre-soi au sein des centres des grandes agglomérations, déconnectées du reste de la population;
- des classes moyennes et populaires, moins ou pas diplômées, souvent affectées par la mondialisation, qui vivent dans la périphérie des grandes villes, dans les petites villes de province, et dans le monde rural;
- des identités régionales bretonnes et corses persistantes et qui se sont renforcées en ce qui concerne la Corse;
- et puis un grand nombre de pages est consacré à la population arabo-musulmane. L'analyse est très fouillée, très nuancée, et cela vaut le coup de lire ces pages. Elles nous montrent la dynamique démographique, la géographie particulière, surprenante, de l'implantation de cette population; des preuves à la fois de l'intégration, notamment professionnelle, de cette population mais aussi des signes identitaires pas forcément problématiques comme le choix des prénoms, mais d'autres à rebours du reste de la société française tels la pression sur les femmes et les filles concernant l'endogamie, ou plus inquiétants comme la virginité avant le mariage, et ceci, comme l'on pouvait s'y attendre dans les quartiers où la proportion de cette population est importante, et chez ceux qui pratiquent la religion, mais, moins attendu et préoccupant, plus marqué les plus jeunes.
Et puis, l'auteur nous montre comment très souvent, quartiers arabo- musulmans, ou d'immigration sub-saharienne, cumulent pauvreté, trafic de drogue, et apartheid scolaire, contribuant de façon saisissante à une fragmentation d'une ville, même moyenne, comme Compiègne ou Carcassonne.

La troisième partie est consacrée au basculement idéologique et électoral de ces 30 dernières années.
L'auteur y identifie trois années "clés": 1983 où deviennent visibles simultanément Beurs et FN, 2005 et le non au référendum européen, 2015 et les attentats qui révèlent que tout le monde n'a pas été Charlie.
Sans entrer dans les détails, la suite, qui analyse de façon exhaustive, chiffres à l'appui, l'évolution du paysage électoral, montrent, si on veut faire simple, la disparition de l'antagonisme droite-gauche au profit d'une division selon le niveau d'éducation et d'ascension sociale, et selon la géographie, entre un bloc de "gagnants", BAC +3 majoritairement, cadres supérieurs ou moyens, ouverts sur le monde, pro-européens, flexibles et ouverts aux changements sociétaux, et majoritairement urbains, et un autre bloc de "perdants", ouvriers, employés, instituteurs, mais aussi dans une certaine mesure, petits artisans, commerçants, donnant la préférence à la France plutôt qu'à l'Europe et au monde, et vivant à distance des grands centres urbains.
Dans les premiers, on trouve ceux qui ont voté Macron à la présidentielle, dans les seconds la majorité de ceux qui ont voté le Pen.
Cette argumentation fondée sur de nombreux chiffres et schémas, et que l'auteur nuance en analysant aussi le vote pour La France Insoumise, le vote socialiste et LR, est absolument passionnante, car elle montre une France divisée sur le plan électoral selon le niveau d'éducation et la géographie, et dans laquelle la population arabo-musulmane se retrouve dans les deux blocs, même si, au sein du bloc "perdant" le vote France Insoumise y est prépondérant.

La conclusion est plutôt pessimiste sur les potentialités d'éclatement de cet archipel français, que l'auteur trouve incapable de retrouver une unité.
Je trouve ce constat un peu sévère. Un corps social ne peut être homogène, et il y a eu par le passé des oppositions très fortes, que l'on songe aux grèves de 1936, à mai 68. Et on peut noter une France plus homogène que l'Espagne avec la volonté de sécession de la Catalogne, et relever aussi l'antagonisme Flandre-Wallonie en Belgique, Ecosse-Angleterre au Royaume Uni, l'opposition entre Italie du Nord et du Sud, entre ex-RFA et RDA.
Mais j'approuve ses arguments sur l'incertitude quant à l'avenir, fondés sur de l'arrivée dans le corps électoral des tranches d'âges plus jeunes, plus sensibles aux Fake-News, et le départ des plus âgées!

Il faut noter que ce livre est paru en mars 2019, et que depuis, les élections municipales ont montré une forte poussée du parti écologiste, en particulier dans les grandes villes, celle des "gagnants". Est-ce que la prise de conscience du péril climatique, de la perte de biodiversité, de l'importance du "local" face à une mondialisation nous amenant de méchants virus, va encore changer les comportements électoraux des français, ou mieux, on peut rêver, fédérer le pays, voire l'Europe, dans une lutte contre le réchauffement climatique?
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L'archipel, en géographie, est un ensemble d'îles relativement proches les unes des autres. A l'image de cette donnée géographique, Jérôme Fouquet, directeur du département Opinion à l'IFOP, dresse le portrait d'une société française morcelée, divisée, composée de différents groupes qui se côtoient mais ne partagent pas forcément le même mode de vie ou la même vision du monde.

