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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Les urgences à l'hôpital. Comment ne pas se sentir concerné ? Claire Vésin aurait pu réaliser un documentaire, un article de journal ou de magazine. Elle a choisi de prendre la plume, et de nous donner à voir l'envers du décor, les coulisses, les personnages qui nous accueillent lorsque, à bout de souffle, nous débarquons tant bien que mal dans ce lieu qui va nous sauver.
Nous sommes à Villedeuil, une ville fictive de grande banlieue parisienne, Villedeuil et ses tours, sa ZUP, son hôpital.

Quatre personnages s'y rencontrent chaque jour : Jean-Claude, chirurgien qui a largement passé la cinquantaine ; sa carrière, elle est désormais derrière lui. Il n'a compté ni le nombre de ses patients, ni ses heures. A tel point que sa femme et son fils ont préféré prendre le large. Aimée, jeune médecin, a réussi brillamment ses examens et se prépare a choisir un hôpital pour effectuer son internat ; ce sera celui de Villedeuil - elle ne recherche ni gloire ni glamour - et a des raisons personnelles de se perdre en grande banlieue. Laetitia, infirmière née à Villedeuil, voit l'hôpital comme un moyen de promotion sociale. Fabrice, médecin au Samu, connaît mieux que personne les malades qu'il conduit, chaque jour, à l'hôpital.
Quatre personnages forts qui veillent à ce que les malades soient pris en charge dans les meilleures conditions possibles, que les diagnostics soient posés pour que les traitements puissent débuter sans délai.
Mais les moyens font défaut. L'hôpital est dans un état déplorable, fissuré, et le personnel médical a bout de souffle, non remplacé, à la merci d'une erreur... Toutes les conditions sont réunies pour que quelque chose de grave se passe. Que se passe-t-il lorsque le drame survient ? Comment survivre ?
Blanches.... comme les blouses des personnels de santé, comme les nuits de garde, comme les lumières crues des salles de l'hôpital....

J'ai beaucoup aimé découvrir ce premier roman de Claire Vésin, cardiologue qui exerce dans une grande ville du nord de la banlieue parisienne. Elle a su recréer une ambiance, et mettre en relief l'humanité des personnels de santé. de tous les thèmes qui sont développés dans ce roman, c'est celui de la grande solitude qui m'a le plus interpellée. Aimée et Jean-Claude, lessivés après une journée épuisante, n'ont personne à qui parler. La femme et le fils de Jean-Claude sont partis, l'ami d'Aimée a préféré disparaître brusquement. Laetitia est en couple mais son ami, confronté à ses propres soucis, n'a pas de temps à lui consacrer. Fabrice va bientôt être père, et sa femme - qui prépare fébrilement l'arrivée de l'enfant - ne mesure pas à quel point un fossé se creuse dans leur couple.

Comment gérer une charge mentale si forte ? Au final, à Villedeuil ou ailleurs, qui prend soin de ceux qui prennent soin de nous ?


Un roman bien écrit qui donne à réfléchir, et des personnages dont on a beaucoup de mal à se séparer, la dernière page tournée.




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Blanches est un premier roman très maîtrisé, au carrefour très littéraire du politique et de l'intime... Très maîtrisé parce que l'autrice sait raconter une histoire, tout en ayant une plume qui ne recule devant aucune ambivalence ni aucune complexité humaine, ce qui me ravit.

Un premier roman, mais pas une plume sans expérience... car c'est celle de "@madameledocteur_v_" sur instagram, dont les posts extrêmement humains et empathiques nous permettent de garder foi en les médecins. On y retrouve ce ton dans Blanches, avec un résultat empreint d'une mélancolie qui porte tout le texte.

