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Citations sur L'été des quatre rois (118)

En cherchant bien, on trouvait aussi une hampe de bois autour de laquelle s'enroulait un grand drapeau ficelé dans sa housse jaunie par des cordelettes de chanvre qui cassaient lorsque l'on cherchait à les défaire. Alors chacun comprenait, et un silence presque religieux se faisait dans la pièce. Ceux qui étaient restés couverts au moment d'entrer dans la maison se mettaient tête nue comme à la messe. Une femme appelée à la rescousse s'occupait de déshabiller complètement ce vestige de gloire, puis on allait à la fenêtre pour le dérouler entièrement, et les trois couleurs, portant parfois en lettres d’or le nom d'un regiment dissous, claquaient au vent comme un premier coup de feu.
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Thiers n'ajouta rien d’autre qu’un sourire de triomphe et s'exécuta. Si le coup qu'ils préparaient à demi-mot réussissait, demain il serait ambassadeur ou député, en attendant mieux encore.

Epuisé d'avoir été tant poudré, le prince de Talleyrand ne prit pas la peine de raccompagner son hôte et s'avança en dandinant sur ses pieds de palmipède vers le salon d'angle où il avait pris l'habitude de dicter ses mémoires. Il s'assit à son bureau. Demanda au secrétaire d'entrouvrir les volets intérieurs pour garder un œil sur la place Louis-XV où les troupes royales stationnaient, quand soudain il entendit des cris et vit, sortant des jardins en courant en tous sens, des gardes Suisses désarmés et les bras levés vers le ciel. Il se retourna lentement car ce mouvement exigeait chez lui de faire pivoter son corps tout entier et découvrit le dome du pavillon de l'Horloge orné du drapeau de la Révolution et de l'Empire comme en 1815.

Puis il observa la superbe pendule au triomphe d'Apollon posée sur la cheminée qui venait de sonner les douze coups et dit à son secrétaire, dont la plume était restée suspendue :

- Mettez en note que, le 29 juillet 1830, à midi cinq minutes, la branche aînée des Bourbons a cessé de régner sur la France.
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Chaque garde national avait conservé non seulement son uniforme mais aussi un équipement payé sur ses deniers, et il en était de même de tous les anciens conscrits, des demi-soldes et des vétérans des armées de l'Empire, de tous ceux, enfin, qui, démobilisés en 1814 puis en 1815, étaient rentrés chez eux, défaits, humiliés, mais solidement armés. On prenait de vieilles escabelles pour aller chercher à tâtons derrière les corniches droites des armoires de mariage ou au-dessus du ciel de lit moutonné de poussière des fusils parfaitement huilés et emmaillotés dans leur linge comme des nouveau-nés.
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... il [faut] toujours que les acteurs, non contents de mal jouer, se donnent le ridicule de penser. 
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Depuis le renvoi du ministère Martignac, il [Adolphe Thiers] en était convaincu, le duc d’Orléans, fils de régicide, compagnon d’armes de Dumouriez, prince libéral et populaire, offrait un compromis possible pour une France éprise de liberté mais fatiguée des convulsions historiques. Il était l’heure pour le fils de Philippe Égalité d’entrer en scène ...
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... il ne pouvait y avoir de place, à ce moment de l’histoire de France, que pour une révolution à l’anglaise. Une révolution qui chassait un roi prisonnier d’un passé révolu [Charles X] pour en couronner un autre plus conforme aux aspirations de la nation. 
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Aussi, tout en descendant le grand escalier, elle ne cessait de répéter à propos de Pozzo :

— Il est parfait, madame de Boigne, il est parfait, c'est tout à fait l'un de nous...

La comtesse fut flattée d'être ainsi associée au parti orléaniste mais le « madame de Boigne » lui laissa un petit goût amer. La princesse se refusait obstinément à valider les titres de courtoisie, même au beau milieu d'une révolution. A tout prendre, la comtesse eût préféré «mon amie», «ma très chère», «ma bonne», plutôt que ce terrible « madame de Boigne » qui sentait la bourgeoise comme la caque le hareng. Adèle d'Osmond était issue d’une excellente famille, mais elle n’avait jamais été comtesse par son mariage, pas plus d'ailleurs que son mari ne s'appelait Boigne. Il était bêtement né Benoît Leborgne, ce qui sonnait assez mal. Elle le savait, en souffrait et dissimulait de son mieux cette vilaine cicatrice matrimoniale parmi d'autres plus secrètes encore. Madame Adélaïde venait de raviver la plaie.
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Ils étaient dans l’étreinte, à cet instant précis où survient le grand frisson de la petite mort, lorsqu’on frappa à la porte pour les ramener à la médiocrité de la vie. L’officier plongea sous le lit, et la duchesse [de Berry], les joues en feu et rabattant sa chemise, demanda ce que c’était. Le roi la priait de descendre. 
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Le dîner fut servi sur une table soigneusement dressée car les concessions de monsieur de Talleyrand aux désordres de l'émeute s'arrêtaient au bas de son escalier. Chez lui, tout restait princier, et le maître d'hôtel portant la grande livrée aux couleurs de la maison de Talleyrand-Périgord annonça très cérémonieusement l'arrivée de monsieur le duc de Broglie avant de refermer la porte derrière lui dans un grand fracas d'étiquette. Le prince joua longtemps au chat et à la souris avec son hôte, s'interdisant la moindre allusion à une révolution qui faisait pourtant trembler les vitres de sa propre salle à manger, mais la canaille ne lui avait jamais coupé l’appétit, et les plats se succédaient dans les règles du grand service à la française, fixé sous le règne de Louis XV. À chaque nouveau plat, Talleyrand invitait cérémonieusement le duc de Broglie à se servir le premier. Au dessert, le maître d'hôtel annonça la visite de l'ambassadeur de Sa Majeste Ie roi d'Angleterre. Son Excellence lord Stuart de Rothesay salua Broglie avec beaucoup d’amabilité puis, sans s'embarrasser de sa présence et comme reprenant une conversation privée interrompue quelques instants plus tot, s'indigna des risques que les sottises politiques du roi Charles X et de son entourage faisaient courir à l’ordre social et a la quiétude de l’Europe, car les révolutions dérangeaient toujours l’architecture savante patiemment dessinée par les diplomates. Talleyrand, qui considérait la carte de I'Europe et ses équilibres subtils comme une sorte d'oeuvre personnelle, opinait d'un air grave quand, sortant enfin de son silence, il assura à ses invités qu'il venait d’écrire au duc d'Orleans pour l'inviter à ne pas entrer dans Paris où il régnait encore une chaleur accablante, mais tout en lui conseillant de ne pas s'approcher non plus de Saint-Cloud où l’air n’était plus très sain depuis quelques jours. Chacun comprit, personne n'objecta et tout le monde s'en alla. La couronne de France venait de se jouer sur l'échiquier de l'Europe entre la poire et le fromage.
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Au moment de l’élévation, le roi se prosterna, priant à nouveau pour la France, pour ce frère martyrisé qui lui avait laissé une couronne tachée du sang de Saint Louis et pour son fils poignardé un soir de fête. Sa Majesté n’aimait pas à penser mais se plaisait à prier. Sur la recommandation de son directeur de conscience, il associa à ses prières sa pauvre femme morte depuis des lustres et dont il ne parvenait pas à se rappeler exactement son visage, tant il l’avait peu regardée de son vivant.
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