Certes dans le passé on avait des différenciations au sein de la société: ainsi on pouvait parler des langues régionales, on connaissait un clivage population citadine/ population rurale mais il y avait une matrice commune, un référentiel commun catho-laïque. Cette matrice tend à s'effilocher, processus qui s'accélère depuis plusieurs années.

On entre ainsi selon l'auteur dans une dynamique de fragmentation, qui se manifeste par exemple par le nombre croissant de prénoms "identitaires" donnés aux nouveau-nés.
Parallélement à ceci, un "basculement civilisationnel" semble s'opérer, qui se manifeste par exemple par un nouveau rapport au corps (exemple: l'essor de la pratique du tatouage, la "vogue" de l'incinération ..) un nouveau rapport à l'animal (volonté de donner des droits aux animaux...)

Explosion des réflexes communautaires, individualisme marqué, manque de référence à la nation.. voilà des marques importantes observées avec un virage qui date selon l'auteur, de 2005, moment où le vote sur la constitution européenne a vu le "non" l'emporter.

L'analyse de l'auteur porte beaucoup sur la "sécession des élites", très mal ressentie par la "base".
Les diplômés de l'enseignement supérieur peuvent ainsi "vivre entre eux", marquant un monde divisé, selon les propos récents de Boris Cyrulnik, entre "ceux qui lisent et ceux qui ne lisent pas."

Fin du brassage social qu'on pouvait avoir avec les colonies de vacances d'antan, fin du service militaire, expatriation des élites..tout cela concourt à créer du ressentiment dans les catégories populaires qui réagissent en créant leur propre culture.

Au niveau régional, de grandes disparités de vote, comme le montrent les différentes cartes électorales déployées dans le livre: il s'avère que le quart nord-est du pays semble être entré, depuis 2005, en "dissidence idéologique" selon les propres terme de l'auteur, ce qui se manifeste aux différentes élections par le poids important des partis extrémistes dans ces régions, à rapprocher avec les difficultés économiques rencontrées par ces régions en reconversion..)

Le clivage Gauche/ Droite semble dépassé et on irait plutôt selon Jérôme Fourquet, vers un clivage "gagnants ouverts à la mondialisation"/ "perdants fermés à la mondialisation et aux transformations".
Tout cela dans un contexte de développement de réflexes de repli chez certaines communautés qui se sentent à l'écart des progrès sociaux.
Des communautés religieuses qui se mélangent de moins en moins et qui peuvent se cristalliser sur des points "traditionnels" (rôle de la femme..éducation...)

Dans ce contexte, beaucoup de Français ne se reconnaissent plus dans les choix définis par une élite de plus en plus "internationalisée", d'où l'essor de certains mouvements comme celui des gilets jaunes.

La France, une nation multiple et divisée? C'est la question qui se pose à la fin de la lecture de ce passionnant ouvrage.

L'exposé est très pédagogique, et illustré par de nombreuses cartes, tableaux et graphiques originaux réalisés par Sylvain Manternach.
La démarche d'ensemble est fondée sur la combinaison originale de différents outils (sondages, analyse des prénoms, géographie électorale…), visant à restituer de façon vivante les enseignements spectaculaires de cette exploration inédite de la société française.
Un très bon ouvrage de référence...
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Jérôme Fourquet est un intervenant connu de « C dans l'air ». Il s'attache à comprendre l'évolution d'un pays longtemps perçu comme un pays de cocagne. Les Allemands ne disaient-ils pas « Heureux comme Dieu en France » ?

J'ai lu avec intérêt cet essai. La France qu'il nous dévoile ressemble à un pays morcelé, fragmenté en sociétés et contre-sociétés qui au mieux s'ignorent, et au pire se détestent. Ce qu'il nomme du doux nom d'Archipel est une réalité dérangeante.

Pour l'auteur, la France d'autrefois construite sur une matrice catholique et républicaine s'est complètement disloquée. Il part pour établir ce constat de la réalité (développement de certaines pratiques, consommations, prénoms). La partie la plus intéressante — et la plus polémique — vient du fait que Fourquet donne indirectement raison aux défenseurs de la théorie du grand remplacement. Pour cela ; il analyse l'évolution des prénoms et notamment la croissance impressionnante des prénoms musulmans.

La France qu'il dessine ressemble à celle que beaucoup de Français voient depuis longtemps dans le métro ou le RER, aux sorties des écoles. Une France métissée très loin des films de Claude Autant-Lara.

