Christopher Buckley: 2013 National Book Festival
- (...) pourquoi faites-vous ça?
- Par défi, dit Nick. C'est le boulot le plus dur que je connaisse.
Elle parut ne pas gober ça. Mieux valait se la mettre dans la poche avant l'émission.
- Vous voulez vraiment savoir pourquoi?
- Ouais.
- Ma façon à moi de réguler la démographie, murmura Nick.
- Cass, dit-il d'un ton posé, que je t'explique. Nous sommes une entreprise de relations publiques. Notre métier est de... d'appliquer des feuilles de vigne. Nous répandons le calme là où il y a de l'agitation. S'il y a du bruit, nous apportons le silence. Nous améliorons les choses. À défaut, nous cherchons à donner l'impression de les améliorer. Tu vois où je veux en venir ? Tu crois que nos clients viennent nous demander notre aide parce qu'à nos heures perdues nous encourageons la population à... se révolter contre le gouvernement des États-Unis ? La réponse est claire : non.
Philomène me fixa de ses grands yeux noisette. J'étais incapable d'argumenter avec elle. Sur le moment, son interprétation du récit tiré de mon bréviaire me parut claire comme de l'eau de roche. Elle venait de me révéler la Troisième Loi de la Croissance Spirituelle et Financière :
" Tant que Dieu connaît la vérité, peu importe ce que vous dites à vos clients. "
(p.71)
- Comment ça s'est passé avec Mitchell ?
Le président et Clenndennynn regardaient la télévision dans les appartements privés de la Maison Blanche. La candidature de Pepper ouvrait tous les bulletins d'infos.
- Il va faire trancher la tête d'un cheval et la faire glisser dans vos draps.
- Bien, fit le président.
(p.76)
Ce n’est pas parce que j’ai vieilli que je ne connais plus la colère. Un bon scotch me permet simplement de la dominer.
- On est donc passé de « Ne faites confiance à personne ayant plus de trente ans » à « Ne buvez pas de scotch ayant moins de trente ans ». C’est ça qu’elle est devenue, ta révolution ? » p 94
Nick leva la main. Oprah et les autres intervenants le regardèrent avec une incertitude certaine.
- Je peux fumer ? fit-il.
Le public en resta bouche bée. Et Oprah elle-même, baba.
- Vous voulez fumer ?
- Oui, la tradition veut que, face au peloton d’exécution, le condamné ait droit à une dernière cigarette.
Pendant toute ma vie professionnelle, j’ai fait passer des pets de lapin pour du civet. Je vais avoir cinquante balais. J’entends claques les tongs de la Grande Faucheuse qui approche. Il faut que je me magne. Il est temps que je me mette aux pets de lièvre. » p 224
- Qu'est-ce qui vous fait penser que Graydon Clenndennynn... me déteste ?
- Eh bien, il m'a dit : "Dexter Mitchell incarne tout ce qui est pourri et ignoble dans le gouvernement d'aujourd'hui." Ce qui m'a donné d'emblée une petite idée.
- Vraiment ? Eh bien. Eèk. Venant de lui c'est un compliment, je dois dire. Mais je vous remercie de votre franchise, juge.
- La franchise n'a rien à voir là-dedans. Il m'a dit de vous le dire.
(p.99)
La Wasabie avait beau menacer périodiquement le Matar en agitant son cimeterre et en parlant de s'ouvrir un passage jusqu'à la mer, ces foucades n'étaient pas prises au sérieux par l'émirat. Protégé par l'Amérique, son économie garantie par le pétrole wasabien, ses religieux locaux étant gras, heureux et peu sévères, le Matar était la Suisse du Golfe. Ne lui manquait que le Matterhorn et une industrie chocolatière.
Sa voisine lisait le journal. Ca faisait des jours qu'il n'en avait pas vu un. Ses yeux s'égarèrent sur la page. Il y avait une photo de Banion face à une forêt de micros.
BANION CRIE AU "SABOTAGE" DE SON EMISSION
- Ne vous gênez surtout pas ! fit la lectrice.
- Pardon.
Pourquoi les gens voient-ils un inconvénient à ce qu'on lise par-dessus leur épaule ? De peur qu'on leur vole l'encre ?