Un premier roman, et à coup sûr, pas le dernier... car lorsque j'ai demandé à l'autrice pourquoi elle a planté son décor au début des années 2010, alors que la dégradation de l'hôpital public ne s'est hélas pas arrêtée depuis, elle m'a répondu : « J'ai choisi délibérément de situer l'intrigue en 2013-2014 car j'ai quitté l'hôpital en 2010 et je sais qu'aujourd'hui, la situation est bien pire que le portrait que j'en fais (intérimaires, recours obligé à des médecins à diplôme étranger pour faire tourner les services, crise sanitaire…). En outre, je continue d'exercer en banlieue et j'ai eu la sensation d'un tournant réel dans la vision de la banlieue et des communautés maghrébines après les attentats de 2015, sujet qui mériterait d'y consacrer un traitement spécifique ».

Alors évidemment, la dégradation de la situation sociale du pays ne fait plaisir à personne. Mais qu'il y ait toujours des écrivains pour nous plonger dans les coulisses en évitant tout manichéisme, ça, c'est une vraie belle nouvelle.

Une autrice est née, et je m'en réjouis follement.
Lien : https://www.20minutes.fr/art..
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Le titre « Blanches » me plaît... Un beau titre, direct, aveuglant : « blanches » comme les tenues, comme la lumière artificielle qui inonde les couloirs et les salles d'opérations ; nuits blanches des gardes avec trop peu de personnel… le stress et la fatigue. du blanc en contrepoint de cette ville de banlieue parisienne, nommée Villedeuil dans cette fiction, s'inspirant d'un réel étouffant.

Au sein d'un hôpital public qui se fissure de toute part, ils partagent joies et échecs, détresse et amour du métier. Malgré les difficultés, ils tiennent, jusqu'à ce qu'une nuit cet équilibre soit remis en question, bouleversant leurs vies.

Jean-Claude Pouillat est un personnage attachant, un chirurgien qui a passé toute sa carrière dans cet hôpital à proximité des tours d'une ZUP. Il est devenu mélancolique et solitaire suite à une vie familiale explosée, sa femme partie au Québec et ses fils loin de lui. Depuis il boit trop. Laetitia est infirmière a l'accueil des urgences. Son rôle est essentiel et elle est très investie. Son compagnon, Kamel, a bien réussi dans ses études, un diplôme d'ingénieur en poche, il passe des entretiens pour obtenir un emploi. Aimée, jeune femme brillante marquée par un amour tragique avec Arnaud, un des fils de Jean-Claude Pouillat, débute l'internat et choisit d'effectuer son premier stage à Villedeuil, pour se rapprocher du père d'Arnaud. Un peu perdue, solitaire depuis la disparition d'Arnaud, elle se sent attirée par Fabrice, médecin au SAMU, marié et bientôt père, ce qu'il vit mal. Les personnages secondaires sont aussi intéressants : Flora et son mari, Gilles, le père d'Aimée, médecin également... Lors de ces mois vécus ensemble, leurs destins vont s'entremêler dans le quotidien stressant des urgences, avec le risque de dérapage toujours possible. Ce qui ne va tarder !

L'écriture est directe, précise et sans détours, juste ce qu'il faut pour décrire, analyser, préparer le lecteur pour la suite, lecture addictive qui empreinte à certains codes du polar. Je ne crois pas avoir vu cela souvent : ces lignes sautées, « blanches » elles-aussi, qui donnent la respiration et la possibilité d'imaginer ce qui vient d'être lu. J'ai noté une grande maîtrise dans la manière de retranscrire les nombreux dialogues. Un découpage rigoureux, mois par mois sur deux années intenses pour Aimée, ce qui cadre bien avec un environnement scientifique très organisé ou qui devrait l'être. Et pourtant l'amour pour les personnages, pour les gens surgit à chaque page.

L'autrice connaît ce milieu, cela se sent, sa parole est juste. J'admire cette écriture, expression irrépressible pour un livre non formatée, montrant dans la mesure l'entre soi à l'oeuvre dans les quartiers, jusqu'à son expression dans la prise en charge des malades. Que de qualités : scénario savamment construit, psychologie des personnages tout à fait passionnante – je me suis cru par moment dans l'excellente série « En thérapie » –, jusqu'à la fin qui sait nous retenir sans tracer un chemin exact car l'avenir est toujours incertain, dépendant de nos choix individuels et collectifs.