Une sorte de grand Liban ou de Yougoslavie d'avant la guerre civile. L'auteur s'arrête à ce constat de fragmentation sans vouloir en dessiner les conséquences possibles. Son discours se fait plus consensuel. L'homme de média est bien placé pour savoir ce que le politiquement correct peut accepter avant de prononcer une excommunication médiatique.

Mais le lecteur ne peut que s'interroger sur la suite logique de cette dislocation.

Dans cette interrogation, je ne peux m'empêcher de penser au glaçant roman « Demain les barbares, chroniques du grand effondrement» qui m'avait tant marqué.

Le "grand effondrement" français, suivra-t-il ce « grand bouleversement » dévoilé par Jérôme Fourquet ?

On ferme le livre de Jérôme Fourquet taraudé par cette sourde inquiétude…
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Le sous-titre « Naissance d'une nation multiple et divisée » pose la question : qu'en est-il aujourd'hui de la république une et indivisible, principe fondamental inscrit dans notre constitution ?

Ce livre fait un carton et c'est normal parce qu'il donne des clés pour comprendre les mutations qui nous affectent et met en perspective cet ensemble de détails qui nous marquent au quotidien.

Jérôme Fourquet aborde le sujet d'une façon étonnante et nous amène sur des terrains parfois iconoclastes : prénoms rares, incinération, tatouages, opinions sur la place du loup en France, audience de TF1, thèses complotistes, géographies sociologiques en milieu urbain, colonies de vacances, expatriation fiscale, composition des couples intra et extra-communautaires…

Son analyse est supportée par des données chiffrées en nombre et traitées de façon claire et intelligente. Elle donne une vision fouillée d'un changement radical de notre société sur les dernières décennies.

Si les mutations s'opèrent de façon graduelle, l'auteur discerne trois dates marquantes, témoins d'une reconfiguration du paysage politique et sociétal français : d'abord l'émergence de la question de l'immigration dans les années 80 avec, pour faire simple, le clivage FN-SOS Racisme, qui traduit l'existence d'une société hétérogène sur le plan ethno-culturel ; puis le refus du traité de Constitution européenne au début des années 2000 qui met en évidence le clivage des gagnants contre les perdants de la mondialisation ; enfin les attentats de 2015, qui expriment une montée de la violence dans la société et dévoilent une nation désunie. L'élection de Macron est quelque part annonciatrice d'une nation qui a définitivement tourné le dos à son passé et enterré (pour l'instant) les partis traditionnels.

Alors à quoi ressemble notre société désormais ? Un archipel, c'est à dire un ensemble de groupes marqués par des singularités fortes, aucun n'étant réellement en mesure de proposer une matrice commune, de fédérer.

En effet la destruction du socle historique « catho-laïque » a fragilisé le tissu social, car il contribuait à cimenter la population en dépit des différences de classe ou de région. le drame est qu'aucune alternative n'a été proposée.

Dès lors, il semble urgent pour l'auteur d'éviter tout repli communautaire. Comme il l'écrit : « La France de Mbappé n'est plus celle de Zidane. » La partition, le séparatisme seront les prochaines étapes si rien n'est fait. Pour l'instant, l'union nationale des choeurs lors des funérailles de Johnny Halliday, ou de la victoire des Bleus en 2018, ou encore en hommage à Arnaud Beltrame n'ont pas été suffisant pour unir la population des années 2010 et en faire de nouveau la France.

Comment gérer les diversités et amender un système politique qui avait été conçu sur une organisation simple et bipolaire ? le référendum, la proportionnelle ? Si elle est nécessaire, la réponse politique ne sera pourtant pas suffisante. Penser que le temps va régler les problèmes est une illusion. D'ici dix ans, si aucun acte politique n'est fait, les fractures vont s'élargir, accompagnée par la disparition des générations de l'ancien monde. Il est plus que temps que nos élites, centralisées, concentrées en région francilienne et qui s'intéresse plus aux autres capitales du monde qu'aux régions françaises perdent enfin leurs oeillères.

N'écoutez plus les médias TV, les chaines d'infos continues qui diluent vos neurones dans des flashs inconsistants et transforment l'actualité en une sorte de télé-réalité en direct, lisez plutôt l'Archipel français.

T. Sandorf
Lien : https://thomassandorf.wordpr..
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ou comprendre mieux pourquoi j'aime (parfois, quand c'est mérité), la sociologie, et pourquoi je déteste la plupart de ces gilets jaunes et de ces votes d'extrême droite (plus un peu à l'extrême gauche)
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Alors que l'on se trouve trop souvent inondés dans les librairies et médias d'articles et d'ouvrages multiples sur l'état de la France ou du monde, l'archipel français est une lecture indispensable pour toute personne intéressée par la sociologie et la politique française. C'est un des meilleurs livres politiques que j'ai lu ces dernières années.

