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EAN : 9782809702385
304 pages
Editions Picquier (07/01/2011)
3.98/5   31 notes
Résumé :
Un homme de trente ans revient après dix années de guerre. Il essaie de recoller les morceaux épars de son existence.

A la lueur d'une petite lampe à pétrole, nuits après nuits, feuillets après feuillets, il écrit sa vie, la guerre, l'amour.
L'écriture le repousse de plus en plus loin, de plus en plus profondément dans le passé, la boue, le sang, la violence, les atrocités.

Et les feuillets s'entassent pendant que la vie de t... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
« le Chagrin de la Guerre » de Bảo Ninh (2011, Philippe Picquier, 304 p.) que je n'ai pas pu lire en français car épuisé et totalement indisponible, je me suis donc rabattu sur un vieil exemplaire de « The Sorrow of War » (1995, Riverhead Books, 236 p.). C'est un des rares livres écrit par un ancien combattant du Nord-Vietnam. Certes, il y a le contexte du modèle importé de l'URSS et de la République Populaire de Chine. Cet « homme nouveau » devait avoir « un sens élevé de la collectivité, une forte aspiration pour la science et la technique, l'amour de la littérature et des arts, le patriotisme accompagné de l'esprit internationaliste prolétarien » selon la doctrine officielle de Hanoi. Il devait donc lutter contre les « mauvais éléments » et triomphait normalement en toute circonstance. C'est évidemment un modèle importé de l'URSS et de la République Populaire de Chine. Cet « homme nouveau » devait avoir « un sens élevé de la collectivité, une forte aspiration pour la science et la technique, l'amour de la littérature et des arts, le patriotisme accompagné de l'esprit internationaliste prolétarien » selon la doctrine officielle de Hanoi. Il devait donc lutter contre les « mauvais éléments » et triomphait normalement en toute circonstance.
le héros et narrateur, Kiên s'est engagé à 17 ans dans la « 27ème Brigade Glorieuse de la Jeunesse ». C'est le seul survivant d'un peloton de 13 éclaireurs. Il fait aussi parti des 10 survivants, sur 500 initiaux en 1969. Et maintenant il est affecté à l'unité qui recueille les squelettes des combattants dans les multiples zones de combat. Il revient à la vie civile après dix ans de guerre. Au début, il tente de retrouver Phuong son premier amour, le seul qu'il ne connaîtra jamais. Etudes à l'université, mais le passé l'obsède et finalement Phuong ne l'intéresse plus, chose d'ailleurs réciproque. Faute de quoi, il devient écrivain et va rédiger son « roman » pour exorciser ses souvenirs. La chose n'est pas si simple et se lève alors le doute sur la légitimité de son action. Il se rend compte alors que cette guerre « légitime » a détruit en réalité toute une génération de vietnamiens. D'où les remords et hésitations de l'écrivain. Il devient artiste maudit, quitte Hanoi après avoir tenté de brûler son manuscrit. Mais celui-ci est sauvé par une femme muette. Finalement, dans l'épilogue, on apprend, par un personnage qui parle à la première personne, qu'il a lu et recopié ce manuscrit en partie détruit. Où est le vrai, le vécu, où est le faux ou le recopié. La frontière entre le réel et l'imaginaire n'est t'elle pas la même que celle entre le légitime et la propagande. Il faut dire que ces épisodes d'écriture-lecture-traduction sont un peu à l'image du roman. Bảo Ninh achève une première version en vietnamien « Thân phận của tình yêu » (Le Destin de l'Amour). Version rejetée par le régime communiste, mais qui est ronéotée et diffusée à Hanoi. Cette première version est traduite en anglais par Phan Thanh Hao et envoyée chez Secker & Warburg à Londres. Après contact, Frank Palmos, un journaliste australien, entre autres auteur de « Ridding the Devils » (1991, Arrow Boos, 214 p.) sur la guerre du Vietnam, est contacté pour éditer le livre. Après discussion, il réécrit le roman sous sa forme actuelle. Cette version est alors contrefaite par le gouvernement vietnamien et est vendue aux touristes. Comme quoi, on apprend vite la notion de profit, même dans un système collectiviste. Quant à ce qui est de réécrire l'histoire, c'était déjà une habitude.
