Citations de Louis Corman (175)
On croit souvent être en droit de critiquer cette indiscipline de beaucoup de vies d'artistes, et l'on va même jusqu'à penser qu'avec une vie mieux réglée leur talent aurait pu se manifester avec plus de vigueur encore. Il apparaît bien que cette manière de voir est une erreur, inspirée par une certaine conception moralisante de l'existence, qui oppose le Bien et le Mal comme des irréductibles. Dans la réalité, je pense qu'une mystérieuse solidarité se constate souvent chez beaucoup d'hommes et de femmes de grande valeur entre leur talent et le désordre de leur vie, qui les expose parfois à une mort prématurée. Je l'ai montré entre autres dans l'étude que j'ai consacré à [i]Edith Piaf[/i], en soulignant que celle-ci s'est donnée tout entière à son génie de chanteuse, et [i]en même temps[/i] s'est abandonnée sans réserve aucune à ses passions tumultueuses, en vertu même du laisser-aller qui l'a livrée sans défense au gaspillage de ses forces vives et à la drogue.
Comme je l'ai souligné à plusieurs reprises, les bons écrivains font de la morphopsychologie "sans le savoir", parce que leur intuition leur permet de faire vivre dans leur pleine authenticité les personnages qu'ils mettent en scène dans leurs romans ou pièces de théâtre.
Vulnérables déjà aux situations les plus ordinaires, les Rétractés le sont encore plus en cas de choc, par exemple à l'occasion d'un deuil (au sens large du mot). Le retrait en soi est alors plus accentué, sous la forme d'un refus de la situation, d'un refus de se nourrir, de se confier, de parler, pouvant aller jusqu'à un véritable blocage, et bien entendu une quête constante de solitude.
Nous avons bien que d'incessantes mutations fonctionnelles s'accomplissent dans l'intimité secrète de notre organisme. Mais nous savons aussi que ces mutations nous restent en grande partie cachées. En revanche, les transformations morphologiques qui les accompagnent sont constamment sous notre regard et, si nous savons observer, elles vont à chaque étape de l'existence nous révéler ce qui se passe dans les profondeurs.
Il est facile d'échapper à ce piège de la caractérisation rigide quand on adopte la méthode morpho-psychologique.
Car j'insiste : la morpho-psychologie n'est pas un système, c'est une méthode.
Il ne suffit pas d'étudier la psychologie dans les livres.
Il faut la vivre.
Dans la réalité, je pense qu'une mystérieuse solidarité se consiste souvent chez beaucoup d'hommes et de femmes de grande valeur entre leur talent et le désordre de leur vie, qui les expose parfois à une mort prématurée.
J'ai déjà indiqué le rôle essentiel de la fatigue, du sentiment de fatigue qui, bien loin de signifier un épuisement des forces, comme on le pense souvent, est au contraire une cloche d'alarme nous prévenant que l'épuisement est imminent si l'on ne s'arrête pas. J'ai appelé cela une "réaction de mise à l'abri"', car la fatigue met en effet le sujet à l'abri des dangers de l'épuisement.
L'attraction mutuelle des complémentaires
Un dicton populaire affirme que "les extrêmes se touchent". Il serait plus judicieux de dire que "les extrêmes s'appellent", substituant ainsi le point de vue dynamique au point de vue statique.
Ma conclusion, c'est qu'on ne doit pas se laisser abuser par l'harmonie d'un visage, sa beauté plastique, qui dès l'abord nous séduit, et réciproquement qu'on ne doit pas interpréter la disgrâce d'un visage comme un signe de valeur médiocre. Le point de vue dynamique qui, comme je l'ai dit, est celui de la vie même nous oblige à considérer que les dissymétries morphologiques ne sont pas des exceptions ni des anomalies, mais qu'elles sont la règle et témoignent d'ordinaire de la vitalité de l'être. Et, de même, nous devons admettre que les antagonismes au sein de la personnalité psychique, significatifs de ce dynamisme, représentent souvent des valeurs supérieures à celles de la personnalité parfaitement équilibrée. Tout le problème est donc pour le morphopsychologue d'apprécier quelle est l'importance de nos dissymétries, d'établir si elles sont déséquilibrantes pour la personnalité et peuvent entraîner sa chute, ou si au contraire elles permettent, en prenant un risque, de réaliser un équilibre supérieur, qui fait progresser.
En psychologie, il faut se garder soigneusement des schémas, car ceux ci ne peuvent jamais nous rendre fidèlement la réalité vivante.
A conception nouvelle, désignation nouvelle, et si j'ai créé le mot morpho-psychologie, c'est pour marquer précisément qu'un grand pas a été franchi dans le sens d'une conception scientifique.
Sans une large réceptivité à tous les courants humains, il n'y a pas de connaissance psychologique possible.
Comprendre, c'est égaler, a dit Balzac, et l'on a jamais si bien dit : tant vaut l'observateur, tant vaut l'observation.
La morpho-psychologie n'a donc rien de commun avec les disciplines statiques de la phrénologie, de l'anthropométrie et de la physiognomonie usuelle.
C'est parce que la fonction biologique d'une part s'objective dans la morphologie (comme l'a montré Sigaud), d'autre part constitue le fondement de l'individualité psychique (comme je le soutiens) qu'il y a entre les traits de la forme et les traits du caractère une constante et bien significative relation.
... la morphopsychologie nous conduit à une nouvelle lecture des oeuvres romancées, car elle fait vivre devant nos yeux, avec un réalité particulièrement expressive, le caractère des héros du livre.
En contrepartie, l'intuition des écrivains gagnerait à s'appuyer sur une bonne connaissance de la morphopsychologie. Et de même les metteurs en scène, au théâtre ou au cinéma, titreraient grand profit en recherchant, pour le choix de leurs personnages, des visages qui soient en accord avec le caractère du rôle, au mieux de se laisser influencer, comme souvent, par la célébrité des noms.
La pratique de cette science nous a amenés à comprendre que la personnalité des grands hommes et leur oeuvre forment un tout, d'où il se déduit qu'on peut accéder à une meilleure compréhension de l'oeuvre en étudiant cette personnalité dans tous ses aspects.
... Pascal n'appartient donc pas, comme il est habituel chez les grands hommes, au type d'expansion cérébrale. [...] la morphopsychologie trouve ici une application remarquable, car elle nous explique le caractère concret de l'intelligence de Pascal, dont les découvertes, notamment en physique, ont été marquées non par des conceptions théoriques, mais par un esprit expérimental, et l'on sait que ce grand homme a été le premier introducteur de la science expérimentale en physique.
... on peut dire sans abus de langage qu'il y a une intelligence de l'instinct, une intelligence du coeur et une intelligence du cerveau. l est toutefois incontestable qu'il existe, dans un même secteur d'activité, des gens plus intelligents que les autres, et nous en revenons alors, après ce détour, au point de vue quantitatif, mais d'une tout autre manière que celle en usage dans les écoles ou dans les pratiques des tests.
... Est intelligent, dans un secteur d'activité déterminé, celui qui est apte à résoudre les problèmes qui se posent dans ce secteur. L'essentiel, pour le conseiller morphopsychologue, est donc de connaître d'abord les capacités requises par tel mode d'existence ou de profession, puis d'apprécier si le sujet possède les capacités équivalentes.