![Tropismes par Sarraute Tropismes](/couv/cvt_Tropismes_7055.jpg)
Doucement, délicatement pour ne pas déranger, pour ne pas éveiller la vigilance de l'autre, celui qui rôde, qui nous épie et qui voit tout. C'est comme ça que j'ai ressenti l'écriture lumineuse de Nathalie Sarraute. Elle a cette façon si évidente de raconter avec des mots simples des choses tellement abstraites, de nous faire prendre conscience des malaises ou des boursouflures que les autres, notre famille, nos amis, nos voisins, nous causent et nous infligent.
Totalement déstabilisant dans la forme mais d'une puissance évocatrice folle, le livre est composé de tableaux miniatures représentant dans leur intériorité des personnages placés dans un cadre familial ou social, et agissant sur le personnage central. Je cherchais initialement le rapport entre ces tableaux mais ai été rapidement rassuré de savoir qu'il n'y en a pas. le fait d'accepter que l'intrigue n'existe pas conduit le lecteur à lâcher prise et à ne prendre les mots que pour ce qu'ils sont. Puisque tout est question ici d'être au monde, de sentir dans leur totalité les choses et les gens qui nous entourent et de constater que l'état dans lequel nous sommes n'est jamais le fruit du hasard, mais qu'il est au contraire induit par des échos générés par les autres.
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Tropismes est un recueil d'impressions, de pensées, de sentiments, dont la plupart des gens ont fait ou feront l'expérience un jour. Chaque récit part d'un cliché, d'une scène courante de la vie, que tout le monde connait ou croit connaitre, et évoque des sensations ou des réactions face à ces scènes.
Basiquement, Tropismes est un recueil de monologues intérieurs, dans un style "flux de conscience" à la Virginia Woolf.
Tropismes regroupe uniquement des textes déconnectés les uns des autres et sans être reliés par une trame narrative, une originalité qui fait sa force et sa faiblesse, mais chaque texte se laisse dévorer comme une petite friandise grâce à une prose coulante faite de phrases soigneusement construites et étoffées.
J'ai spécialement apprécié le deuxième récit (un homme assailli par les jacasseries du voisinage) et le onzième (une femme qui a soif d'apprendre).
Commenter  J’apprécie         30 ![Enfance par Sarraute Enfance](/couv/cvt_Enfance_2072.jpg)
Nathalie Sarraute a écrit ce livre bref à l'âge de 83 ans, par lequel est nous raconte son enfance - ses 14 premières années - vues avec ses yeux d'alors, des yeux d'enfant. Femme du XX° siècle (née en 1900, morte en 1999...), tiraillée entre deux cultures, la Russe, celle de sa naissance, la Française, celle de sa découverte du monde et de ses années d'écolière à Paris, perturbée par la séparation de ses parents, l'éloignement de sa mère et la relative indifférence de celle-ci, l'économie de preuves d'affection de sa belle-mère, la petite fille murit vite: elle comprend rapidement beaucoup de choses, elle apprend en observant son monde, et en lisant aussi. Ses observations sont touchantes; il y a ce qu'il faut de naturel, d'émotion, dans cette vision enfantine des choses, des gens et des circonstances. Et bien entendu, tout cela est éclairé par le talent littéraire et la culture de l'auteur. Un plaisant moment de lecture donc; mais tout de même pas le grand livre que l'on a annoncé et commenté ici et là....
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Un de mes préférés de l'auteure. Nathalie Sarraute nous raconte ses souvenirs, ses joies mais aussi ses peines, elle se confie aux lecteurs de façon très touchante et originale. En plus c'est très bien écrit.
Commenter  J’apprécie         30 ![Le Planétarium par Sarraute Le Planétarium](/couv/cvt_Le-Planetarium_7522.jpg)
Nathalie Sarraute poursuit son exploration des tropismes, l’attitude et le langage sous-jacent situés derrière les mots prononcés conventionnellement dans la vie quotidienne. A partir d’une famille dont elle décrypte les tensions et les menues trahisons, elle met à nu les consciences avec jubilation sous une plume tour à tour empathique et ironique.