Claire Vesin est née en 1977 à Champigny-sur-Marne. Après une adolescence aux États-Unis et des études de médecine à Paris, elle décide d'exercer en banlieue parisienne, où elle vit aujourd'hui. « Blanches » est son premier roman. Un premier roman poignant. Claire Vesin fait entendre la voix sensible de celles et ceux qui font l'hôpital public et sont marqués à jamais par le combat pour soigner dignement. Un livre reçu dans le cadre de la sélection du Prix du livre Orange qui m'a permis de passer un excellent moment de lecture et de découvrir une nouvelle autrice de talent.

J'ai l'impression que ce sont les professionnels du soin, tels que Martin Winckler (et Claire Vesin…) – Thomas Lilti aussi au cinéma –, qui ont le mieux su traduire ce qui se passe à l'hôpital en produisant des fictions marquantes. Peut-être du fait qu'ils sont au plus près de la vie… et de la mort ? Qu'en pensez-vous ?
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Chronique avec photo sur Blog Bibliofeel, lien direct ci-dessous

Lien : https://clesbibliofeel.blog/..
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Aimée choisit de faire son premier semestre d'internat aux urgences d'un hôpital de banlieue. Personne ne comprend son choix: avec ses brillants résultats, elle était en tête de liste pour des hôpitaux bien plus prestigieux.

Dans cet hôpital, elle retrouve le père de l'homme qu'elle aime, l'homme disparu, le drogué, l'irrécupérable. Tant de non-dits sont restés enfouis autour de lui. Peut-être qu'en se rapprochant du père, retrouvera-t-elle un peu ce qui lui manque tant.

Dans cet hôpital, c'est un autre monde qu'elle découvre, celui de la petite France, celle qui ne sait rien, obéit, se fait discrète. La France de Laetitia l'infirmière et Kamel surdiplomé au chômage. Celle de Flora, la concierge taciturne qui souffre en silence d'une douleur atroce dans le dos.

C'est aussi la France d'un hôpital, dernier îlot de vie dans une banlieue dévastée, abandonnée, autrefois si pleine de vie. Un hôpital agrandi au petit bonheur la chance, laid, avec des médecins épuisés, trop peu nombreux, dans lequel une jeune interne se retrouvera une nuit seule aux commandes.

J'ai dévoré cette histoire, j'ai adoré ces personnages, j'ai savouré la plume de Claire Vesin. Un premier roman très réussi, dont je suis sortie avec mélancolie tant j'avais envie de rester avec ces personnages, si vrais, si attachants.

Notre hôpital va mal. Claire Vesin sait de quoi elle parle, et je sais de quoi parle Claire. Mais comme pour l'école, c'est un système à deux vitesses: à la petite France le délabré, le déserté, l'absence de mots pour le dire, l'absence d'argent pour aller ailleurs. C'est à cette France que Claire Vesin donne une voix.

Un énorme coup de coeur !
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Contexte : les urgences d'un hôpital de banlieue ouvrière parisien.
Personnages : un chirurgien en fin de carrière (torturé), une jeune interne (ambitieuse mais dépassée par ses émotions), une infirmière (qui cherche sa voie), un urgentiste du SAMU (passablement confus dans sa relation aux femmes). Leurs vies vont se mêler et se heurter un soir de Noël dans une tragédie qui pourrait être quotidienne tant leur monde est fragile mais qui ne devrait pas l'être si tout cela tournait comme il se doit. Cela ressemble étrangement à ce que vit la fonction hospitalière, au bord du gouffre et de la panique, sans cesse dans la crainte d'une erreur, mais le plus souvent épuisée de porter la vie, parfois sans solution, sans moyens, sans issue. Bien écrite, l'histoire se met en place, chacun à sa manière y joue son rôle, c'est touchant et édifiant.



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Fait rarissime, j'ai lu ce livre dans la journée. C'est dire si je pèse mes mots lorsque je le qualifie d'addictif.

