Ceux à qui je pense n'auront aucune pitié pour vous. Ils vont vous tuer. Peut-être pas par balle, mais ils vous enverront pour vingt-cinq ans au bagne. Vous ne supporterez pas ça.
Sauf à une condition, si vous vous préparez à mourir dès la première minute.
Tout ce qui leur restait de réel était ce qui se passait dans leur proximité immédiate. Le lendemain, l'après-demain étaient entre les mains de quelqu'un d'autre qui décidait de la vie et de la mort. Ce quelqu'un n'avait pas de visage, n'était pas une personne. Insaisissable, invisible, immense, délimitant le cercle à ne pas franchir, il proclamait la liberté dans les discours, sur les affiches, en eau, en grammes de pain. Pour un instant, un jour.
Si tout le monde calculait la forme et la quantité de liberté où il serait le plus heureux, le régime perdrait le plus important : Ce serait la fin de l'insécurité, de la peur, de l'espérance et du pouvoir des grammes.
Au cours de l'histoire de l'humanité, il y a eu beaucoup trop de gens éliminés par des comptes rendus rédigés par ceux que les livres des écoliers ont décrits comme des saints ou des héros.
Dans le monde, on remplit des bibliothèques d'ouvrages qui traitent des droits de l'homme, on les protège par des conventions, par des religions, par des lois, et ici, le temps a rebroussé chemin, de mille ans.
On assassine parce que l'autre est allemand,japonais,hongrois ; on assassine parce que l'autre a une opinion différente de la vie. On assassine, assassine...
Ce temps est révolu". " Lequel ?"
" Celui où c'étaient les procureurs qui recevaient les primes. Le Comité central arrêtait le plan quinquenal, le commissariat au plan calculait combien de millions de bras étaient nécessaires à son accomplissement, et les procureurs faisaient le nécessaire pour qu'il n'y ait pas d'obstacles à la construction du communisme".