Même après la guerre, lorsque Bao Ninh s'essaye à la littérature, ses souvenirs de guerre lui rappellent sans cesse son passé. « le passé continue de me hanter [...]. Les mois, les années de ma vie. Mon époque. Ma génération. Toute la nuit, j'ai pleuré, je me suis souvenu. Les camarades, l'amertume, l'humiliation [...]. Maintenant, regardez la réalité que nous vivons, ne trouvez vous pas qu'elle n'a rien de mieux que celle, banale et brutale, des temps d'après guerre ? ». Pour lui, la solution pouvait être l'écriture, ce qui n'a pas été évident. « En commençant ce premier roman, avait il l'intention d'écrire un roman d'après guerre [...]. Mais, irrésistiblement, les pages du manuscrit se remplissaient de morts, s'enfonçaient lentement dans la jungle ». Retour sans cesse sur son passé, sur ses morts, il n'est plus que « le prophète des mois et des années morts, l'annonciateur du passé ». ce n'est pas pour rien que le livre s'ouvre sur la « Jungle of Screaming Souls » (la jungle des âmes en peine). A noter que ces scènes d'âmes errantes que sont les morts au combat, non ensevelis, est une part importante de la culture vietnamienne. Cela a même conduit à un programme de guerre psychologique « Operation Wandering Soul » (Opération Ame Errante). de puissants haut-parleurs, installés sur hélicoptères ou au sol, émettaient, des sons assez étranges, cris ou lamentations, de nuit de préférence dans la jungle. L'effet qui en résulte est spectaculaire au point que ces émissions ont dû être limitées aux soldats de NVA (les nord-vietnamiens), car l'effet était identique sur les soldats du Sud (ANRV) et les démoralisait considérablement. Ces sons, sensés provenir des soldats morts et non enterrés, semaient la terreur dans les rangs des soldats. Ils étaient de préférence émis à l'approche de « Vu Lan Day » (le jour de l'âme errante), soit lors de la pleine lune de juillet, au cours de laquelle on honore les aïeux. C'est le même principe que « O-Bon » au Japon, quoique un peu plus tard ou « Zhong Yuan Jie » en Chine, le quinzième jour de la septième Lune de l'année. Cette croyance est également à l'origine de la mission que le jeune Kiên assume, en rassemblant les restes de combattants sur les rives de la rivière Ya Crong Poco, comme l'indique l'ouverture du livre.
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L'auteur de ce roman, qui a lui-même participé à la guerre du Vietnam, nous livre une sorte de témoignage.
Son héros Kiên revenu de dix ans de guerre, noircit des pages et des pages sur cette expérience qui lui reste toujours en tête, les camarades de son groupe d'éclaireurs tous morts désormais.
Il évoque aussi ses parents, leur séparation, leur mort, son adolescence. Et enfin son difficile retour à la vie civile. Son amie du lycée qui le croyant mort, s'apprêtait à épouser un autre homme. Même si elle lui revient, ce n'est plus la même chose.
Parce que selon lui “ Il faut écrire ! Pour oublier, pour se souvenir. Pour se donner un but dans l'existence, une voie de salut, pour pouvoir supporter, garder l'espoir, continuer de vouloir.”

