J'ai pas mal lu
Marc Villard ces derniers jours. Avec deux ou trois autres écrivains, ses bouquins sont des refuges quand ça déchante autour. Voici « L'homme aux doigts d'or », dans la première moitié du livre, Villard s'amuse à tisser de courtes histoires autour de personnes célèbres, la seconde moitié reprend des nouvelles inédites ou déjà parues ailleurs à petits tirages.
Ces dix nouvelles sont si serrées, comme on le dit d'un café, que j'ai l'impression d'avoir lu dix romans. Villard ne s'embarrasse pas de détails inutiles ni descriptions oiseuses, des personnages balancés en trois coups de crayon et une histoire nerveuse lui suffisent.
Qui sont et de quoi causent les deux femmes à chapeau du « Chop Suey » d'
Edward Hopper. Pourquoi
Miles Davis tourne-t'il une publicité pour un scooter Honda ?
Chet Baker, la trompette et l'héroïne réunies dans la même personne. Balancer ses potes toxicos ou dealers n'est pas une bonne idée s'il veut continuer à jouer, « Tequila » est une nouvelle plutôt cassante.
Villard fait du noir pur jus. Un homme dont la fortune vient de s'évaporer brutalement va mourir en mangeant des myrtilles, il aurait pas dû cogné sur son épouse. Un yakusa se fait découper par un mexicain dans un luxueux appartement newyorkais, après faut éponger. Thelonious Monk passe le bout de sa toque en astrakan dans une nouvelle plutôt faiblarde, ça arrive.
En 2012, paraît « Bairro Alto », deux nouvelles accompagnées de photographies de
Cyrille Derouineau. On retrouve la noirceur des bas quartiers chère à l'auteur. « Belém » est un bijou à côté duquel il ne faut pas passer, on y apprendra qu'un rossignol ne fait pas que chanter.
Dans la seconde nouvelle, « Rua Rosa », porter des chaussures en serpent gris est une idée saugrenue.
Randy Newman et
Ray Charles servent de bande-son à la dernière nouvelle, en plus des trois jazzmen croisés plus haut, un gamin sifflote « My Favourite Things », des guitares mexicaines résonnent au loin, un personnage ressemble vaguement à Karajan, on se rappellera que la musique de « Metropolis » a été composé par un certain Gottfried Huppertz. La musique, toujours la musique, comme bande originale et bien sûr dans les phrases de ce styliste hors-pair qu'est
Marc Villard.