Je peux remercier ma mémoire défaillante qui m'a contraint à relire ce livre pour en rédiger un avis. Je gardais un souvenir plus que mitigé de ma première lecture à cause de deux points majeurs : un personnage principal exécrable et la quasi-absence de romance. Ça fait beaucoup pour un coeur d'artichaut comme moi.
Bref ! Comme vous pouvez vous en douter en voyant la couverture de «
Un mort trop mort », on a droit à un polar, mais ce qui l'est beaucoup moins et ce, même en lisant le résumé, est que l'intrigue se situe approximativement dans les années 2270. Nous voilà donc face à un roman policier futuriste ou plutôt d'anticipation, car ici nul voyage dans l'espace, extraterrestre ou autre, mais plutôt une nette évolution dans des technologies qui nous sont pour la plupart familières.
Je reviens donc sur le premier point qui m'avait déplu : le côté exécrable du personnage principal. Pas de miracle après relecture : Kristjan Gyllenswärd, policier de son état, est toujours aussi imbuvable que le café qu'il s'enfile à longueur de journée ! D'ailleurs, vu la façon dont il fait son breuvage, je me demande à quel point c'est physiologiquement possible sans avoir de graves problèmes de santé. J'avoue que j'ai trouvé plutôt pénible cette insistance de l'auteur à nous rabâcher cette histoire de café. On peut se dire que c'est peut-être pour ça que le policier est aussi odieux, méprisant et insultant envers son entourage notamment professionnel. Dans les dernières pages, on apprend qu'il y a une tout autre raison à son comportement et elle a beau être justifiée, le mal est fait et cela ne nous rend pas ce flic plus sympathique pour autant.
Deuxième point qui m'avait un peu chagriné à la première lecture (mais nettement moins à la deuxième) : la quasi-absence de romance. C'est vrai que je suis une grande amatrice de polar où se mêle harmonieusement une histoire d'amour. Naïvement, en ouvrant un livre édité par les « Textes Gais », je pensais qu'il en serait ainsi. Mais non, l'auteur a vraiment voulu nous écrire un polar et une fois mon « deuil » fait, je l'ai enfin apprécié à sa juste valeur. Mais je vous rassure, Kristjan est amateur de sites de rencontres gays, donc vous aurez droit à un ou deux moments coquins. de plus, il va y faire connaissance d'un mystérieux RhettB. avec qui cela s'annonce plus sérieux, mais même si les choses semblent bien parties, à la fin du livre, nous sommes encore loin d'un « Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants ».
Après ces deux points qui m'ont plus ou moins posé problème, voilà ce qui fait la force de ce roman : le côté policier. À la sauce science-fiction, le polar, car pour l'instant, ce qui permettrait à un être humain de renaître chaque fois à la vie après avoir été tué x fois n'existe pas. Si on enlève le côté futuriste, force est de reconnaître que l'auteur maîtrise parfaitement son sujet notamment dans tout ce qui touche les procédures policières et judiciaires. Là où nombre d'auteurs par leur méconnaissance du sujet évitent de trop en dire,
Alec Nortan y va à pieds joints pour notre plus grand plaisir de lecteurs avides de crédibilité. Attention, je ne vais pas jusqu'à dire que «
Un mort trop mort » est un pur roman policier juridique qui pour beaucoup (et moi la première), serait assommant à lire, mais à son niveau et même s'il manque de profondeur, l'auteur maîtrise parfaitement son sujet. Bravo à lui.
Dernier point qu'il me semble important de souligner : triste de constater qu'en l'an 2270 (environ), il soit toujours aussi difficile d'avouer/assumer son homosexualité dans son travail. Kristjan semble la vivre comme quelque chose qu'il faut à tout prix garder secrète et plus d'une fois, son comportement ainsi que ses pensées frisent l'homophobie. Des associations telles que FLAG ! ont encore du pain sur la planche à en lire
Alec Nortan et sa vision de demain.
Voilà ! Même si je l'ai trouvé au final bien intéressant à lire et nettement mieux apprécier qu'à ma première lecture, j'ignore si je dois considérer «
Un mort trop mort » comme étant indispensable dans votre bibliothèque.
Alec Nortan m'avait grandement enthousiasmé avec son «
Moi, 34 ans, asperger et amoureux » (et celui-là, je vous le conseille +++++++), mais je suis plus dubitative après relecture de ce roman-ci. Un personnage vraiment imbuvable, une « romance » un peu trop en retrait et cette crainte de révéler son homosexualité m'ont, j'avoue, un peu refroidie. Pourtant, de par ses connaissances et la maturité de son écriture (punaise ! suis-je la seule personne au monde à n'avoir jamais vu le mot « autosatisfecit » de sa vie ???????), je suis certaine que si cet auteur bien mystérieux le voulait vraiment, il pourrait nous écrire un méga-super-roman.
À vous de voir si vous voulez tenter l'aventure.