Je viens de dévorer le livre en seulement 3 jours, malgré la quantité significative de données, tableaux et cartes. S'il sera impossible de retenir toutes les données de l'ouvrage, les idées fortes sont claires et nettes. L'auteur identifie de nombreuses tendances à l'oeuvre dans l'hexagone : effritement des matrices catholiques et communistes dans notre pays, augmentation du fossé culturel et économique, analyse des dynamiques migratoires en France et recomposition des clivages politiques (pour caricaturer on passe d'un clivage gauche droite, vers un clivage gagnants vs perdants de la mondialisation qui se cristallise lors du 2eme tour le Pen vs Macron).

Ce livre possède plusieurs atouts et forces. Tour d'abord contrairement aux éditorialistes foisonnants dans les médias, Fourquet en tant que professionnel de la sociologie électorale et statisticien, ne juge pas et ne dicte pas vraiment des pistes de sorties, son but primaire et de présenter une instantanée de la France de manière plus exhaustive possible. Bien que des pistes d'analyses soient présentées, à nous de juger si certaines tendances sont plus inquiétantes que d'autres. Ensuite, vu qu'en France les statistiques ethniques sont inexistantes (contrairement à l'approche britannique notamment, vaste débat), Fourquet réalise un énorme travail d'analyse des prénoms, phénomène très intéressant. Ce travail a été malheureusement saisi par de nombreux polémistes très conservateurs pour légitimer leurs thèses sur le « grand remplacement », or l'analyse de Fourquet et bien plus subtile et nuancée. Troisièmement, Fourquet nous surprend fréquemment en analysant des indices surprenants (e.g. réintroduction de l'ours dans les Pyrénées ; analyse de la diminution des fréquentations des colonies de vacances comme témoin que les élites s'orientent vers des loisirs plus différenciés).
Enfin, les clivages politiques sont détaillés dans une précision insoupçonnée jusqu'à présent (exemple : si le Sud Est de la France vote FN en priorité, cette tendance est bien différente dès que l'on s'élève de 200 mètres d'altitude !! je ne fais pas de divulgachage à vous de lire et comprendre pourquoi).
Soulignons que loin d'une analyse parisiano-centrée, l'auteur présente des tendances tout au long du territoire hexagonal. Je pense que toute personne ayant résidée en France trouvera dans l'ouvrage de nombreuses références culturelles et géographiques ‘a son vécu personnel.


Juste deux petits bémols : je trouve que si quasi toutes les composantes du territoire sont analysées, y compris les français de l'étranger, l'analyse des DOM TOM et bien trop passée sous-silence, malheureusement. de plus, il me semble que le focus sur l'analyse électorale de 2017 prend un peu trop de place dans l'ouvrage par rapport aux évolutions sur le temps long (même si je comprends que 2017 soit un point de basculement).
En tous les cas l'ouvrage donne beaucoup à réfléchir, bien que les conclusions que l'on tire ne soient pas forcement réjouissantes sur les inégalités culturelles, individuelles, sociologiques et économiques qui s'aggravent.
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Voici un ouvrage à lire sans attendre, de toute urgence si je puis dire. Pour comprendre et changer son regard. le regard que nous avons sur l'histoire écrite sous nos yeux, celles que nous avons vécue et dont nous avons été chacun à notre manière, les acteurs. Acteurs par l'utilisation que nous avons faite de nos bulletins de vote. Donc par les choix auxquels nous nous sommes associés. Et voilà que dans ce livre, tout se remet en place et les analyses qui sous-tendent ce récit génèrent un nouveau paysage comme après un orage lorsque le panorama se dégage, éclairé par le soleil qui réapparaît. Comprendre les points de rupture est ce qui s'offre au lecteur comme l'aboutissement d'un travail rigoureux, minutieux voire scrupuleux. Jamais ennuyeux, ce récit de la France du XXIe siècle est haletant comme une enquête policière.
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Celui qui connaît l'auteur, via ses interventions régulières à la TV, n'est pas surpris par le contenu de ce livre.
Tout propos est justifié par des chiffres, étayé par des raisonnements clairs, valorisé par des livres ou études cités en référence.
L'archipel ne parle pas seulement des conséquences de la fin du catholicisme comme cadre de valeurs, mais de l'éclatement de la population française en une constellation de populations qui se fréquentent de moins en moins, et se forment en fonction de divers facteurs.
Le contenu est donc riche, intéressant pour qui souhaite comprendre comment se (dé)structure la société française, et comment cela se traduit dans la vie courante et la vie politique.
La conclusion se risque à proposer des solutions claires pour éviter que les différentes composantes ne soient pas voisines mais face à face.
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