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3,79

sur 668 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Alors qu'il patiente dans l'immense hall de la résidence de son client, le général Sternwood, Marlowe fait rapidement connaissance avec l'une des filles de ce dernier, Carmen, qui se jette quasiment dans ses bras.
C'est encore d'elle qu'il s'agit lorsqu'il croise enfin le vieil infirme : elle aurait contracté quelques dettes de jeu auprès d'un bouquiniste qui pourrait se montrer indélicat. Marlowe est engagé pour que ce ne soit pas le cas.
Il est cependant intercepté en repartant par la seconde fille du général, Vivian, une garce hautaine à la recherche de son mari disparu, Rusty Regan, qui imagine que la présence du détective est liée à cette absence inexpliquée.
Marlowe s'intéresse donc au libraire Arthur Geiger et découvre rapidement qu'il fait commerce, sous le manteau, de littérature pornographique, son officine faisant office de couverture.
Afin d'en apprendre plus sur l'homme, il le file jusqu'à son domicile cossu sur la colline et reste en planque jusqu'à ce qu'une jeune femme qui s'avère être Carmen Sternwood arrive à la nuit tombée. Marlowe perçoit comme un flash d'appareil photographique, puis trois coups de feu retentissent dans la maison avant que quelqu'un s'enfuie en voiture par la rue en contrebas.
Marlowe pénètre dans la maison silencieuse et découvre le cadavre de Geiger ainsi que la jeune Carmen, nue et droguée, en train de prendre la pose…

Chandler est le maître des ambiances un peu glauques, s'appuyant avec un humour froid sur son personnage de détective que rien ne peut ni atteindre ni perturber et sur des descriptions incroyablement précises, originales, qui s'inscrivent en toute fluidité dans le récit. Chez lui, on n'entre pas seulement dans une pièce, il prend un malin plaisir à déployer tout son art pour décrire son décor du sol au plafond avant de s'attacher à la femme, forcément fatale, qui, alanguie dans son canapé, vous accueille un verre à la main avant de vous planter un couteau dans le dos. En styliste perfectionniste, il apporte d'ailleurs la même attention à ses dialogues qui toujours sonnent juste.

Même si elles sont « linéaires », les intrigues des romans de Chandler sont toujours complexes et les opérations à tiroirs nombreuses ; le Grand Sommeil ne déroge pas à la règle avec des imbrications dans tous les sens. Une vingtaine de personnages se partagent les rôles, avec quelques points communs comme la corruption, la dépravation ou le fait d'appartenir à la « bonne » bourgeoisie.

– Il avait un casier judiciaire.
Elle a haussé les épaules. Elle a dit négligemment : « C'est qu'il ne fréquentait pas les bonnes personnes. C'est tout ce qu'un casier judiciaire veut dire dans ce pays gangrené par le crime. »

Les assassins potentiels et les cadavres sont nombreux et se bousculent au portillon. Au premier rang, un apprenti maître chanteur, à ses côtés un amoureux éconduit, derrière eux l'amant de la victime ou un directeur de tripot… D'autres suivront et Marlowe, méticuleux et toujours imperturbable, explorera toutes les pistes jusqu'à se convaincre d'avoir trouvé la bonne.

C'est une grande ville maintenant, Eddie. Des gens très violents s'y sont récemment installés. C'est la rançon de la croissance.

