Trente cinq jeunes poètes américains

BEAU JOUR POUR UN LYNCHAGE (Kenneth Patchen)

Les limiers ont l'air de vieux juges tristes
Dans un étrange tribunal. Ils désignent du nez
Le nègre qui s'agite sur son nœud serré ;
Ses pieds s'écartent comme ailes de corbeau
Sur ces hommes d'honneur qui rient comme il s'étrangle.

Je ne connais pas cet homme noir.
Je ne connais pas ces hommes blancs.

Mais je sais qu'une de mes mains
Est noire, et l'autre blanche. Je sais
Qu'on étrangle une partie de moi,
Tandis qu'une autre partie rit avec horreur.

Tant qu'il en sera ainsi
Je ne cesserai de tuer; ni d'être tué.

ESPRIT (Richard Wilbur)
L'esprit dans son jeu le plus pur est comme une chauve-souris
qui se débat toute seule dans les cavernes,
Et s'arrange, par quelque intelligence insensée,
Pour ne pas finir contre un mur de pierre
...

MIND
Mind in its purest play is like some bat
That beats about in caverns all alone,
Contriving by a kind of senseless wit
Not to conclude against a wall of stone.
...