Citations de Gérard Alle (39)
La vie prépare sa comédie d'un jour, sous la férule du temps. Naître, paraître, disparaître en est le scénario et tous les personnages, jusqu'au plus méchant brin d'herbe ne courent que pour l'amour. Que de voies détournées, que de prudence extrême, de mensonges et de haines, de calculs ignobles de chausse-trapèze, de violence, d'ennui, de grains de sable dans le moteur du monde pour cet amour là.
Campagnes concentrées. Poules entassées. Cochons hallucinés. Consciences concassées. Grands festivals d'illusions contre petits bistrots qui s'essoufflent. Le monde ne se refait plus au comptoir de l'estaminet. Rêves en fumée. Tissu qui s'effiloche. Faillites retentissantes ou épidémies salutaires ? Peu importe.
Et l'odeur pestilentielle de l'algue verte en putréfaction chasse le touriste loin des embruns...Les hôtels ferment...Merci, les embruns du Crédit agricole !
Ah Douarnenez! Pourquoi l'ivresse des escales d'autrefois emporte-t-elle encore les gens quand le port agonise?
Les forces de police, en Grande Bretagne, lors des manifestations, par exemple, cherchent à éviter tout affrontement, et je crois que c’est une bonne chose. Les Britanniques ne nous voient pas comme des ennemis. Ce qui se passe en France, où les forces de l’ordre cherchent systématiquement l’affrontement pour dissuader les gens de descendre dans la rue, je crois que ça ne marche pas. La confiance disparait, les gens se radicalisent, et à un moment ou à un autre, il faudra en payer le prix : la violence se retournera contre ceux qui l’exercent.
Ce genre de type sud Loire horripile Isabelle qui ne supporte pas les velus trapus, ceux qui marchent avec des oursins sous les bras, encombrés par cinq kilos de couilles qu'ils grattent et soupèsent plusieurs fois par minute, comme pour vérifier si un arabe ou un pédé ne les a pas volées, eux qui, dans l'échelle des valeurs, considèrent leur bagnole comme la plus belle bite du monde.
Comme dans toute administration, les meilleurs et les originaux, ceux qui pourraient devenir des héros, ont toutes les chances de rester dans le rang. Bien sûr, il reste les pourris. Mais être flic, c’est déjà beaucoup. Pas la peine d’en rajouter Tout me porte donc à penser qu’il n’y a pas plus de héros et de pourris chez les flics que chez les péquenots et je ne trouve donc aucune raison valable pour faire jouer aux flics un rôle excessivement important dans mon aventure.
Les gens d’ici, ils sont pas comme toi, ils sont comme moi, ils aiment leur pays. Et plus il est pourri, plus ils l’aiment. Plus tu leur dis qu’ici c’est foutu, qu’il faut foutre le camp, plus ceux qui restent sont fiers d’être là. Ils ont la rage.Aucun moyen d’agir, aucune imagination, mais la rage.
Ils ont déclaré la guerre. Faut pas se laisser faire... Et puis, ça me plaît. Dans le temps, c’est pas que j’aimais chicaner,mais quand même, je laissais pas ma part au chien, non plus J’ai pas changé. On vieillit... On change pas tant que ça, dans le fond.
"Tant qu'il y a du flow dans ma tête, dans un coin de ma couette, derrière mon pilier cachette, assis sur ma glacière à roulettes."
- Même que les gens nous croiraient pas, ajoute Mac Intosh.
- Qu'est-ce qu'ils ne croiraient pas ? demande Dr Singh.
- Ils ne croiraient pas que des flics soient capables d'avoir des discussions d'intellos, comme ça.
Au fond de la quatrèle, il y a un tambour de machine à laver, avec du maïs comme appât. Y a juste la place pour un lapin. Quand il entre, ça fait tourner le tambour qui est relié à une clochette par une ficelle. Quand je l'entends sonner, je tire sur la ficelle et ça ferme la trappe, tu sais, là où on met le linge. J'ai plus qu'à aller chercher le lapin.
Avant le prochain grain, il faudra butter les patates.
Je croyais que la littérature française faisait de moi un citoyen du monde. La belle affaire !En fait, cette soi-disant universalité me coupait du monde. De mon monde. Je voulais être de partout et j’étais de nulle part. J’avais fini par me convaincre que l’ouverture au monde devait s’accompagner de la fermeture aux
miens.
Le temps des pestes, du choléra ou de la vérole, revint en mémoire. Ce n’était plus de l’histoire ancienne. C’était hier. Comme en ces temps de malheur, les mois noirs succédaient aux mois noirs, identiques. Froids et humides. Comme en ces temps de misère, on s’attendait à voir apparaître un autre méchant oiseau noir, au détour du chemin : quelque prédicateur,assis sur les marches du calvaire. Toujours là, dès que le malheur assaille.
Au pas de charge, le célèbre acteur de cinéma arpentait la salle. On eût dit un
empereur de retour d’une bataille victorieuse. Il s’arrêtait parfois, et des
femmes lui baisaient les mains, retrouvant comme par enchantement les gestes pieux, la ferveur de leurs arrière grands-mères, lorsqu’elles s’imaginaient en présence d’un saint homme. Porte-bonheur.
Il faisait un temps noir. Il faisait un pays noir. Il aurait pu être roux ou bien vert, vert-de-gris, gris bleu, mais là, il était noir. D'un noir pas franc, d'un noir qui ne se dit pas, d'un noir d'ardoise. Autrefois, on avait ouvert les entrailles de la terre pour en extraire de quoi couvrir les toits. Drôle d'idée. Ça n'avait pas duré. Dans ce pays, rien ne dure que la dure réalité noire.
Joël avait menacé de la lui faire bouffer, sa pétition, au Parigot, et les pétitionnaires terrorisés avaient fini par la ranger dans un tiroir, se contentant, temps d'écrire au ministre et au président de la République. Ils attendaient des réponses polies, rien de plus. Des courriers de faux-cul, aux cachets prestigieux. Les lettres signées de la main de ses « grands hommes », produisaient chez les voisins de Joël ce genre d'orgasme hygiénique strictement réservé aux individus ayant une serviette éponge en guise de cerveau.
Le temps des pestes, du choléra ou de la vérole revint en mémoire. Ce n'était plus de l'histoire ancienne. C'était hier. Comme en sept ans de malheur, les mois noirs succédaient au mois noirs, identiques. Froids et humides. Comme en ces temps de misère, on s'attendait à voir apparaître un autre méchant oiseau noir, au détour du chemin : quelque prédicateur, assis sur les marches du calvaire. Toujours là, dès que le malheur assaille. Prête à y reconnaître le doigt d'un dieu rédempteur, la rançon de quelques fautes commises. Fossoyeur de l'âme.
J'aimerais recevoir une lettre… Michel, l'autre, le héros, je l'ai mis au trou, comme moi, pour qu'il en reçoive une belle. Si belle… Claire, la jolie Claire y avait glissé des fleurs séchées, pour sécher ses larmes. Elle y avait dessiné la liberté. C'est dur à dessiner, la liberté. Elle n'y parlait que du dehors et cela transpirait le dedans. Lorsqu'il était dehors, Michel croyait que son pays n'était que noir, qu'il en avait perdu son nom. Tout n'était que pluie glacée, dureté de la terre, dureté des hommes…