L'île d'été

Ce grand fleuve sinueux a l’habitude de changer de direction pendant les inondations et de se creuser parfois un bras tout neuf… peut-être de faire une boucle vers le Missouri ou même de revenir ver le Kentucky. C’est pourquoi personne ne peut dire vraiment si l’ile d’été est dans le Tennessee, le Kentucky ou le Missouri. Moi, ça m’est égal du moment que peux y aller attraper des tas de poissons-chats, manger et ne pas perdre mon droit de vote dans le Tennessee. Je ne voudrais pas être obligé de changer de politique et voter pour ces vauriens de politiciens du Kentucky ou du Missouri. J’ai assez de mal à trouver le moins nocif des vauriens pour lui donner ma voix dans le Tennessee. » p 15 a 5

- Je ne veux pas passer ma vie au même endroit, comme une vieille souche de noyer plantée dans le sol. Après avoir beaucoup voyagé, je me fixerai peut-être quelque part et je serai heureux. Mais pas maintenant. Je suis convaincu que c’est trop tôt dans la vie, quand il y a tant à voir. » p 112 a – 3

« C’était la deuxième semaine de juin. J’étais aller passer les deux mois d’été à Unionville, qui comptait presque cinq mille habitants et était situé au nord-ouest du Tennessee, non loin du Kentucky. Unionville avait un palais de justice imposant, à colonnes, en pierres grises, une petite prison en briques avec des fenêtres à barreaux, et deux voitures de pompiers rouges aux pneus solides ; bien qu’en ce temps-là il y eût très peu de rues pavées et que la plupart des trottoirs fussent des sentiers caillouteux. » p 9 (incipit)

- Je pense à ce que Troy t’a dit tout à l’heure – que tu en apprendrais davantage près de lui qu’avec des livres de casse. Ça c’est sûr. Tu apprendras à ne pas admirer l’ignorance et les préjugés. » p 25 a 10

- Ce sont des gens qui se servent de la blancheur de leur peau comme d’une menace, comme la matraque d’un agent de police, pour maintenir les Noirs à genoux, suppliant qu’on les laisse vivre. » p 26 a 18

- Je suis en retard… à cause d’une dispute avec ma vieille. Ça fait rudement plaisir de filer loin des criailleries. Comment diable les autres hommes mariés les supportent-ils, Guthry ? Tu es marié – tu devrais le savoir.
- Que t’a dit ta femme, Troy ? Quelque chose que je n’ai jamais entendu ?
- Je n’en sais rien ; mais si tu ne l’as pas entendu, c’est que tu n’as pas encore vécu assez longtemps avec une femme. » p 37 a 8

- Eh bien, en ce qui concerne la pêche, je crois que je suis comme tout le monde, Mister Troy.
- Sacré nom de… Tu n’es pas comme moi, pardieu ! Je suis tout blanc ! et tu es né d’un derrière blanc et d’un derrière noir ! Tu n’es qu’un bâtard nègre quoi qu’il arrive, et tâche de ne pas l’oublier !
- Je ne prétends pas être autre chose que ce que je suis, Mister Troy. » p 40 a – 7

De chaque côté, les maisons étaient si proches qu’on pouvait, en se penchant, baisser les stores des voisins. » p 46 a 13

- Le seul ennui, c’est que bien que je sois seul, je ne peux pas parcourir le monde comme ce gros vieux poisson-chat, et comme les Blancs. C’est ce qui fait toute la différence : ma couleur. Un homme de couleur, comme moi, doit tout le temps faire attention et ne pas s’éloigner de ceux de sa race. C’est le grand malheur qu’il y a à naître noir, mulâtre ou hâlé. » p 114 a 12

- Quand ils me parlent sur ce ton, c’est le seul cas où j’aimerais être blanc pour leur répondre toutes les impertinences que je voudrais. Ce n’est pas de la rancune : c’est le besoin de dire ce que je pense. » p 116 a 11