Les « cobayes » de Sarraute dans ce livre sont la famille Guimier et leur entourage. Il y a la tante, maniaque, avare, le couple du neveu et de sa femme, qui espèrent mettre la main sur l’appartement de la tante, et l’oncle, frère de celle-ci. Tout ce petit monde en apparence si harmonieux se voue de petites haines, rancœurs et frustrations. Sarraute déconstruit la banalité du langage pour révéler les intentions et pensées sous-entendues de ses personnages. Il y a certes un petit coté » cobaye » chez eux, puisque le travail de Sarraute est unique, mais en même temps, l’auteur révèle une très grande empathie à cerner ainsi les pensées les plus secrètes de ses protagonistes.
Le style de Sarraute est plein de surprises, de comparaisons et de mises en scène du langage souvent surprenantes et très drôles teintées d’une ironie jamais gratuite, mais visant toujours juste. Evidemment, il ne faut pas recherche d’intrigue à proprement parler ici : c’est le langage et ses silences qui sont l’enjeu principal des livres de l’auteur. Je me suis livré une fois de plus à sa lecture avec une jubilation non dissimulée : personnellement, la lecture de ses livres est aussi haletante que celle d’un polar. Un vrai bonheur de lecture !
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Dans la vague du Nouveau Roman, Nathalie Sarraute propose une rencontre entre amis anonymes dans cette pièce de théâtre intitulée "Pour un oui ou pour un non". Les personnages principaux s'appellent H1, H2 et il y a aussi F1 et H3.
Texte sublime où la psychologie des personnages qui se déchirent et qui s'aiment et les intonations subtiles, permettent de comprendre ce qui n'est pas dit. Court et percutant.
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Nathalie Sarraute, (et c’est pour cela que j’aime ses écris), ne raconte pas d’histoire et elle ne décrit pas de personnage. Son sujet est le discours de diverses personnes qui « critiquent » un livre. Mais ces personnes ont-elles seulement lu ce livre ? Ne sont-elles pas des girouettes qui suivent les vents des médias ?
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J'avoue ne pas savoir moi-même pourquoi j'ai aimé ce livre.
Pourtant, Nathalie Sarraute est loin d'être un bon souvenir pour moi : j'avais commencé "Enfance" qui m'était littéralement tombé des mains et la vague des nouveaux romans en général me laisse plutôt de marbre (à part "Le ravissement de Lol V Stein" qui m'a profondément bouleversée) mais là...
Il n'y a pas d'histoire, pas de trame narrative, pas de personnages... mais l'écriture ! Le texte est poétique, "l'histoire" se résume à des pensées fugaces que des anonymes entretiennent, mais c'est bouleversant : j'ai frissonné tout au long de la lecture tellement j'étais saisie par l'écriture et la tristesse du genre humain qui était parfaitement retranscrite...
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C'est une pièce de théâtre typique de cette époque (années 1950-60), où l'intrigue était un prétexte à l'exposition d'une thèse philosophique ou bien psychologique, ce qui est le cas ici. Le récit narratif peut se tenir en presque une ligne : Différentes personnes discutent entre elles, seul un de ces protagonistes se refuse au jeu de la conversation. Ce qui crée un malaise au sein de ce cercle, le meneur en vient même à en perdre son latin. Nathalie Sarraute se plait à grossir le trait et de faire d'un silence banal, un cri assourdissant. Ce qui est certes peu commun mais anecdotique.
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Dans cette pièce, il n’y a pas d’action et très peu de personnages. On est donc bien dans le Nouveau Théâtre, pendant du Nouveau Roman. Tout se joue dans les silences, les non-dits, les phrases suspendues, etc, qui règlent un conflit tu, vieux de plusieurs années, entre deux amis. Cette pièce parle à son lecteur car on a tous connu cela, ce moment de bascule pendant lequel toutes les rancœurs et les interprétations éclatent au grand jour, amenant une résolution définitive. Plus rien ne sera comme avant. Intéressant, mais cela reste du Nouveau Théâtre : comme pour le Nouveau Roman, il y a une certaine forme d’ennui qui s’installe chez le lecteur, ainsi qu’une distanciation vis-à-vis de ce qu’il lit.
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Ce livre m'a été prêtée par une fille avec qui je suis allée à quelques rencards.
Elle m'a prêté son livre préféré du moment, je lui ai prêté le mien.
On a arrêté de se voir, elle ne m'a jamais rendu mon livre, je n'ai jamais pu lui rendre le sien.
