Quand on contemple le tableau de Hopper qui sert de couverture à
La maison atlantique, le roman de Philippe besson, on a immédiatement envie d'y aller, de se plonger dans ce bleu, dans tout ce bonheur calme qu'il inspire, de vivre ces moments de sérénité heureuse qu'on imagine. Oui, mais très rapidement on sent que ces moments heureux n'existent pas.
Dans
la maison atlantique, Il y a le narrateur, puis sa conquête d'un été, Agathe, puis Jérémie, il y a les voisins, Cécile et Raphaël, acteurs d'un drame dont ils n'ont pas encore conscience et surtout il y a le père. Si certain personnages ont un prénom, comme une personnalité bien déterminée dans le temps et dans l'intrigue, on ne saura jamais ceux du narrateur et de son père.
Il se présente comme « adolescent et orphelin ». Il est à cette période trouble de l'adolescence où tout est possible, où il n'y a pas de limite, tout est autorisé. Période surtout où les sentiments sont exacerbés, il y a peu de retenue, tout est noir ou blanc, rarement gris, on trouve peu d'excuses aux adultes que l'on ne veut pas comprendre et dont on n'accepte ni les failles ni les petites concessions, ni les défaites. Tout ce que veulent les adultes est ennuyeux, surtout en cette période de la vie où s'exacerbe le conflit parents enfants, dans tous les domaines, études, amours, projet de vie, tout peut devenir source d'affrontement. Au fil des pages, on comprend tout le ressenti de cet adolescent qui n'accepte pas la mort de sa mère, qui rejette d'un bloc ce père absent et égoïste, qui au fond de lui appelle une vengeance pour celle qu'il a aimé, celle qui l'a aimé.
Il évoque presque à chaque chapitre le drame à venir, on sent sa tristesse qui sourde, mais on a aussi l'impression étrange qu'il se pose en observateur parfois calculateur et manipulateur d'une lente descente vers le drame, vers la mort, vers on ne sait quoi. On sent au fil des pages la haine qui monte envers ce père à qui tout réussi, les conquêtes, la carrière d'avocat d'affaires, le plaisir de posséder, des biens, des femmes, et d'être quelqu'un, tout le contraire de notre narrateur. Il évoque ces moments où il aurait pu tout arrêter, il analyse parfois l'engrenage des évènements qui vont mener au drame, drame qu'il aide à cristalliser avec une froide maitrise, qu'il pousse à déclencher sans peut être en analyser toute la portée.
L' écriture est intéressante, des chapitres particulièrement courts, introduits par une phrase, courte elle aussi, qui m'a fait penser au cold-opening des séries télé, où l'on en dit un peu mais pas trop sur ce qui va arriver dans le chapitre qui s'ouvre .
Si ce n'est pas un coup de foudre, c'est en tout cas un livre que je n'ai plus lâché dès que je l'ai commencé, tant l'envie de comprendre, de savoir et d'aller au bout est là, portée par ces annonces successives d'un drame à venir, drame que l'on n'imagine pourtant pas à la mesure de ce qui nous attend.
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