La terre d'ici te connaît
Et à présent, elle doit s'habituer à moi
elle me flaire
Je traverse l'histoire
arpente le chemin tracé par mes ancêtres
passe à côté des murets de pierres qu'ils ont construits
des greniers qu'ils ont remplis de foin
des granges qu'ils ont bâties
des champs qu'ils ont cultivés
année après année
les traces de leurs vies
se recouvrent
s'effondrent
ensevelies par l'herbe, les broussailles et la mousse
je me promène dans la nuit de juin dépourvue d'ombres avec le goût du Talisker en bouche
il flotte dans l'air une odeur du foin fraîchement coupé
de pommes de terre nouvelles
de goudron et de neige
Mes pas battent la terre
elle les écoute
et chuchote
je te reconnais
je sais qui était ta mère
Vous savez, tout est sacré dans la forêt : l'eau qui étanche ma soif, les animaux qui donnent leur vie pour moi. Les arbres qui m'offrent un abri et le bois qui me réchauffe. Tous les jours, la forêt m'est une bénédiction.
Je me suis installée sur un arbre couché et, ma chère Charlotte, j'ai été saisie par la beauté de ce moment. D'abord, le ciel est devenu rouge, presque écarlate, avec des tâches roses et jaunes. Puis le soleil s'est levé à l'horizon et les rayons ont traversé la forêt, ornant les ombres des arbres de gravures dorées. Je n'ai jamais écrit de poèmes, mais à ce moment-là, mon âme en est devenu un.