On ne peut pas vraiment suivre le déroulement de la guerre, c'est plutôt les émotions qui sont livrées dans le désordre.
C'est aussi un roman d'amour, de compréhension et d'incompréhension..

J'ai aimé ce texte pourtant pas si facile, livré d'un seul tenant sans chapitre.
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Comment exorciser l'agonie de ses guerres ? Par la littérature, canal efficace dans ce domaine en Occident pour la description des conséquences des première et seconde guerres mondiales, pour ne nommer que celles-là. Dans le chagrin de la guerre, Bao Ninh, membre d'une nouvelle génération d'écrivains au Viêtnam, tente cet exorcisme par la fiction romanesque.

Kiên, homme de trente ans, ancien combattant de la guerre du Viêtnam, revient sur les lieux de son adolescence prématurément écourtée par la mobilisation. Pour reconstituer sa vie, lui redonner une cohérence rétrospective, Kiên écrit sa vie, son engagement, son amour, toujours vivace pour Phuong, rencontrée dans les jardins de Hanoï.

Ce n'est pas à une plate apologie de la guerre que nous conduit le roman, mais à une suite de descriptions d'états d'âme, à l'exposition d'interrogations, de questionnements graves, que les peuples les plus éprouvés par un long conflit ont connu, ce qui est le cas du peuple vietnamien.
Ainsi, de la perception de la guerre, de sa nature cruelle : « Hélas, la guerre, c'est un monde sans foyer, sans racine, une errance pitoyable, grandiose, sans fin, un monde sans hommes, sans femmes, sans sentiments, sans désirs, le monde le plus désolant (…) qu'aient inventé les hommes. »

Autre point, commun à la littérature occidentale de la guerre, l'espoir immense exprimé que cette guerre est la dernière de l'espèce : « Pour lui, c'était la dernière des guerres. Malgré le caractère sacré, douloureux de cette lutte contre les Américains, la guerre s'inscrivait dans son coeur comme les paroles d'un testament, qui n'apportaient rien à sa vie présente, mais qui restaient profondément ancrées dans sa conscience. »

Le long de ce récit, Kiên se pose bien sûr la question : comment surmonter la guerre, ses séquelles, ses blessures. Les réponses sont données par le père de Kiên, mourant : « le temps nouveau viendra. Radieux. Magnifique…Mais jamais la tristesse ne s'éteindra …Il restera la tristesse …La tristesse immémoriale qu'on se passe de génération en génération .Je n'ai rien d'autre à te laisser qu'elle, la tristesse. »
A la fin de l'ouvrage, l'auteur laisse entrevoir une victoire des forces de vie « Nous avons survécu à la guerre, pour revenir, chacun par un chemin qui lui est propre, dans la vie (….) mais c'est la meilleure vie qu'il nous soit donné d'espérer car c'est une vie dans la paix. »

La littérature vietnamienne contemporaine vient de conquérir à coup sûr ses lettres de noblesse .Le chagrin de la guerre est un grand roman, à multiples facettes, d'une grande finesse psychologique .A découvrir de toute urgence.



Lien : http://www.bretstephan.com
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Dans « le chagrin de la guerre » Bao Ninh raconte dix années de guerre vécues du côté nord-vietnamien. Comment Kien, un jeune collégien amoureux s'est retrouvé en l'espace de quelques jours dans un train quittant Hanoi pour les zones de combats vers le Sud. le drame que lui et son amie Phuong ont connu dans ce train bombardé. La déchirure qui en résulta et qui rendit leur amour impossible même quand ils se retrouvèrent après la guerre. C'est un roman poignant et le lire juste après celui de Tim O'Brien fait ressentir combien, des deux côtés de la ligne de front, les expériences étaient similaires : la peur, la camaraderie un peu facile, le souvenir lancinant d'avoir dû tuer pour la première fois, les sacrifices des compagnons ou d'inconnus rencontrés pour quelques minutes, et pourtant cette impression d'inutilité et de gâchis, qui ne fait que croître au fil des années après la guerre.
Lien : http://www.lecturesdevoyage...
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Le temps nouveau viendra. Radieux. Magnifique…Mais jamais la tristesse ne s’éteindra …Il restera la tristesse …La tristesse immémoriale qu’on se passe de génération en génération .Je n’ai rien d’autre à te laisser qu’elle, la tristesse
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Le devoir d'un homme en ce monde c'est de vivre et non de se sacrifier, de vivre totalement tous les aspects de la vie et non de les éviter... Je ne te conseille pas de t'accrocher à la vie à n'importe quel prix, mais de te méfier de toute tentation de mourir pour prouver quelque chose.
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Le passé continue de me hanter [...]. Les mois, les années de ma vie. Mon époque. Ma génération. Toute la nuit, j’ai pleuré, je me suis souvenu. Les camarades, l’amertume, l’humiliation [...]. Maintenant, regardez la réalité que nous vivons, ne trouvez vous pas qu’elle n’a rien de mieux que celle, banale et brutale, des temps d’après guerre ? .
En commençant ce premier roman, avait il l’intention d’écrire un roman d’après guerre [...]. Mais, irrésistiblement, les pages du manuscrit se remplissaient de morts, s’enfonçaient lentement dans la jungle
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Les mois, les années de ma vie. Mon époque. Ma génération. Toute la nuit, j'ai pleuré, je me suis souvenu. Les camarades, l'amertume, l'humiliation.
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Olivier BARROT présente le livre de BAO NINH, "Le chagrin de la guerre", premier roman vietnamien sur la guerre du Viêt Nam traduit en français.
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