À travers le regard de Marlowe, Chandler observe la ville de Los Angeles et la société américaine se transformer et ce qu'il voit ne lui plaît guère. Les « élites » et leurs valeurs se meurent, à l'instar du général Sternwood, tandis que s'installent le crime et la corruption, les magouilles et la dépravation (la pornographie et l'homosexualité sont deux des thèmes abordés dans le roman).
Écrit en trois mois selon la légende et premier roman de Chandler publié aux États-Unis (ce sera le second en France, après La Dame dans le Lac, le Grand Sommeil est le fruit de la refonte en un récit cohérent de deux nouvelles précédemment publiées dans Black Mask. Même si l'auteur déploie tout son talent pour entremêler personnages et intrigues, on a tout de même ce sentiment de point de bascule à mi-parcours, les deux filles du général Sternwood jouant les pivots. On retiendra de cette lecture la richesse des ambiances, des dialogues, et les personnalités fouillées des protagonistes pour oublier le côté emberlificoté de l'intrigue policière et sa grande « explication finale » à la manière des « whodunit » qui, si elle n'est pas sans émotion, donne le beau rôle à Marlowe en lui promettant un avenir (dés)enchanté.
Lien : https://polartnoir.fr/livre...
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On en parle très souvent, de ce Grand Sommeil.
Modèle ayant lancé toute une batterie de vocations chez les lecteurs et aspirants écrivains, avide d'enquête retors et de détective hard-boiled.
Il mérite bien sa place. L'écriture de Chandler est onctueuse, bien qu'on puisse s'étonner de longues plages de description au beau milieu de l'action.
Néanmoins, tous les éléments du polar tel qu'on l'aime était là, couchés sur le papier, noir sur blanc.
Intrigue tentaculaire, secrets, mensonges et décharges de chevrotine.
Puis il y a Marlowe. Philip Marlowe. Détective coriace à la langue bien pendue. Narrateur intradiégétique, il n'a pas son pareil pour disséminer sa douce acidité dans un récit tortueux.
Un incontournable.
Pas le meilleur, mais nécessaire pour mesurer le chemin parcouru après lui.
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"Que d'abîme d'une âme à une autre !" dit Julien Green dans Léviathan. Cela aurait pu être les premières lignes de ce récit (presque un grand roman de genre)
Quand je tombe enfin sur un très très rare roman policer (ou thriller) de qualité, je vais très vite rouspéter parce que la fin n'est pratiquement jamais à la hauteur du reste du roman. Et ici, pour une fois que la fin échappe à cette malédiction, je vais quand même me permettre de râler, si on me le permet.
En lisant la fin du Grand Sommeil, j'ai pensé à ce que Daniel Zimmermann (plus personne ne doit savoir aujourd'hui qui il était) m'avait dit un jour en m'aiguillant pour un léger correctif de mon texte : "Ce que tu ne dis pas, tu le confies à l'intelligence du lecteur".
Si l'histoire avait pris fin avec Carmen tirant sur Marlowe près des vieux puits de pétrole, ça aurait été un grand roman de mon point de vue. Au moment même de la scène, j'ai d'ailleurs tout de suite espéré que Chandler n'explique rien. Que l'on parte avec un détective encore plus désabusé que de normal. Au moment où il explique à Carmen qu'il a mis cinq balles dans le revolver, on sait que ce sont des balles à blanc et qu'il a déjà compris ce qu'il s'est passé.
Chandler ici n'a pas su faire confiance à ce lecteur qui comprend que Carmen n'est pas juste une petite fille paumée, mais une petite fille cinglée, qu'elle tire sur Marlowe comme elle a tiré sur le mari de sa soeur, pour la même raison : ces deux hommes, les deux seuls peut être à l'avoir respectée, à n'avoir pas abusé de son délabrement, ont osé refuser son corps nu d'adolescente offert...
- Oui mais certains lecteurs n'auraient pas compris !
- Et alors ? Faut-il toujours tirer vers le bas quand il s'agit de littérature populaire ?
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Grand classique de la littérature policière, j'ai adoré ce roman dynamique et plein de cynisme et d'humour noir. Avec le fameux détective Marlow qui se sort de toute situation avec détente et nonchalance. Rien ne le choque malgré les personnages désaxés qui entourent la famille Sternwood. Cela m'a beaucoup fait penser au petit livre « pulp » de Bukowski très farfelu avec le même genre de détective que rien n'impressionne et qui continue sa route paisiblement.
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« J'étais correct, propre, rasé, à jeun et je m'en souciais comme d'une guigne. J'étais, des pieds à la tête, le détective privé bien habillé. J'avais rendez-vous avec quatre millions de dollars. »

Premier roman de Raymond Chandler, le maître incontesté du roman noir, « le Grand sommeil » donne vie au détective Philippe Marlow, qui, pour sa première enquête, nous plonge dans la Californie des années 30-40 aux moeurs certes pas aussi jolies que les 2 filles déchantées du général Sternwood, mais tout aussi troubles et corrompues.

C'est donc engagé par le vieux général Stenwood, à demi-paralysé et affublée de 2 filles aussi blonde droguée et allumeuse pour l'une que brune, alcoolique et addict à la roulette pour l'autre que le Privé se lance dans une chasse au maître chanteur, pour le moins agitée, croisant tout ce que la région compte de petites mains corrompues, de flics tout aussi ripoux et où le flingue et l'argent sont de toutes les conversations et bien souvent de toutes les solutions.

Je n'en dirai pas plus et vous laisse faire la connaissance de ce détective aussi cynique que désabusé, non dépourvu de sensibilité auquel l'on ne peut que s'attacher, et peut-être plus qu'à l'histoire, en ce qui me concerne, assez complexe, et qui peut parfois perdre le lecteur dans un sens du détail et des descriptions parfois poussé à l'excès.
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Le vieux général Sternwood fait appel aux services du détective privé Philip Marlowe pour régler un problème de chantage dont il est victime : il semble que sa fille cadette, Carmen, se soit endettée auprès d'un dénommé Arthur Gwynn Geiger. Mais, très vite, il apparaît que les filles Sternwood ne soient pas de tout repos et que la reconnaissance de dettes de la cadette soit le moindre de leurs soucis... Alcool, drogue, jeu, sexualité exacerbée... le milieu dans lequel elles évoluent favorise les rencontres avec de bien étranges lascars. Est-il alors étonnant qu'une histoire meurtre vienne compléter le tableau ?

