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EAN : 9782226053121
359 pages
Albin Michel (01/03/1991)
5/5   1 notes
Résumé :
Dans les rebonds successifs de la guerre et de la persécution, Marianne Sperber, une petite fille rousse et juive, faite pour le bonheur, va se révéler d'une énergie indomptable : pour essayer de piloter sa famille à travers l'Europe ; puis, pour tenter d'en disputer les lambeaux aux sbires de Vichy, à la férocité des Nazis ; pour maintenir et prolonger en tout cas, à travers sa propre vocation musicale, l'idéal de ce père tant admiré, pieux et candide, qui rêvait d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Avez-vous déjà entendu parler de la Maison des enfants de Moissac durant la Seconde Guerre mondiale ? Avez-vous déjà entendu parler de Shatta et Bouli Simon ?

Pendant la Seconde Guerre mondiale, à Moissac, Shatta et Bouli Simon, un couple d'éclaireurs israélites de France, ont dirigé La Maison des enfants au 18 quai du port. Ils ont hébergé, caché et sauvé de la déportation vers les camps de transit, de concentration et d'extermination de nombreux enfants juifs.

Ils ont bénéficié de l'aide d'une partie de la population locale et de certains responsables politiques, en particulier les deux maires Roger Delthil et Louis Moles, ainsi que des artisans de la ville qui employaient en apprentissage les adolescents de la maison.

L'association "Ville de Justes, oubliée" oeuvre à garder la mémoire de la maison des enfants juifs de Moissac. En 2013, un premier colloque avait réuni plusieurs centaines de personnes.

Dix habitants de Moissac sont honorés comme Justes parmi les Nations : Manuel Darrac, Henriette Ducom, Jean Gainard, Alice Pelous, Alida Bourel, Henri Bourel, Pierre Bourel, Renée Bourel, Albini Ginisty et Ernestine Ginisty.

En 1991, Pierre Rouanet dans Nous allions être bien à Karlovy Vary est un des premiers à rendre hommage à Shatta et Bouli Simon, ainsi qu'à cette entreprise de résistance. Il évoque aussi le rôle de l'État français dans la déportation des réfugiés juifs, à travers l'histoire de la famille Sperber.

Marianne Sperber est une petite fille juive née en Allemagne en 1930, à Berlin. Fille d'immigrés polonais, elle est obligée de fuir vers la Tchécoslovaquie, en 1938, avec sa famille, ses parents, son frère et sa soeur. Ils fuient les persécutions nazies. Mais l'Allemagne ne tarde pas à envahir une partie de la Tchécoslovaquie, obligeant une nouvelle fois la famille Sperber à partir se réfugier en Belgique.

En 1940, les Allemands pénètrent en Belgique, et Marianne et sa famille se retrouvent à nouveau dans un train, cette fois-ci en direction de la France. À Gardelles, ils ont le statut de réfugiés, on les parque dans un camp à Miégean. M. Sperber est séparé de sa femme et de ses enfants. À cause des privations, les plus jeunes enfants Hannah et Eliezer tombent malades. Leur périple les mènera jusqu'à Vallurgues où se trouve une maison réservée aux réfugiés. Certains d'entre eux seront envoyés au camp des Milles, antichambre de la déportation vers les camps de concentration et d'extermination nazis.

Ce livre m'avait été offert dans les années quatre-vingt-dix, peut-être 1995, je l'avais gagné au concours national de la résistance et de la déportation. En faisant un peu de ménage dans ma bibliothèque, je l'ai retrouvé et j'ai eu envie de le relire, de donner envie à d'autres lecteurs de le découvrir. Peut-être était-ce, entre autres, pour cela qu'il nous avait été offert.

Adolescente, c'était surtout le personnage de Marianne qui m'avait marquée, son courage : dans tous leurs voyages, elle sert d'interprète à ses parents, elle est toujours présente pour soutenir, aider son père, Nathan Sperber. Je me souvenais de l'émotion que j'avais ressentie en lisant la dernière lettre que ce père adresse à sa fille le 27 août 1942. Puis il y a Moissac, Shatta et Bouli qui accueillent ces enfants seuls et livrés à eux-mêmes, l'amour de la musique, Pablo Casals, le grand musicien catalan mais comment continuer à interpréter la musique alors que les plus grands compositeurs étaient allemands, le peuple qui a privé Marianne de ses parents ?

Ce roman historique est poignant, tragique. Pierre Rouanet était né en 1921, il a été combattant volontaire de la France Libre de 1943 à 1945. Son écriture lyrique m'a plu, il rend un bel hommage à tous ceux qui ont tenté de refuser la barbarie, la bassesse de la persécution et de la délation, tout en évoquant aussi ces comportements et tous ces camps de réfugiés, antichambres de la déportation, qui existaient en France, comme le camp des Milles. Je connaissais peu ce sujet et je crois qu'il reste encore à ce jour peu connu.