Il ne s'agit pas pour autant d'un page turner à proprement parler, il n'y a pas cet insoutenable suspens qui nous pousserait à vouloir vite savoir, mais plutôt une immédiate empathie qui nous permet d'être comme partie prenante dans cette histoire à la fois ordinaire et singulière.

Avec Blanches, Claire Vesin ne nous invite pas à lire un manifeste récriminatoire et dénonciateur en faveur du service public mais une simple tranche de vie qui met en lumière l'action d'un groupe de soignants dévoués, impliqués, mais confrontés aux limites inhérentes à une certaine réalité contextuelle contre laquelle on aimerait trouver encore la force et les ressources nécessaires pour se battre.

Mais le combat est quotidien, c'est celui qui consiste à affronter simplement chaque jour qui passe en gardant l'envie de bien faire et l'amour du prochain.

J'ai toujours été entouré de soignantes : ma grand-mère, ma mère, mes soeurs et jusqu'à mon épouse ont travaillé ou travaillent encore en milieu hospitalier. Je n'ignore donc rien de ces histoires d'hôpital qu'on ne lit pas dans le journaux mais qu'on entend souvent à table, à l'heure des repas.

J'ai aussi été plus personnellement confronté au système hospitalier en qualité de patient (quel mot merveilleusement adapté !) se rendant aux urgences à plusieurs reprises, la dernière fois le mois dernier.

Mes sentiments vont de la colère à la reconnaissance en passant par le plus totale incompréhension. Des prises en charge héroïques ou hasardeuses. le patient ne choisit pas, il bénéficie ou bien il subit. Mais que dire du personnel soignant ? Il sert, et il subit.

Et de quoi bénéficie-t-il donc ?

Je réponds en mon nom : de ma gratitude.

Et aussi de mon admiration lorsqu'en plus d'être médecin on est capable d'être une remarquable primo-romancière !
Lien : https://cequejendis.fr/2024/..
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Aujourd'hui pas de polar ou de roman noir mais un roman empreint de tragédies, de triste réalité, de déceptions, de désespoirs, de mauvais choix, d'erreurs humaines et de conséquences parfois fatales.
Dans son poignant roman Blanches, Claire Vesin nous parle de ces hommes et ces femmes que souvent on ne devine que derrière un masque. Quand on est obligé de se rendre aux urgences on est angoissé, impatient. On a l'impression que personne ne prend en compte notre souffrance ou notre inquiétude. On peste après les médecins et infirmières parce qu'on attend plusieurs heures d'être vus tout en redoutant le diagnostique qui va être fait.
Mais nous est qu'il nous arrive de nous demander qui est la personne en blouse blanche qui nous reçoit à l'accueil ? Qui est ce médecin qui a l'air si jeune et si fatigué ? Qui est cet autre médecin, plus âgé, moins avenant, plus sec comme insensibilisé ?
Claire Vesin va donc faire vivre le lecteur pendant quelques heures auprès de Laetitia, infirmière d'accueil des urgences d'un hôpital en zone défavorisée. Elle est en première ligne, elle évalue et « trie » les degrés d'urgence. Elle vit avec Kamel qui a grandi en ZUP et qui malgré son diplôme d'ingénieur ne trouve pas de boulot.
Il y a aussi Aimée, jeune interne, dont le compagnon s'est volatilisé sans un mot. Aimée enchaîne les gardes dans un service des urgences qui ne désemplit pas. Elle est chapeautée par un « sénior ». En principe. C'est la loi. Mais des médecins, il n'y en a pas assez, personne ne veut venir travailler en zone défavorisée. Alors tout se met en place pour une erreur : manque d'expérience, fatigue.
Jean-Claude est chirurgien, lui aussi enchaine les opérations au bloc. Lui aussi a des problèmes privés qui peuvent entacher le professionnel. Lui aussi tire sur la corde mais doit avant tout protéger l'hôpital.
Et enfin, Fabrice, médecin du SAMU. Fabrice, marié et qui pourtant ne voit qu'Aimée.
Toutes ces tranches de vies, Claire Vésin nous les partage pour montrer où le système de soins en est, en France, depuis trop longtemps. Pour qu'on réalise que ce ne sont aussi que des humains derrière les masques chirurgicaux, des humains qui ont souvent la vie d'autres personnes entre leurs mains, que si l'erreur est humaine, dans leur métier, elle peut être fatale.
Après avoir lu ce texte poignant, peut-être râlerez-vous un peu moins fort la prochaine fois que vous devrez aller consulter aux urgences…
Super texte pour un thème nécessaire à aborder enfin.

