Citations de Henri Poincaré (60)
Douter de tout ou tout croire, ce sont les deux solutions également commodes qui l'une et l'autre nous dispensent de réfléchir.
La mathématique est l'art de donner le même nom à des choses différentes.
La pensée ne doit jamais se soumettre, ni à un dogme, ni à un parti, ni à une passion, ni à un intérêt, ni à une idée préconçue, ni à quoi que ce soit, si ce n'est aux faits eux-mêmes. Pour elle, se soumettre, ce serait cesser d'exister.
La vie n'est qu'un court épisode entre deux éternités de mort et dans cet épisode même la pensée n'est qu'un éclair au milieu d'une longue nuit mais c'est cet éclair qui est tout.
Le savant doit ordonner : on fait la science avec des faits comme une maison avec des pierres. Mais une accumulation de faits n’est pas plus une science qu’un tas de pierres n’est une maison.
« Si c’est par la logique qu’on démontre, c’est par l’intuition qu’on invente »
On vous a sans doute souvent demandé à quoi servent les mathématiques [...]. Parmi les personnes qui font cette question, je dois faire une distinction; les gens pratiques réclament de nous le moyen de gagner de l'argent. Ceux-là ne méritent pas qu'on leur réponde; c'est à eux plutôt qu'il conviendrait de demander à quoi bon accumuler tant de richesses et si, pour avoir le temps de les acquérir, il faut négliger l'art et la science qui seuls nous font des âmes capables d'en jouir.
(p.137-138)
Le mathématicien pur qui oublierait l'existence du monde extérieur, serait semblable à un peintre qui saurait harmonieusement combiner les couleurs et les formes, mais à qui les modèles feraient défaut. Sa puissance créatrice serait bientôt tarie.
Comprendre la démonstration d'un théorème, est-ce examiner successivement chacun des syllogismes dont elle se compose et constater qu'il est correct, conforme aux règles du jeu?...Oui, pour quelques-uns; quand ils auront fait cette constatation, ils diront: j'ai compris.
Non, pour le plus grand nombre. Presque tous sont beaucoup plus exigeants, ils veulent savoir non seulement si tous les syllogismes d'une démonstration sont corrects, mais pourquoi ils s'enchaînent dans tel ordre plutôt que tel autre. Tant qu'ils leur semblent engendrés par le caprice et non par une intelligence constamment consciente des buts à atteindre, ils ne croient pas avoir compris.
Sans doute, ils ne se rendent pas bien compte eux-mêmes de ce qu'ils réclament et ils ne sauraient formuler leur désir, mais s'ils n'ont pas satisfaction, ils sentent vaguement que quelque chose leur manque.
La liberté est pour la Science ce que l'air est pour l'animal.
La géométrie n'est pas vraie, elle est avantageuse.
La pensée n'est qu'un éclair au milieu de la nuit.
Mais c'est cet éclair qui est tout.
Les mathématiques peuvent comme les autres sciences procéder du particulier au général
Une réalité complètement indépendante de l'esprit qui la conçoit, la voit ou la sent est une impossibilité. Même s'il existait, un monde aussi extérieur nous serait à jamais inaccessible.
L'instinct, c'est la routine,et si la pensée ne le fécondait pas, il ne progresserait pas plus chez l'homme que chez l'abeille ou la fourmi.
[...] la première condition de l'objectivité: ce qui est objectif doit être commun à plusieurs esprits, et par conséquent pouvoir être transmis de l'un à l'autre....pas de discours, pas d'objectivité
Qu'est-ce donc que,une bonne expérience? C'est celle qui nous fait connaître autre chose qu'un fait isolé; c'est celle qui nous permet de prévoir, c'est-à-dire celle qui nous permet de généraliser.
Car sans généralisation, la prévision est impossible.
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Pour prévoir il faut donc au moins invoquer l'analogie, c'est-à-dire, déjà généraliser...l'expérience ne nous donne qu'un certain nombre de points isolés il faut les réunir par un trait continu; c'est là une véritable généralisation.
On construit la science avec des faits comme une maison avec des pierres.
Mais une accumulation de faits n'est pas plus une science qu'un tas de pierres n'est une maison.
Les pessimistes se trouvaient ainsi toujours débordés, toujours forcés de reculer, de sorte qu'à présent je crois bien qu'il n'y en a plus.
Mon intention n'est donc pas de les combattre puisqu'ils sont morts.
Mais les savants croient qu’il y a une hiérarchie [9] des faits et qu’on peut faire entre eux un choix judicieux ; ils ont raison, puisque sans cela il n’y aurait pas de science et que la science existe. Il suffit d’ouvrir les yeux pour voir que les conquêtes de l’industrie qui ont enrichi tant d’hommes pratiques n’auraient jamais vu le jour si ces hommes pratiques avaient seuls existé, et s’ils n’avaient été devancés par des fous désintéressés qui sont morts pauvres, qui ne pensaient jamais à l’utile, et qui pourtant avaient un autre guide que leur caprice.