J'ai eu l'impression que Pierre Rouanet avait probablement eu l'occasion de rencontrer Shatta car c'est un très beau portrait qu'il effectue de cette dame, j'ai ressenti toute l'admiration qu'il avait pour elle. En lisant la biographie de Pierre Rouanet, j'ai vu que son père avait été à la Libération préfet de Tarn-et-Garonne. le personnage du préfet, dans le roman, M. Bru, me semble avoir été inspiré par ce papa, qui a consacré sa vie à servir le bien public et qui voulait rétablir l'honneur de la République, perdu momentanément à cause du gouvernement de Vichy, complice des nazis.
Lien : https://laurebarachin.over-b..
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Papa avait écrit :
« 27 août 1942,
« Notre train monte vers le Nord. Nous allons franchir ce soir la ligne de démarcation. Maman et Papa vous embrassent très fort.
« En nous attendant, avancez dans la vie. La meilleure conduite est la plus simple. Il suffit de garder en tête le repère que voici :
Quand un être humain termine sa vie, il ne reste de lui que ce qu’il a donné. Et cela comptera double, s’il lui a été permis de le faire dans la joie.
« Le mal ne survit pas. La damnation de celui qui agit par goût de la puissance est que toute trace de ses pas est effacée aussitôt après son passage, même dans le cœur de ses propres enfants.
« Créez et offrez le plus de choses que vous pourrez, le plus gracieusement possible.
« Honorez le Tout-Puissant et respectez sa Loi.
« Qu’Il me donne la force de vous bénir tous les trois.
« Nathan Sperber. »
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- La musique était allemande.
À la réflexion, ils savaient qu’elle allait le dire. Ils n’ajoutent rien. […]
Vous ne pouvez pas comprendre, vous ne pouvez pas savoir, je ne peux pas comprendre, je ne peux pas en faire le tour, je ne peux pas pleurer,
Je ne peux pas les appeler sur ce clavier, je ne peux pas les bercer d’une berceuse,
Ni les héler d’un hymne,
Ni les toucher
Ni toucher leur terre ou leur cendre, mes doigts ne seront jamais interprètes.
La beauté, Maman, Papa,
La grande colonne invisible qui devait monter de la musique, au détour d’un silence, pour être le pivot de l’harmonie du monde,
Maman, Papa,
Cortèges par millions de même pas fantômes,
Maman, Papa, rien que du vide derrière la porte scellée de la Bâtisse-Rouge, aucun harmonique ne prolonge les coups du gras de mon poing, et j’ai le corps vidé d’appel,
Maman,
Papa,
Il n’y a pas d’au-delà, il n’y a plus de mémoire, et leur nom se calcine,
Notre train remonte vers le Nord,
Ils ont sans doute eu froid.
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Pourquoi Pétain avait-il fait ça ? Donnés, même pas vendus, même pas échangés. Livrés, livrés tout court par Pétain, vingt mille à la pelle sur un quai de gare, dans la zone de France qui se racontait qu’elle était libre.
Nous franchirons ce soir la ligne de démarcation.
Au-delà ?
La terre d’Allemagne s’en tait encore et pour toujours.
La fille qui a été volontaire aux Milles ne connaissait pas M. et Mme Sperber.
Marianne : - C’étaient des wagons comment ?
- Il en fallait beaucoup, beaucoup. Vingt mille personnes en deux jours… Ils amenaient les vieux wagons qu’ils avaient sous la main… Vous savez, les Français avaient peur que les Allemands ne les leur retournent pas, ils avaient l’habitude.
- Les plus vieux, alors, avec des banquettes en bois ? Pour un si long voyage…
- Oui, les plus vieux. Ce n’étaient pas des wagons à banquettes. Ce n’étaient pas des wagons pour gens humains.
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Un petit hasard et plusieurs dévouements avaient permis à M. Bru d’échapper à la rafle des déportations, le lendemain du débarquement en Normandie.
Il se tenait à la règle qu’il s’était donnée dès son adolescence, à l’extrême fin du XIXe siècle : ce à quoi il touche devra marcher pour le bien public. Ainsi de son métier : puisqu’il lui a fallu passer le concours des Postes : les P.T.T. seront le beau service du public. Il a même la foi qu’un jour viendra bientôt où le service public marchera si bien par lui-même qu’il ne sera plus besoin du carcan d’un État politique. Le voilà, comme vont dire les ministres, un anarcho-syndicaliste.
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Aucun ne parlait des siens, ni de la manière dont il les cherchait, et cependant les autres sentaient à quoi s’en tenir.
Un silence leur était commun, une impossibilité de dire, dont personne hors de leur communauté ne pouvait seulement se douter.
Ils vivaient dans la capitale très naturellement.
Ils se faisaient ingénieurs ou banquiers. Mais ils se taisaient.
Ils se faisaient pianistes ou marchands de moquette. Mais ils se taisaient.
Amputés de l’envie, du besoin d’expliquer.
Non, c’est plus dur encore : ils resteraient à jamais châtrés de la possibilité de partager.
Marianne elle-même pourrait-elle faire passer à travers la musique ce nœud de l’avenir qui se bloquait en elle ?
Elle s’en taisait.
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Video de Pierre Rouanet (1) Voir plusAjouter une vidéo

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