J'ai beaucoup apprécié l'ambiance du roman : noire, glaciale, glauque dans une époque en demi-teinte où les gangsters sont à la mode et les policiers corruptibles. Les personnages, eux, sont torturés, en prise avec leurs démons - drogue, sexe, jeu, alcool,...- et tentent de vivre, voire de survivre. (Personnellement, je trouve le personnage du "larbin" particulièrement bien vu, il dénote d'ailleurs même un peu dans cette panoplie haute en couleur...) Quant à Philip Marlowe, il campe un détective froid, malin, désabusé, à qui "on ne la raconte pas" et qui ne se laisse pas séduire par les beautés fatales quand bien même elles se jettent à son cou... mais il lui est en revanche impossible de résister aux lignes stylées d'une bonne bouteille d'alcool. Il concentre à lui seul les caractéristiques appréciées aujourd'hui des grands détectives des "bons polars", et ceci bien avant leur heure de gloire... Mais, ne vous y trompez pas, derrière l'atmosphère noire, glauque, parfois malsaine, qui suinte du roman, il y a l'humour, la lucidité, le panache des personnages, leur finesse et c'est un régal !
Lien : http://loumanolit.canalblog...
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le privé Marlowe est engagé pour retrouver des photos compromettantes d'une de ses filles. de ce point de départ apparemment banal, "le grand sommeil" glisse lentement vers une intrigue plus touffue, avec des apparences qui n'en sont pas et des êtres prêts à tout. le récit tient en haleine grâce à l'habileté de l'écrivain qui tisse à la perfection les rapports troubles entre ses personnages et la sensualité qui s'en dégage.
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Publié en 1939 et traduit en français en 1948, le grand sommeil est un roman qui rentre dans l'image que je me fais de ce genre de littérature, avec un privé plutôt mystérieux qui enquête dans des familles huppées de Californie. On se promène dans des vieilles américaines le long de routes tortueuses, on croise des hommes en costume et des femmes fatales qui jouent les mauvaises filles, on suit des maitre-chanteurs et des gros bras qui ne bossent pas toujours pour eux.

Je pense que ce qui m'a plu dans ce roman, au-delà de son intrigue extrêmement bien ficelée, avec diverses ramifications qui se dénouent en fin d'histoire, c'est l'ambiance que crée Raymond Chandler avec son personnage. Philip Marlowe est un observateur qui relate l'environnement dans lequel il se trouve, il nous raconte la ville dans laquelle il vit et enquête. Et il n'est pas là pour mettre toutes ces femmes fatales qu'il croise dans son lit. Et ça, c'est plutôt pas mal !

Reflet d'une époque, d'un genre littéraire également, le grand sommeil est un bon exemple de roman noir américain. A conseiller pour découvrir le genre hard boiled (et accessoirement, avec une traduction de Boris Vian, ce qui ne gâche rien au plaisir !).
Lien : http://croqlivres.canalblog...
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Un grand roman noir que cette première enquête de Marlowe!

Ingrédients: chantage, meurtres, trafics... on suit comme une ombre ce détective, ses filatures et ses planques dans LA pendant les années 30.

J'ai beaucoup aimé cette histoire à tiroirs, délicieusement complexe, avec de nombreux personnages, aristos, flics corrompus, truands sombres et mystérieux... et de multiples rebondissements!

Elégant et cynique, ce héros attachant mêle humour implacable, déductions futées et répliques incisives.

La connivence avec le lecteur est subtile, bien menée, surtout quand il se garde bien de dire aux autres personnages ce que nous on sait;)

Quelle athmosphère... on pense aux couleurs de Nighthawks d'Hopper...
Costards croisés à la Bogart, whisky dans la boîte à gants, rubis sur la cravate, Packard décapotable, roulette au casino...
Les femmes sont au coeur de l'intrigue: secrêtes aux caractères bien trempés, longues jambes et cheveux courts, fatales et déjantées, en robe de velours et petits flingues à crosse de nacre.

Je n'oubliera pas de sitôt sous le style caustique de Chandler, Marlowe le désabusé, ni le vieux Sternwood parmi ses orchidées et ses filles vénéneuses et troublantes.
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Un beau roman noir avec des hommes au chapeau mou, imperméable, alcool et cigarettes et des femmes séduisantes. L'intrigue est complexe, les descriptions assez détaillées mais c'est sans doute ce qui fait son charme. A ne pas lire en "petits morceaux" si on ne veut pas se perdre rapidement.
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