Lien : http://www.evadez-moi.com/ar..
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« Blanches », prend sens lorsque l'on sait que Claire Vesin, côté ville est cardiologue et connaît toutes les arcades du monde hospitalier.
On ressent d'emblée, un respect pour le fond de « Blanches » et un intérêt vif pour une lecture dont on pressent l'exactitude dans les longs couloirs glacés où déambulent ceux et celles qui oeuvrent avec altruisme.
Contemporain, d'une justesse sans faille, émouvant, « Blanches » est une immersion entre les murs d'un hôpital, celui de Villedeuil, aux bordures de Paris.
La trame est l'idiosyncrasie sociale, la réalité vive et âpre d'un hôpital où d'aucuns ont la déontologie chevillée au corps.
L'empathie, et l'abnégation de soi, la soumission aux soins. Combler les failles sociétales.
Claire Vesin est en recul. Elle cède la place aux protagonistes.
Ce n'est pas un essai, mais une fiction gémellaire de la réalité. Ici, l'écriture est loyale. C'est un récit qui évite le pathos. Un plongeon sidérant, d'ombre et de lumière.
Tous, ici, deviennent des emblèmes. Chacun son rôle, sa fonction, son histoire de vie.
Le puzzle s'assemble.
Jean-Claude est chirurgien. Il a l'expérience de son âge. La maîtrise innée de ses gestes. Il travaille à plus d'heures, l'exutoire, la passion et la vocation.
Il est d'écueil et de chagrin. La lassitude se reflète sur la blancheur chirurgicale de Villedeuil. Il est seul. Sa femme est partie avec son plus jeune fils. L'aîné se droguait, fragile, la chute d'Icare, il a disparu, un point blanc dont on ignore la destinée.
Aimée est une jeune femme qui décroche par choix son premier stage d'internat dans cet hôpital. Elle aurait pu faire ses preuves dans un C.H.U beaucoup plus prestigieux et non pas en banlieue. Mais, elle aussi est en quête. Elle veut se rapprocher de Jean-Claude. Elle aimait Arnaud, le radeau de la méduse de Géricault. Ils sont tous les deux en péril et se raccrochent inconsciemment aux malades et au labeur incommensurable, lourd d'un défi quotidien.
Laëtitia est une jeune infirmière qui gère l'accueil aux urgences. Tremblante de peur, de l'erreur de diagnostic. Elle « trie » les malades, et affronte la salle d'attente bondée et impatiente.
Fabrice est médecin au SAMU. Sa femme attend un bébé. Mais il va sentir en Aimée, une vulnérabilité, dont il pourra tirer profit. Un masque chirurgical blanc sur son coeur.
Ce microcosme est le déploiement des habitus en version 3D. Sociologique et psychologique, d'aucuns sont ici un symbole. Jusqu'au jour de l'erreur fatale le soir de Noël. Et la neige tombe sur les doutes, les faiblesses, les trahisons et les fatigues mentales.
Le silence de la faute, les idéaux blessés dans leur chair. « Blanches » est judicieusement un lanceur d'alerte.
Ce tissage fascinant, clairvoyant est un cri silencieux de révolte. Il dévoile jusqu'au vertige la lutte au quotidien. L'exigence de justice. L'éthique qui peut sombrer par grands vents. C'est aussi un lever de voile magistral sur l'humain. Il pointe du doigt là où ça fait mal : jusqu'où le serment d'Hippocrate ?
Une fresque hospitalière pétrie de sentiments. Publié par les majeures Éditions La Manufacture de livres.
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Villedeuil, une ville fictive de région parisienne. Son hôpital public en bout de course, son service des urgences saturé les trois quarts du temps. Claire Vesin a choisi de faire évoluer sa galerie de personnages dans cet environnement. Il y a Jean-Claude, le chirurgien solitaire qui adore sa ville et qui souhaite rester travailler dans cet hôpital coute que coute malgré sa réputation et malgré les difficultés au quotidien. Il y a Laetitia, infirmière travaillant aux urgences à l'accueil et qui est née ici. Un poste difficile à l'entrée des urgences, dans lequel les soignants doivent orienter au plus vite les cas qui arrivent selon la gravité. Laetitia rencontre des difficultés avec ses nouvelles fonctions. Mais il y a aussi Aimée, une jeune interne qui a choisi les urgences de l'hôpital de Villedeuil pour son premier stage, contre toute attente. Et enfin Fabrice, un ancien médecin de l'hôpital qui travaille au SMUR, et qui va bientôt être père. Claire Vesin s'attarde sur ces vies qui gravitent autour de l'hôpital. Des trajectoires qui subissent les conditions de travail qui se dégradent en milieu hospitalier. Des infrastructures qui deviennent insalubres au peu de temps à allouer au patient, en passant par le manque cruel de moyen humain, matériel. Claire Vesin sait de quoi elle parle et avec beaucoup d'humanité elle relate cette lutte au quotidien pour continuer à soigner dans ces conditions. L'évènement grave, le dérapage n'est jamais loin. Cela retombe sur les patients de la ville, mais en réalité c'est aussi tout un tissu social qui est impacté. L'hôpital offre un soin de proximité, un soin accessible. Et comme dans de nombreux exemples, la structure est plus que jamais en danger. Claire Vesin écrit un roman important, prenant de bout en bout et qui sonne juste.

