Georges Bordonove était un bon "vulgarisateur", il faisait passer
L Histoire là où elle n'allait pas : témoins ses portraits des rois de France et ce livre sur
Les Templiers. Histoire et tragédie.
Au spécialiste, il n'apporte rien : tout est reprise de ce qui a été dit, de manière approfondie, en maints ouvrages : sur
les Templiers, il y a eu de bons spécialistes qui l'ont précédé, comme John Charpentier et
Laurent Dailliez ; et, après lui, un vrai spécialiste de la question, très informé et très éclairant sur tout ce qui concerne les ordres de Moines-soldats au Moyen Âge, j'ai nommé
Alain Demurger.
Ne demandons pas à
Georges Bordonove ce qu'il ne cherchait pas à faire ; son souci était d'intéresser le grand public à lHistoire, et il l'a fait généreusement ; il ne prétendait pas être un chercheur, il avait une grande honnêteté, et son mérite fut bien d'attirer un large public, curieux des choses du passé, mais intéressé juste ce qu'il faut pour savoir quoi retenir sans entrer dans les "disputes" qui opposent les grands historiens de métier.
Ainsi, sur
les Templiers, il a juste fait un résumé de l'histoire de l'Ordre, depuis sa création (1118) jusqu'à sa liquidation (1307 à 1314), mettant en évidence, comme il est normal, l'utilité de cette phalange de moines-soldats durant les Croisades et la contestation de cette utilité après la perte définitive des États francs (ou latins) de Terre Sainte (1291). Il a analysé brièvement aussi ses structures et son fonctionnement, et abordé la question de son enrichissement et de son rôle de "banquier" et de "trésorier" des rois et princes. C'est cela qui a fait fantasmer tout un chacun, on lui a sans doute prêté plus de fortune qu'il n'en avait, et l'envie et la jalousie expliquent sans aucun doute le pourquoi de sa condamnation sous le roi de France Philippe IV le Bel et le pape Clément V (Bertrand de Got). Car tous les motifs invoqués pour prononcer sa dissolution sont mensongers : s'ils ne servaient plus à rien, que n'a-t-on fait la même chose avec
les Hospitaliers (qui deviendront l'Ordre de Malte) et avec les Chevaliers Teutoniques qui avaient migré du Moyen-Orient à la Prusse orientale ? S'ils avaient renié le Christ et adoraient une représentation diabolique appelée Baphomet, que ne les avait-on dénoncés plus tôt ? S'ils étaient aussi bien possessionnés qu'on le disait - ce qui n'était pas faux - il suffit de voir combien ils avaient de Commanderies et de terres -, pourquoi avait-on laissé faire cela, alors qu'à l'époque il n'était pas rare de voir les Ordres religieux accumuler les donations ?
Georges Bordonove a été un bon avocat des Templiers, tout comme d'autres avant lui et après lui. Et la réponse à l'injustice dont ils ont été les victimes reste invariablement la même : Philippe le Bel les considérait comme les défenseurs d'un État dans l'État, lui qui ne supportait aucune puissance autre que la sienne en son domaine, et comme les détenteurs de biens sur lesquels il voulait, en partie, mettre la main, lui qui cherchait de l'argent partout (chez les Juifs et les Lombards qu'il spoliait).
Quant à savoir si
les Templiers ont quelque chose à voir avec les Roses-Croix et les Francs-Maçons, c'est un autre débat, qui n'a rien à voir avec ce qui nous occupe ici.
Georges Bordonove, tout comme ceux qui respectent la chose historique, n'aborde la question qu'en la survolant, et il a bien raison, car, tout comme ce qui tourne autour d'un prétendu "trésor caché et encore enfoui" des Templiers, cela relève plus du mythe que de la réalité.
François Sarindar, auteur de :
Jeanne d'Arc, une mission inachevée (2015)