Pourtant j'ai bien aimé ce livre, il est profond, il m'a permis de mieux la comprendre et peut-être de mieux voir pourquoi ça n'aurait pas marché entre nous. Résultat des comptes, ce livre est pour toujours attaché à elle, aux quelques baisemains qu'elle aura déposés sur ma main avant de partir, à ce rencard dans un parc dans lequel on a passé des heures à lire alors qu'une troupe de théâtre s'entraînait non loin de nous.
C'est un beau livre, mais je déconseille de le prêter à votre rencard.
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Journal de Natasha-Nathalie durant son enfance. Pas de titre aux chapitres, ce n'est pas un journal romancé.
Juste un écrit sans liaison entre les parties.
On découvre un peu comment vivent les Russes.
Les parents sont séparés et remariés. On lit les liens entre Nathasha et les autres membres, surtout un lien étrange avec sa mère et sa belle-mère Véra.
Je n'ai rien ressenti, plutôt ennuyée.
Les notes ne sont pas en bas de page mais à la fin du livre.
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"Le Planétarium" de Nathalie Sarraute est un des derniers chef-d'œuvre du genre du "Nouveau Roman" un mouvement incontournable de la littérature française qui est maintenant, Dieu Merci, derrière nous. Dans ce roman Sarraute réalise le tour de force d'unir le féminisme britannique avec le nouveau roman. "Le Planétarium" rassemble énormément aux "Vagues" de Virginia Woolf dans le sens qu'elle est constitué des monologues incohérents des personnages qui manquent de lucidité. Chez Woolf le désespoir prime. Chez Sarraute c'est le questionnement qui domine.
C'est un calvaire à lire.
Commenter  J’apprécie         20 ![Tropismes par Sarraute Tropismes](/couv/cvt_Tropismes_7055.jpg)
On ne lit pas les oeuvres de Nathalie Sarraute pour l'histoire.
Sarraute elle-même est la première à reconnaître que, dans ses ouvrages, « après les différentes phases par lesquelles on passe, tout se termine presque toujours par rien (...) : qu'est-ce qu'il y a, qu'est-ce qui s'est passé ? Mais rien ».
Apparemment affranchie des contraintes de l'histoire, elle affirme qu'en écrivant elle erre « à l'aventure, dans la solitude, sans soutien. Je m'avance je ne sais où ».
Et pourtant, il y a bel et bien une histoire dans les écrits de Sarraute. Mais elle tourne autour d'un « rien » qui se dérobe tout en se désignant. La littérature de Sarraute se donne pour but de « ra conter » l'histoire impossible des tropismes — ces mouvements fuyants, rythmiques, à peine conscients, qui participent d'un ordre de « réalité » que, dans les essais de l'Ère du soupçon, l'auteur nomme le : « noyau dur (...) un foyer de chaleur qui irradie (...) quelque chose (…) qu'on ne sait désigner autrement que par des termes imprécis, tels que « la vérité » ou « la vie ». C'est à cette réalité-là qu’avec Nathalie Sarraute nous revenons toujours.
Les Tropismes contient en germe tout ce que cet auteur allait développer dans ses ouvrages suivants, c’est « la substance de tous mes livres ».
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Deux bons amis se fuient... Pourquoi? C'est ce qu'essaye de découvrir l'un d'eux... A partir de là, les dialogues vont dans tous les sens, à partir de mots, d'expressions ou d'intonations pas toujours comprises de la même manière.
J'avoue que la sauce n'a pas pris et que je referme ce petit livre en restant sur ma faim.
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Elle est là, encore une expression-titre dans l'œuvre de Sarraute. Expression qui déclenche les mouvements tropismiques chers à l'auteur du Planétarium. Ce qui est là est une idée, idée qui ne semble pas coller avec celle d'un personnage qui est convaincu de détenir la vérité. Mais quel est le là ? Où se situe-t-il ? Chez un autre personnage au départ, puis, ce personnage étant parti, cette idée rebelle est partout, telle une obsession, hantant la pensée du "petit dictateur". Obsession d'autant plus grande que le personnage n'a seulement connaissance que de l'existence de cette idée et ne connaît rien de sa définition puisqu'elle n'a jamais été citée par le contradicteur. Sujet anodin en apparence, mais pouvant porter à de sombres conséquences.
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Un livre simple authentique beau qui parle à tout le monde et permet de rencontrer aimablement Mme Sarraute immense écrivain.
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Analyse très intéressante sur ce qui nous conditionne au moment de lire un livre.
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