Biographie très fouillée et très complète de
Jack Kerouac. Beaucoup de noms, de dates et de lieux, au point que l'on se perd parfois. Au début l'approche est chronologique, et puis ensuite l'auteur adopte une approche thématique (
Beat Generation,
Neal Cassady, on the road, les femmes, …), ce qui ne facilite pas la lecture.
Quelques passages néanmoins sont très intéressants et permettent d'éclairer l'oeuvre de l'auteur : mort du frère aîné à l'âge de quatre ans, ce qui confrontera Jack très tôt à la mort et focalisera sur lui toute l'attention maternelle; agonie du père désillusionné et usé; alcoolisme précoce ; intense amitié avec Ginsberg et Burroughs (
Yves Buin leur rend d'ailleurs ici un formidable hommage) ; fascination pour
Neal Cassady, qui lui fait comprendre l'essentiel, càd que l'écrivain est indissociable de la vie ; relation passionnelle, probablement toxique, avec sa mère ; amour du jazz et influence de ce type de musique sur le style de
Kerouac, la prose spontanée, la forme libre, improvisée, improbable, « la forme sauvage » comme il l'appellera lui-même ; son rapport compulsif à l'écriture. Avec en toile de fond, cette question :
Kerouac fut-il jamais heureux ?
Yves Buin revient aussi le rôle bénéfique des dix ans d'anonymat, avant le succès destructeur, où il put écrire onze livres, loin de la pression médiatique et des exigences éditoriales. Il résiste alors au désarroi, au désespoir, à l'indifférence, au rejet, à la solitude, mais est fondamentalement libre, libre d'écrire, de créer ce que bon lui semble. Obscurité salvatrice …
D'autres passages nous font découvrir un
Jack Kerouac peu connu. Un homme resté enfant qui demande la permission de sa mère à chaque fois qu'il veut convoler. Un homme rongé par la paranoïa, conséquence possible de son alcoolisme et de sa toxicomanie. Un homme aux idées très à droite sur la fin de sa vie, raciste, nationaliste et antisémite.
Je crois néanmoins que la meilleure façon d'aborder ce grand auteur du XXème siècle est tout simplement … de lire son oeuvre.