extrait : "Ce n'était pas grand-chose de plus que ça, les urgences, finalement : la somme du banal et de l'horreur, la vie qui glissait entre les doigts malgré les efforts ; la mort, omniprésente, sonnant la fin des réjouissances."

Lien : https://lesmafieuses.wordpre..
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Ma première claque littéraire de 2024. Ce livre se DEVORE.

BLANCHES est une fiction à la structure plutôt élaborée sur fond réaliste (un hôpital de banlieue parisienne populaire - "en crise" comme on le sait-). Dans ce décor y évoluent des femmes et hommes, les "soignants" : nous suivons la vie de quelques uns d'entre eux, pendant une année.

CLAIRE VESIN décrit avec une écriture rapide, efficace et sans frou-frou les entrelacs que dessinent vie personnelle et vie professionnelle. Elle arrive à transcender dans ses descriptions tous les petits gestes et paroles qui semblent anodins, mais en disent tellement sur l'être humain. Les scènes à l'hôpital, comme en dehors, sont un régal pour le lecteur.

Y sont décrits, surtout, avec une très grande acuité les rouages psychologiques qu'on trouve derrière chaque choix, chaque décision. C'est bluffant de réalisme : les personnages sont incarnés et apparaissent REELS.

Au milieu du roman, un accident tragique survient. Un accident évitable. Et c'est justement le caractère évitable de cet accident qui le rend très difficile à accepter pour certains des protagonistes : les plus jeunes.
L'autrice, qui a la grande intelligence de rester à bonne distance de son histoire et de ses personnages, ne condamne, ni ne juge personne : c'est au lecteur de se faire son opinion et de réfléchir, s'il le souhaite.

Au delà de l'histoire parfaitement maîtrisée, certains verront dans ce livre un témoignage du délitement du service public, ou bien une ode à la médecine et à l'hôpital. D'autres y verront une déclaration d'amour à la banlieue qui transparaît. Je vois dans BLANCHES un roman d'apprentissage d'une grande force, qui laisse, une fois terminé, longtemps en apesanteur, en pleine réflexion et heureux.

BRAVO.
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